Dans cette terre de droite qu'est l'Alsace, Les Républicains se sont effondrés au premier tour de la présidentielle. Ce qui a permis à Emmanuel Macron d'arriver en tête lors des deux tours. Quelles conséquences auront ces résultats sur les élections législatives de juin en Alsace ? Éléments de réponse avec Philippe Breton, politologue.
4,1% dans le Bas-Rhin et 4,3% dans le Haut-Rhin. Voici les scores obtenus par Les Républicains en Alsace lors du premier tour de l'élection présidentielle de 2022. Même en Alsace, traditionnellement de droite, Valérie Pécresse n'aura pas réussi à convaincre. Pour rappel, François Fillon avait terminé à la deuxième place au premier tour de 2017 avec 22% des voix.
Ce séisme aura certainement des conséquences lors des élections législatives, les 12 et 19 juin prochains. Sur les 15 députés que comptent l'Alsace, huit portent l'étiquette LR (Les Républicains), un DVD et six LREM. Après avoir perdu deux députés alsaciens en 2017, le parti de droite va-t-il exploser en juin ? Philippe Breton, politologue, a répondu aux questions de France 3 Alsace.
Après le score historiquement bas de Valérie Pécresse en Alsace à l'élection présidentielle, les députés Les Républicains (LR) peuvent-ils être menacés en juin ?
Oui très clairement. Et ça s'est ressenti même avant le premier tour, au moment des parrainages. Emmanuel Macron a reçu beaucoup de parrainages d'élus de droite et de centre-droit. Donc même avant l'élection, il y avait des signes importants qu'on aurait un basculement vers Macron. Des élus de droite ont vu que leur avenir n'était pas chez LR, mais vers le président.
Si plusieurs élus de droite ont déjà choisi de rejoindre le président, certains ont-ils voulu se ranger derrière Marine Le Pen ?
Il n'y a pas vraiment de signe dans ce sens. Le Rassemblement national est un parti qui a très peu de cadres et pratiquement pas d'élus en Alsace. Le parti n'arrive pas à se construire à ce niveau. Je ne pense pas que le RN aura des renforts d'ici les élections législatives.
On risque plus de voir davantage de nouveaux députés de La République en marche (LREM) que du Rassemblement national ?
Oui. Les Alsaciens ont toujours été plus de centre-droit, ce qui explique cette dynamique probable pour les législatives. Les députés LR sont pris en étau. La technique de Macron, c'est celle de l'étau. Toutes proportions gardées, il va arriver aux élus LR la même chose qu'il est arrivé aux socialistes il y a cinq ans. La planète Macron a une force de gravité à laquelle la droite alsacienne aura du mal à résister.
Concernant le RN, encore faut-il qu'ils aient des candidats qui aient la légitimité de se présenter. Les législatives, ce sont des élections de proximité. Il faut connaître les électeurs, les maires, les problématiques locales. Chose que le RN ne connaît pas ici. Un bon résultat au niveau national ne suffit pas pour qu'il se traduise au niveau local.
Autre point important : dans les communes rurales, Marine Le Pen a réalisé des scores importants là où il y avait peu d'abstentionnistes. Ses réserves de voix sont dans l'abstention, et ça va jouer dans les législatives, car les gens votent moins pour ces élections. Mobiliser pour les législatives, ça sera compliqué !
L'autre fait marquant de cette présidentielle, c'est le haut score de Jean-Luc Mélenchon dans les grandes villes. Le candidat insoumis est arrivé en tête à Strasbourg et à Mulhouse. Ces résultats auront-ils un écho en juin ?
Les scores de Jean-Luc Mélenchon sont en partie une illusion. Ils ont été permis par un électorat composite et de circonstance. Surtout qu'un certain nombre des électeurs de Mélenchon ont voté Marine Le Pen au second tour dans les milieux périurbains et ruraux. Pour ce qui est des villes, il a bénéficié des votes des milieux populaires et des français issus de l'immigration, ce qui représente un gros bataillon de voix à Strasbourg. Mais cet électorat se mobilise moins pour les législatives. Je ne pense pas qu'on retrouvera ces résultats en juin.