Le chef de l’Etat a annoncé, mardi 9 novembre, sa décision de relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays. L’Alsace pourrait-elle accueillir une nouvelle centrale ? Un an et demi après la fermeture de Fessenheim nous avons posé la question à plusieurs élus locaux.
"Relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays", voici le souhait et l’annonce qu’a fait Emmanuel Macron lorsqu’il s’est adressé aux Français ce mardi 9 novembre. Une annonce inattendue, qui n’a pas manqué de faire réagir les élus. Son projet vise à "garantir l’indépendance énergétique de la France" selon le chef de l’État. Mais il reste flou : aucune date n’a été donnée pour un début de chantier et le nombre de réacteurs envisagés n’a pas été précisé.
Si le projet reste vague, nous nous sommes quand même posés la question. Plus d’un an et demi après la fermeture de Fessenheim, l’Alsace pourrait-elle accueillir une nouvelle centrale ? Pour l’heure, la plupart des réacteurs actuels ont été construits entre 1970 et 1990.
Le pays en compte aujourd’hui 56, qui lui garantissent déjà une production électrique bas carbone. Mais ce parc vieillit, de nombreuses installations approchent l’âge de 40 ans (d’où la fermeture de la doyenne d’entre elles, Fessenheim).
L’Alsace sans production d’électricité d’ici 5 à 10 ans ?
Pour Raphaël Schellenberger, député LR du Haut-Rhin, l’annonce du président de la République a été une grande surprise. "Emmanuel Macron fait l’exact contraire de ce qu’il avait promis, c’est un virage à 360 degrés" déclare le député, également président de la mission d’information relative à la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim.
Et si l’Alsace devait accueillir une centrale alors ? Eh bien outre l’effet de surprise, Raphaël Schellenberger affirme que la région et tout particulièrement la plaine du Rhin, a besoin d’électricité. "Dans 5 à 10 ans, nous aurons une plaque en plein cœur de l’Europe qui ne sera plus capable de produire le quart de ce qu’elle consomme. L’Allemagne ferme ses centrales, nous avons fermé Fessenheim, nous aurons, dans la région, un gros problème d’approvisionnement électrique" nous explique-t-il. Il va donc falloir trouver des solutions. "Nous avons besoin de moyens de production d’électricité sérieux et pilotables, pas juste des éoliennes, des centrales à charbon sûrement pas, alors une centrale nucléaire, c’est la moins pire des options" affirme-t-il.
Une nouvelle centrale, ce serait de la dinguerie
Jacques Fernique, Sénateur du Bas-Rhin
Une option inenvisageable, pour Jacques Fernique, sénateur du Bas-Rhin. D’un point de vue européen d’abord "je ne suis pas sûr que, l’Allemagne et la Suisse qui ont une politique de fermeture de leurs centrales, voient l’implantation d’un réacteur à la frontière, d’un bon œil" explique-t-il. De plus, "de part la faille sismique, la nappe phréatique très vulnérable, nous n’avons pas les capacité d’accueillir une nouvelle centrale, ce serait de la dinguerie" ajoute le sénateur.
Selon lui, les Alsaciens n’accepteraient pas une telle chose. "Ils sont remontés à bloc contre cette façon de prendre des risques, on a déjà eu l’expérience avec Stocamine" explique Jacques Fernique qui dit tout vouloir miser sur les énergies renouvelables. "Si on veut aller vers la neutralité carbone, il faut enclencher des changements maintenant et cela passe par la sobriété autrement dit la décarbonation des transports, des frets ferroviaires mais aussi des transports collectifs performants" conclut le sénateur du Bas-Rhin.
Coupler le nucléaire et les autres énergies renouvelables
De son côté Frédéric Bierry, président de la Collectivité européenne d’Alsace, aimerait qu’un échange soit organisé sur le sujet. "La CEA et les autres acteurs concernés souhaiteraient se retrouver rapidement autour de la table pour étudier la question" explique-t-il. "Je suis ouvert à toute discussion avec le gouvernement pour mener une réflexion sur une éventuelle implantation en terre alsacienne. La Collectivité prendra toute sa part dans une stratégie alsacienne énergétique qui doit coupler le nucléaire et les autres énergies renouvelables" ajoute-t-il.
La fermeture de Fessenheim est un scandale écologique
Frédéric Bierry, président de la Collectivité Européenne d'Alsace
Selon le président de la CEA, la fermeture de Fessenheim est un scandale écologique. "La compensation de l’énergie produite sur ce site n’a pas été anticipée. Ce qui nous oblige aujourd’hui à aller chercher une source d’énergie dans des mines de charbon beaucoup plus polluantes que le nucléaire… C’est un non-sens" explique-t-il. "Malgré l’Accord de Paris, les émissions mondiales grimpent en flèche, il faut rectifier rapidement le tir" conclue Frédéric Bierry.
Si tous se mettent d’accord sur la nécessité d’accélérer la transition écologique, tous n'ont pas la même opinion sur comment la mettre en œuvre. En ce qui concerne le nucléaire, pour l’heure la région n’a pas été évoquée parmi les sites qui pourrait être concernés, reste à connaître le détail du projet du gouvernement.