Le diocèse de Strasbourg, en partenariat avec l’association "SOS aide aux habitants-France Victimes", ouvre en Alsace une ligne d’écoute téléphonique à destination des personnes ayant subi des abus sexuels au sein de l’Eglise. C’est le premier dispositif du genre en France.
C'est le premier dispositif du genre en France : les personnes ayant subi des abus sexuels au sein de l’Église en Alsace peuvent désormais se confier grâce à l’ouverture d’une ligne téléphonique dédiée. Ce service d'écoute a été mis en place par le diocèse de Strasbourg en partenariat avec l'association strasbourgeoise SOS aide aux habitants, affiliée à la fédération France victimes.
Le diocèse de Strasbourg n’a pas attendu la publication du rapport de la CIASE, la Commission indépendante sur les abus sexuels commis au sein de l'Église (voir notre article) pour inciter ses fidèles à témoigner.
Dès 2018, à travers une lettre pastorale (à consulter ici), l’archevêque du diocèse, Mgr Luc Ravel, appelait les victimes potentielles à se faire connaître, à libérer leur parole pour faire toute la lumière sur cette "gangrène" - ce sont ses mots - qui ronge l'Église. Un appel entendu : hommes comme femmes, de nombreux témoins se sont dès lors fait connaître, révélant les abus qu’ils avaient subis dans leur jeunesse et l’identité de leur agresseur.
65 nouveaux signalements en trois mois en Alsace
Le 5 octobre 2021, la publication du rapport de la CIASE a eu l’effet d’une boîte de Pandore. "À partir de ce moment-là, nous recevions jusqu’à trois nouveaux signalements par jour, constate Michèle Cardoso, la secrétaire particulière de l'archevêque strasbourgeois, c’est devenu très compliqué à gérer." Au total, en l'espace de trois mois, une soixantaine de témoignages ont ainsi été recueillis en Alsace.
Or le diocèse n’a pas l’expérience ni les moyens humains suffisants pour pouvoir accompagner chaque victime dans ses démarches et dans son travail de reconstruction. D’autant que certaines affaires peuvent donner lieu à des suites judiciaires, quand le délai de prescription n’est pas dépassé et que l’agresseur n’est pas mort. D'où le partenariat lancé avec l’association bas-rhinoise « SOS Aide aux habitants », membre de la fédération France Victimes,
"Ce partenariat va nous permettre d'être soutenus dans notre démarche, précise le directeur de communication du diocèse, François-Nicolas d'Arlincourt. Quand une victime nous appelle, elle a parfois besoin d’être orientée sur le plan juridique, pour trouver un avocat par exemple, et sur le plan psychologique."
Depuis 1985, cette structure propose en Alsace un « bureau d’aide aux victimes ». Les personnes ayant subi des violences physiques, des agressions sexuelles, du harcèlement ou tout autre préjudice peuvent le contacter gratuitement, et de façon anonyme. Elles peuvent y bénéficier d’informations sur leurs droits, un accompagnement dans leurs démarches judiciaires, un soutien psychologique et des relais éventuels vers des professionnels comme des avocats.
L'association a déjà par le passé recueilli ce type de témoignages. "Certaines personnes ne souhaitent plus avoir aucun contact avec l'Église et se tournaient déjà vers nous", explique Faouzia Sahraoui qui préside l'association. Pour les accompagner au mieux, trois psychologues de la structure sont en train de recevoir une formation spécifique au droit canon. "Nos juristes ont également épluché le rapport de la CIASE et toutes ses recommandations", ajoute Faouzia Sahraoui.
L'association ne rendra pas compte des témoignages qu'elle recueillera au diocèse. Elle l'informera juste du nombre de signalements pour que l'Église puisse mener à bien son travail d'inventaire. Contacter ses services n'impose pas de révéler son identité, ni d'engager d'éventuelles poursuites contre les abuseurs. Mais celles qui le souhaitent pourront être accompagnées dans leurs démarches judiciaires et dans leur signalement au procureur de la République.
La ligne d'écoute est accessible au 06.09.73.96.78, 5 jours sur 7, de 9h à 17h.