Cela fait presque un an que Strasbourg a changé ses règles de stationnement. La ville a modifié les zones et les tarifs applicables en avril 2023. Cette évolution fait encore réagir les habitants.
Un an après, se gare-t-on mieux à Strasbourg (Bas-Rhin) ? La question revient encore souvent dans les conversations. La refonte des tarifs et des zones de stationnement a été adoptée le 20 mars 2023 par la maire écologiste de la ville, Jeanne Barseghian, et son équipe.
Elle est ensuite mise en œuvre dès avril 2023. Les zones jaunes, oranges et violettes sont alors dotées de nouveaux tarifs pour les résidents. Même chose pour les parkings couverts ou les parkings relais. De nouvelles règles ont suivi pour les professionnels, au début de l'année 2024.
Depuis, quels avis ont les habitants et professionnels vis-à-vis des nouveaux régimes de stationnement à Strasbourg ?
Une évolution pas si évidente à accepter
Évelyne Koller est à la tête depuis 20 ans d’un restaurant de Strasbourg (Bas-Rhin), situé avenue des Vosges. Elle a un avis très tranché sur cette nouvelle politique de stationnement, même un an après. "Les gens étaient fâchés : on nous prend pour des cons, on a déjà dépensé 5 euros avant même d’avoir mangé. C’était quand même assez violent et brutal", se souvient-elle. La restauratrice évoque de gros effets sur la fréquentation : "Il y a des gens que l’on ne voit plus beaucoup, qui sont moins réguliers. Cela se traduit aussi par des gens qu’on ne voit plus, remplacés par d’autres. Les gens prennent le minimum, ils ont les yeux rivés sur leur montre car ils sont trop stressés. Ils ont peur de prendre une amende, et ils n’ont pas envie de payer encore plus que ce qu’ils ont payé pour le stationnement."
Son établissement était situé dans une zone idéale, niveau stationnement. Avant que cela ne change totalement. "Au début, c’était gratuit, puis c’est devenu payant au bout de quelques années. C’était 1,50 euro les 3 heures, puis finalement 1,50 euro pour l’heure. C’était gratuit entre midi et deux, puis c’est devenu payant. L’évolution du stationnement ne date pas d’aujourd’hui : l’année dernière par contre, c’était brutal. C’est passé, je crois, de 1,50 à 3,80 euros de l’heure. Au mois d’avril 2023, on est passés du jour au lendemain de zone orange ou verte, à zone rouge. On n’a pas été prévenus, pas de courrier, pas de réunion à la mairie. On ne peut pas prévenir la terre entière, mais peut être au minimum les commerçants qui sont touchés directement", détaille Évelyne Koller.
Des prix perçus comme chers
Au-delà de cette restauratrice, certains habitants aussi sont mitigés. À l’image de cette dame, habituée à faire ses courses dans l’un des quartiers concernés par cette refonte du stationnement. "Je dois reconnaître d'abord que le parking est excessivement cher. Trois quarts d'heure, vous en avez facile pour 3,20 euros, c’est vraiment très très cher. Sans compter qu’une heure sur les places violettes pour faire ses emplettes alimentaires, c’est un peu délicat." Elle fait allusion aux 208 places violettes, où le tarif est d'un euro l'heure. "Si je sais que j'ai vraiment un achat à faire, je prends la voiture, parce que parfois c'est encombrant. Si c'est pour flâner, je prendrai le tram", déplore-t-elle. Tout en trouvant tout de même un petit point positif : "C'est une bonne solution quand même, une heure à un euro, mais c’est pour permettre aux voitures de tourner aussi."
Pour ce résident, les effets de cette nouvelle politique de stationnement sont fructueux, mais pour les autres : "On en voit surtout les inconvénients, plutôt que les bienfaits. Ce sont les gens qui ne sont pas résidents au centre-ville qui en profitent. Les résidents justement ont changé de stratégie et vont prendre des parkings résidents, en extérieur du centre-ville." Il se montre acerbe. "Cela devient de plus en plus compliqué. Pour ceux qui veulent rester une demi-journée ou plus longtemps, c’est hors de prix. Quand on finit notre journée de travail ou quand on a une course à faire, retrouver une place libre derrière est embêtant, ou alors on se retrouve à 5 ou 6 rues de notre logement", déplore cet homme.
Reste enfin ce professionnel, et sa camionnette. Il juge les règles de stationnement inadaptées pour son activité. "Une heure de parking autorisée en zone violette ou sur extra-centre, même pour les sociétés, c'est très compliqué. Il y a un forfait pour les professionnels, mais ça ne fonctionne pas. On s’est déjà pris 5 ou 6 prunes en deux semaines", décrit-il. Il livre une anecdote qu’il juge invraisemblable : "Je me suis garé ici pour décharger les choses lourdes, mais bon dans une heure il faut que je déplace ailleurs. On perd du temps pour rien, alors qu'on veut juste travailler."
Une évolution nécessaire et fructueuse selon la ville
Malgré ces critiques, la ville maintient que le bilan reste positif. Notamment pour le stationnement des professionnels. "Aujourd'hui, le stationnement pour un professionnel notamment dans le bâtiment, dans les métiers de bouche ou de soins coûte entre 400 et 600 euros par an : la facture est divisée par 5 par rapport à l'ancien système", se réjouit Pierre Ozenne. L'adjoint à la maire de Strasbourg aux espaces publics partagés, voiries, foires et marchés, ajoute maintenant que "l'espace public est libéré des voitures ventouses".
Il insiste aussi sur les mesures prises pour le personnel de santé. "Nous avons ainsi étendu la gratuité du stationnement notamment pour les sages-femmes et les aides-soignantes qui avaient aussi des soins à domicile. Pour celles et ceux qui ne font pas suffisamment de déplacements à domicile, nous avons mis en place un forfait professionnel à 400 euros par an et qui leur permet justement de trouver un stationnement de manière illimitée, avec les places désormais libérées", détaille l'élu.
Côté habitants, l'adjoint à la maire écologiste de Strasbourg évoque deux choses : "Nous avons mis en place la progressivité du stationnement résident. En fonction des revenus, le tarif résident est fixé de 15 euros jusqu'à 40 euros. Les résidents disposent aussi aujourd'hui d'une possibilité pour pouvoir stationner leur véhicule dans des parkings couverts ou les parkings relais, ce qui libère de l'espace pour celles et ceux qui ont besoin d'être en stationnement en voie pour effectuer leur déplacement professionnel. Nous avons baissé les tarifs, pour les rendre plus attractifs. Ça commence à partir de 60 euros par mois et une heure de stationnement par jour, pour être au plus proche de son domicile, effectuer une livraison, chercher quelqu'un et ensuite repartir."
La ville indique en outre avoir mis en place un observatoire de la mesure du stationnement de la réforme de stationnement. Histoire de "pouvoir éventuellement ajuster des éléments", si besoin.