Le procureur de la République de Strasbourg a fait un point sur l'affaire Lina, ce jeudi 19 septembre, près d'un an après la disparition de l'adolescente dans le Bas-Rhin. L'ADN de la jeune fille a été retrouvé sur plusieurs objets présents dans la voiture du principal suspect. Elle aurait été ligotée, mais reste toujours introuvable.
Ce qu'il faut savoir
On savait depuis cet été que l'enquête concernant l'affaire Lina avait connu des avancées majeures ces derniers mois, le procureur de la République par intérim de Strasbourg en a précisé les contours, ce jeudi 19 septembre lors d'une conférence de presse.
L'adolescente n'a pas donné signe de vie depuis sa disparition le 23 septembre 2023 dans la vallée de la Bruche (Bas-Rhin). Elle se rendait alors à pied à la gare de Saint-Blaise-la-Roche depuis son domicile de Champenay (hameau de Plaine), mais n'est jamais montée dans le train pour retrouver son petit ami à Strasbourg, comme elle le prévoyait.
Le 26 juillet dernier, son ADN avait été découvert dans une Ford Puma volée en Allemagne et retrouvée dans le sud de la France. Un suspect avait été identifié : Samuel Gonin, 43 ans, arrêté début janvier 2024 dans l'Aude pour avoir refusé un contrôle douanier. Il s'est pendu le 10 juillet, chez lui à Besançon, laissant ces quelques mots : "J'ai perdu mon honneur, ma dignité, mon humanité, je dois partir. Je ne sais pas me contrôler, ça va trop vite."
1. Lina aurait été ligotée
Le procureur Alexandre Chevrier s'est longuement attardé sur la Ford Puma, un élément clé de l'affaire. Il a fait savoir qu'elle se trouvait "précisément sur le lieu exact de la disparition de Lina et dans la période de temps où elle a disparu. On a deux points de géolocalisation, à 11h20 et 11h26, à proximité immédiate du lieu de disparition". Le téléphone de Lina avait cessé de borner à 11h22.
Les investigations ont permis d'établir que Samuel Gonin était bien le conducteur de ce véhicule le jour où la jeune fille s'est volatilisée. Il a en effet commis un vol d'essence près de Fribourg en Allemagne, à 9h23. "Il n’y a absolument aucun doute sur l’identité de Samuel Gonin et sur le fait qu’il était seul à ce moment précis, donc environ deux heures avant la disparition de Lina", affirme le magistrat.
L'ADN de Lina a été détecté sur des sièges et ceintures de la voiture. Le profil génétique de l'adolescente, comme celui du suspect, ont également été identifiés sur des cordes, retrouvées dans le coffre. "Ce qui tend à démontrer qu’à un moment ou à un autre, Lina a été ligotée", poursuit Alexandre Chevrier.
Aucune trace de sang n'a été relevée, mais les enquêteurs ont découvert des affaires de l'adolescente dans la boîte à gants, notamment son sac à main, sa coque de téléphone et ses écouteurs.
2. Pas d'arme, ni d'aide extérieure
Les constatations effectuées sur la Ford Puma ne révèlent aucun indice en faveur d'un tir avec une arme à feu. Plusieurs couteaux de cuisine ont été retrouvés, ils ne présentent pas de trace de sang.
À ce stade de l'enquête, "il n'existe aucun élément en faveur de l'intervention de tierces personnes". Samuel Gonin apparaît seul sur toutes les images de vidéosurveillance. Si deux autres ADN ont bien été mis au jour dans le véhicule, ils correspondent à des personnes que le Bisontin a rencontrées plusieurs mois après les faits.
3. Un mystère : la présence de Samuel Gonin à Plaine
Une zone d'ombre, "un angle mort" subsiste dans cette affaire, selon le procureur : que faisait Samuel Gonin à Plaine le 23 septembre 2023 ? "La départementale 350 n'est pas un axe de passage. Les enquêteurs n'ont relevé aucune trace d'un quelconque lien entre le suspect et Lina, son entourage ou des habitants du secteur. Aucune trace d'un précédent passage dans le secteur."
Ils ont établi que Samuel Gonin, père de deux enfants, menait une "vie d'errance". Il se déplaçait beaucoup à travers tout le territoire national, sans cohérence apparente. En 2023, il a changé de comportement, quittant sa famille et son travail. Il consommait de fortes quantités de stupéfiants.
L'ancien enseignant devait être jugé le 22 juillet pour deux vols avec violences commis le 25 août 2023. Il a été interpellé pour ces faits en juin 2024. Il s'est suicidé quelques jours plus tard.
Peu avant, le suspect avait subi un examen psychiatrique : "il ne met en évidence aucune pathologie mentale et psychiatrique d'après les experts, mais conclue à un trouble de la personnalité, borderline, et à un état dépressif important, détaille le procureur de la République de Strasbourg. L'expert considère qu'au moment de son examen, Samuel Gonin est parfaitement responsable de ses actes."
4. L'enquête se poursuit de manière active
En fin de conférence de presse, Alexandre Chevreau a assuré que "l'enquête se poursuit de façon active". À la question d'une journaliste "Lina peut-elle encore être en vie ?", il a répondu sobrement : "En théorie, tout est possible, on n'a pas retrouvé son corps. Mais cela fait un an qu'elle n'a pas donné signe de vie."
De nouvelles recherches sont planifiées, assure-t-il, sans vouloir "en dire plus", mais en promettant qu'il "n'est pas question d'abandonner".