Guerre en Ukraine - De retour chez ses parents, un pâtissier alsacien raconte son long périple : "on a été abandonné par le quai d'Orsay"

Installé à Kiev depuis 2012, l'Alsacien Christophe Roller a fini par se résoudre à quitter la capitale ukrainienne le lundi 7 mars. Sa compagne a dû rester dans le pays auprès de sa famille. Depuis Reichshoffen, le pâtissier veut se remettre au travail rapidement pour la faire venir auprès de lui.

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"Je n’ai pas dormi ou presque pendant cinq jours". Christophe Roller est épuisé. On l’entend à sa voix. Le pâtissier alsacien est arrivé à Reichshoffen (Bas-Rhin) le samedi 11 mars, après cinq jours de route. Installé à Kiev depuis 2012, il a fini par fuir son pays d’adoption. Après avoir décidé dans un premier temps de rester sur place, il a été rattrapé par la réalité. Une réalité bêtement économique : "Dans un pays en guerre, vous ne pouvez rien faire, vous ne pouvez pas travailler. Au bout de 15 jours, il ne me restait que 500 euros. Avec ma compagne, on a décidé que je parte pour subvenir à nos besoins".

La première chose qu’a fait l’artisan de 44 ans avant de partir, c’est de mettre sa compagne Kseniia et le petit garçon de celle-ci en sécurité dans une datcha (maison de campagne, ndlr) à 200 kilomètres de la capitale. "Elle devait rester pour sa famille, ce n’était pas possible autrement". 

Alors Christophe est parti avec quelques affaires, et le chien. Il garde un contact permanent avec sa famille en Ukraine. "On fait un point par téléphone toutes les deux heures. Dans la datcha, il y a juste l’électricité. Il faut aller chercher l’eau au puits, mais Kseniia a des provisions pour quinze jours, et il y a un petit village à quelques centaines de mètres pour aller faire quelques courses. Elle a sa voiture avec le plein d’essence", énumère Christophe.

Parti seul au volant de sa voiture le lundi 7 mars au matin, il a traversé plusieurs pays, perdant de longues heures à passer les frontières. Trois heures entre l’Ukraine et la Moldavie, quatorze entre la Roumanie et la Hongrie ! "C’était ça le pire", témoigne Christophe. "Aux frontières, on ne peut pas dormir, sinon on se fait doubler et on perd encore des heures. C’était dur." 

L’artisan déplore l’absence d’aide des autorités dans ce « rapatriement » : "On a été abandonné par le Quai d’Orsay. D’abord on nous a dit de rester à la maison. Ensuite de quitter Kiev, mais rien n’était prévu. Les Français se sont organisés entre eux, en bus, en covoiturage, on partait ensemble pour s’aider, par exemple si on tombait en panne d’essence. Il y a eu une très forte entraide. Tous les autres Français à la chambre de commerce que je connais ont quitté l’Ukraine."

On s’est juste embrassés, pas besoin de parler.

Christophe Roller

Christophe est arrivé samedi matin chez ses parents à Reichshoffen. Dans la maison familiale où il a grandi. Sur le coup de l'émotion, ses parents, Gertrude et Bernard, n’avaient pas de mot. "On s’est juste embrassés, pas besoin de parler". Gertrude avait préparé une choucroute pour réconforter son fils après son épuisant périple. Et autour de la table familiale, c’est déjà le moment de penser à l’après. "Kiev est détruite, deux millions de personnes ont déjà fui. Même si ça s’arrête demain, il faudra au moins deux ans pour reconstruire. Alors vous imaginez une pâtisserie sur place ? Ce n’est vraiment pas la priorité". 

Envolés les projets de s’agrandir pour ouvrir un bistrot à la française. Christophe ambitionne simplement de retrouver un travail rapidement, "ça peut même être autre chose que la boulangerie", pour envoyer un peu d’argent à Kseniia sur place. Il lui faut aussi s’acquitter de quelques démarches administratives, passer à la mairie, à la préfecture. "Depuis le temps, je ne suis même plus inscrit à la Sécurité sociale".

Depuis l’Alsace, Christophe observe déjà le conflit avec les yeux de celui qui en revient : "Ce qui est montré (dans les médias), c’est la douce réalité. Sur place, c’est beaucoup plus rude", souffle-t-il. Mais il conclut sur un ton admiratif : "La résilience du peuple ukrainien est très forte. Ils m’impressionnent. Ce n’est pas ma guerre mais ils défendent bien la porte de l’Europe. »

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