Avec une abstention record de 70,94%, la toute nouvelle Collectivité européenne d'Alsace n'a pas suffisamment intéressé les Alsaciens pour les convaincre de voter. La droite consolide son implantation, les écologistes se font une place, que le Rassemblement national n'est pas parvenu à occuper.
Jamais les Alsaciens n'avaient tant boudé des élections : dimanche 20 juin, ils pouvaient pourtant se déplacer une seule fois pour participer à deux scrutins. Mais ce premier tour des régionales, couplé à celui des départementales, a mobilisé moins de 30% des électeurs dans la région. S'ils ont toujours ostensiblement tourné le dos au Grand Est, ce qui peut être une explication du désintérêt flagrant porté à l'élection de l'assemblée régionale, le sort de l'Alsace et sa nouvelle collectivité européenne aurait pu les mobiliser. Cela n'a pas été le cas : l'abstention culmine à 70,94% dans la région, un triste record.
Dans ce contexte, la droite et le centre, qui ont toujours pu compter sur le suffrage des Alsaciens, semblent partis pour consolider leurs bases : leurs binômes sont en tête dans 34 des 40 cantons, et battus avant le second tour dans seulement trois cantons, à Strasbourg (lire les résultats strasbourgeois ici), et Wittenheim.
Leur chef de file, le président sortant, Frédéric Bierry (LR), n'a guère de soucis à se faire pour constituer sa majorité, lui qui a rassemblé 63,02% des voix dans son canton de Mutzig. Il ne doit l'obligation de disputer un second tour face au tandem du Rassemblement national, Geiger/Streicher (18,84%), qu'à la règle électorale qui impose de réunir un minimum de 12,5% des inscrits en plus de la majorité des suffrages exprimés. L'abstention lui coûte une réélection au premier tour.
La droite présente au second tour dans 37 cantons
C'est le cas aussi notamment à Colmar, pour le duo Straumann/Klinkert, qui réunit 63,65% des votes mais affrontera le binôme divers gauche Lentz/Pépin-Fouinat. Et pour Catherine Graef-Eckert et son partenaire Sébastien Zaegel (union de la droite), coiffés du record dans la région, avec 73,90% des voix, ce qui ne l'exonère pas de devoir confirmer sa réélection au second tour face à Larchet/Wackermann (union de la gauche et des écologistes).
Le Rassemblement national ne rassemble pas
Face à ces candidats de la droite et du centre bien installés, le Rassemblement national espérait jouer le rôle du trouble-fête, et faire son entrée dans l'assemblée. Pari très mal engagé, puisque même dans les deux cantons que le mouvement de Marine Le Pen avait cochés comme priorités, Ensisheim et Wittenheim, ils n'arrivent pas en tête : les deux têtes d'affiche sur lesquels ils avaient misé, Christian Zimmermann (avec Valérie Lemoine) à Ensisheim, et Virginie Joron (avec Ludovic Cathala) à Wittenheim, arrivent deuxièmes, avec respectivement 32,72% et 30,39% des voix. Ils sont devancés par le binôme Elmlinger/Kammerer (Union du centre et de la droite) à Ensisheim, et Vallat/Vogt (Divers gauche) à Wittenheim.
Le parti d'extrême-droite se qualifie pour le second tour dans 15 des 40 cantons et sa présence dans la nouvelle assemblée de la CEA est largement compromise.
Les écologistes progressent, même hors des grandes villes
Et ce sont finalement les écologistes qui font une percée remarquée lors de ce scrutin : une seule élue verte faisait partie de l’assemblée départementale désignée en 2015 (Marie-Dominique Dreyssé, élue à Strasbourg), ils sont cette fois présents au second tour dans 16 cantons. Dans le Bas-Rhin, leurs candidats sont qualifiés dans les six strasbourgeois, ainsi qu'à Schiltigheim, Illkirch-Graffenstaden, Lingolsheim, Molsheim et Obernai ; dans le Haut-Rhin, à Colmar 1, Mulhouse 1 et 3, Guebwiller et Sainte-Marie-aux-Mines.
Les Verts s'appuient sur leurs bastions, et mènent la course à Schiltigheim, grâce au duo de novices Aras/Steffanus, et dans la moitié des cantons de Strasbourg. Mais le vert gagne aussi du terrain hors des grandes villes, pour mailler tout doucement le territoire, grâce à ces quelques communes de taille plus modeste, en secteur rural.
Au total, la gauche alsacienne, dans la diversité de ses alliances, participera à la moitié du second tour.
La majorité présidentielle en retrait
La majorité présidentielle peine, elle, à exister dans ces élections départementales : ils étaient six candidats étiquetés LREM à se présenter. Lara Million, associée à Mulhouse 3 avec le divers droite Jean-Luc Schildknecht, le duo Peirotes/Zeggiato à Strasbourg 1 et le sortant Nicolas Matt (avec Anne Reymann, du mouvement Agir) à Strasbourg 5, se sont qualifiés pour le second tour.
A Mulhouse 2, Bruno Fuchs, du Modem, membre de la majorité présidentielle, et Fatima Jenn (divers centre), arrivent en tête avec 23,26%, devant les candidats du RN Pauvert/Ritz. A Sélestat, le collaborateur de Bruno Le Maire, Charles Sitzenstuhl, associé à Catherine Greigert (LR), sont également en tête, avec 34,09% des voix, devant Braun/Digel, 19,92%.
A noter enfin que les autonomistes d'Unser Land n'ont pas davantage profité de l'attachement des Alsaciens à leur région pour mobiliser leurs électeurs surde leur programme largement tourné autour de la sortie de la CEA du Grand-Est : ils ne se qualifient pour le second tour que dans un seul canton, celui de Saint-Louis, où le binôme Huber-Braun/Zoellé est largement devancé par Schmidiger/Zeller (LR), qui a rassemblé 43,58% des suffrages.
Puisqu'aucun binôme n'a pu se qualifier dès le premier tour, faute de mobiliser suffisament d'électeurs inscrits, et qu'aucun des tickets arrivés en 3e et 4e position ne se sont qualifiés, pour la même raison, les électeurs auront donc à se déterminer sur des duels dans les 40 cantons de la collectivité européenne d'Alsace dimanche 27 juin.