La structure clandestine, qui réunit l'Union des combattants et le 22 octobre, a revendiqué dans un communiqué authentifié des actions perpétrées contre des résidences secondaires, des entreprises de BTP, un camping et deux véhicules de police. À moins de dix jours de la réunion avec Paris, le FLNC se montre sévère envers l'État et exhorte également le "président de l’Exécutif à prendre la mesure de sa responsabilité".
Dans un communiqué authentifié, le FLNC revendique 16 actions violentes perpétrées depuis le début de l’année en Corse.
Signé par la structure clandestine, qui réunit l'Union des combattants et le 22 octobre, le texte est dédié à la mémoire d’Yvan Colonna, assassiné à la prison d’Arles au mois de mars dernier.
Dans le document de quatre pages, le FLNC considère que "l'horizon s'assombrit" pour la Corse : "Notre pays est confronté à une somme de problèmes qui entraîne désormais notre peuple dans un compte à rebours mortifère."
Communiqué FLNC du 11/07/2022 on Scribd
"Hégémonie" de Femu a Corsica
"L'environnement politique national, mais aussi français et international, n'augure pas la possibilité proche de notre sauvegarde en tant que peuple souverain", indique le texte qui pointe des responsabilités multiples.
En première ligne des récriminations, la stratégie politique de la majorité territoriale : "Sur notre terre, les élections législatives françaises ont confirmé la volonté d'hégémonie de l'équipe actuelle en charge de la Collectivité De Corse. "Femu a Corsica" s'est employé à ne pas perdre une miette de son pouvoir local. Et même si la carte législative française sur la terre de Corse ne change pas, cette élection laisse un nouveau goût amer d'absence totale de recherche de synergie politique."
"Post nationalisme"
Les clandestins poursuivent : "Le choix de centraliser la stratégie de gestion autour du Président de l'Exécutif et de son équipe est assumé par Gilles Simeoni. Son chemin est tracé et affirmé depuis 2017. Celles et ceux qui n'y adhèrent pas sont marginalisés. Quels que soient leur engagement historique et leurs compétences. Nous voyons l'émergence de personnes dans l'univers politique corse qui représentent parfaitement ce que nous avons appelé dans une précédente communication le "post nationalisme". Une forme de patriotisme bobo, d'autosatisfaction assumée, quel que soit le résultat obtenu."
Équipe reportage : D. Moret et D. Lameta.
"La vérité sur l’assassinat d’Yvan Colonna"
Le FLNC livre ensuite son analyse sur la situation de la France "désormais empêtrée dans une Assemblée sans majorité absolue avec un Président désavoué par une abstention record et une extrême droite ayant le groupe le plus important".
"L'attitude de la France à l'égard de notre peuple et de nos élus a rarement été aussi méprisante et condescendante. Nous attendons toujours la vérité sur l'assassinat d'Yvan Colonna, mais là aussi nous savons que nous ne l'aurons jamais. La France sachant mieux que quiconque cacher ses ignominies."
"Le peuple corse meurt"
Pour les clandestins, le "peuple corse meurt et disparaît". "C’est un constat que tous les Corses font aujourd’hui, qu’ils soient nationalistes ou pas."
Le FLNC fustige "la colonisation de peuplement qui détruit la structure sociale, culturelle et économique du peuple corse". Il fait également état d’une "d’une bétonisation de la Corse qui ne sert pas les Corses et d’une consommation de drogue qui alimente le trafic".
"Pessimiste" sur les discussions avec Paris
À moins de dix jours de la première réunion à Paris - prévue le 20 juillet - entre les élus insulaires et le ministre de l’Intérieur sur l’avenir institutionnel de l’île, l'organisation clandestine se dit "extrêmement pessimiste".
"Certains s’extasient d’un moment historique, d’une situation ouverte vers un avenir plus radieux pour notre peuple. À cet instant, rien ne semble le confirmer, si ce n’est une série de rendez-vous entre Paris et la Corse. Enième rendez-vous, rencontres, discussions dont par le passé, aucune n’a permis de redonner espoir en l’avenir."
"Responsabilité" du président de l'Exécutif
Concernant les discussions avec le ministre Gérald Darmanin - qui viendra en Corse les 21 et 22 juillet -, le FLNC considère que ces négociations doivent se "placer à la hauteur des exigences historiques de la lutte de libération nationale" et autour de trois axes :
- Reconnaissance officielle du peuple corse
- Mise en place d’une autonomie politique transitoire immédiate
- Accession à l’autodétermination dans un délai de 5 ans avec définition du corps électoral
Les clandestins exhortent "le président de l’Exécutif de Corse à prendre sans attendre la mesure de sa responsabilité". Et d’ajouter : "si pour l’instant il reste le chef désigné du rapport à la France, il faudra qu’il soit en capacité de fédérer pour reconstruire la route vers l’autodétermination en recherchant des synergies en Corse et en Europe plutôt qu’en France. Alors il validera ce à quoi nous avons participé depuis 2014 et 2016, dates de la démilitarisation progressive de l’espace militaire."
"Le chemin sera difficile", pointe le FLNC pour lequel "l’horizon [pourrait] s’éclaircir autour d’une unité stratégique des forces patriotiques".
Ci-dessous, l'analyse de Jean-Vitus Albertini :
Les actions revendiquées
Depuis le début de l’année et la reprise d’actions violentes (incendies, attentats) visant majoritairement des résidences secondaires, aucune revendication n’avait été faite jusqu’à ce jour. La dernière en date du FLNC remontait à fin septembre 2021. Elle concernait une tentative d'attentat à Capo di Feno, sur la commune d'Ajaccio.
Ce 11 juillet, le mouvement clandestin a revendiqué 16 actions :
- Véhicule policier Saint Antoine (Bastia)
- Véhicule policier (Lupinu)
- Entreprise BTP AM Construction (Lucciana)
- Entreprise Bâtiment Naaim AH (Prunelli di Fium'orbu)
- Résidence Ghisunaccia
- Résidence Anna Lesia (Corti)
- Résidence Delarue (Carghjese)
- Résidence (Carghjese)
- Résidence Da Silva (Tavacu)
- Bungalows Camping Cap Fun (Aleria)
- Résidence Brandu
- Résidence Brandu
- Résidence Cambia
- Résidence Linguizetta
- Résidence Santa Lucia di Porti Vechju
- Résidence Capu di Fenu (SCI Mirand)
Le FLNC - Union des combattants et du 22 octobre - ne s’était plus exprimé depuis mars dernier et l’assassinat d’Yvan Colonna. Les clandestins menaçaient alors de repasser à l’action.
Le communiqué de ce lundi et les revendications qu'il comporte viennent confirmer que la menace a été mise à exécution.