Le raccordement ferroviaire de l'EuroAiport estimé à plus de 400 millions d'euros

Début août 2023, les travaux du projet de raccordement ferroviaire de l'aéroport de Bâle-Mulhouse ont été estimés à 417 millions d'euros. Alors qu'associations et élus locaux s'opposent toujours au projet, ce dernier devait être au cœur d'un débat public ce samedi 19 août avant d'être annulé.

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D'abord évaluée à 250, puis 336 millions d'euros, la construction du raccordement ferroviaire de l'EuroAirport, situé sur la commune de Saint-Louis (Haut-Rhin), a une nouvelle fois été revue à la hausse en août 2023. La facture s'élèverait désormais à 417 millions d'euros après l'explosion du coût des matières premières.

Le projet, vieux de plusieurs décennies, doit permettre aux voyageurs et aux salariés de l'EuroAirport de rejoindre le site en train, lui qui n'est accessible que par la route. Pour cela, la voie de chemin de fer actuelle serait déviée sur six kilomètres. La nouvelle ligne ferroviaire (NLF) permettrait de relier l'aéroport depuis Bâle en dix minutes et depuis Mulhouse en douze minutes. Une gare verrait aussi le jour à proximité du terminal.

En mars 2022, ce projet a été reconnu d'utilité publique par la préfecture du Haut-Rhin. Depuis, les études en prévisions des travaux s'enchaînent et les élus locaux et associations maintiennent leurs positions. "Le raccordement s'inscrit dans la baisse du trafic automobile de la ville de Bâle, ce qui est une bonne chose. Sauf que si on regarde de plus près, il va inciter les gens à plus prendre l'avion. On ne peut pas donner notre aval à ce projet", commente Stefan Suter, de l'association écologique Climat 3 Frontières, qui soutient le projet d'un RER trinational autour de Bâle.

Pour les associations, le projet ne va pas dans le sens des priorités

Stefan Suter en est convaincu : investir autant d'argent dans une ligne de chemin de fer de six kilomètres "n'a pas de sens". Un avis largement partagé par Bruno Wollenschneider, président de l'Adra, l'association de défense des riverains de l'aéroport de Bâle-Mulhouse. "Ici, les gens ont d'autres besoins que de prendre l'avion. Je pense aux lignes ferroviaires du quotidien dont l'état devient catastrophique. Je trouve ça absurde d'investir dans cette liaison."

SNCF Réseau, qui gère le projet, avance qu'un tiers des personnes qui se rendent aujourd'hui à l'aéroport en voiture se reporteront sur le train. "Je n'y crois pas du tout, commente Bruno Wollenschneider. Ce sera vraiment à la marge. Mais surtout, j'aimerais que le ministère des Transports prenne ses responsabilités et ambitionne une baisse du trafic aérien."

On prône tout simplement l'abandon du projet.

Loïc Minery

Vice-président (EELV) de M2A

"On perd de l'énergie, du temps et de l'argent dans des études, résume Loïc Minery, vice-président de Mulhouse Alsace Agglomération (M2A), cofinanceur des études. Nous, on prône tout simplement l'abandon du projet." En 2022, l'ADRA et Alsace Nature avaient déposé un recours contre la déclaration d'utilité publique du projet mais n'ont pas obtenu gain de cause.

"Cette ligne de chemin de fer relève de l'utopie et de la gabegie d'argent public, qu'il soit français, suisse ou allemand. De toute façon, avec l'inflation, on navigue à vue", s'agace Patrick Striby, conseiller communautaire de Saint-Louis Agglomération, qui ne veut pas participer financièrement au projet.

Thibaud Philipps, vice-président de la région Grand Est en charge des transports, reste confiant. "Avec l'inflation qui est partout, on s'attendait à voir le coût augmenter. L'inverse nous aurait surpris. Malgré tout, on est toujours aligné sur l'envie de voir ce projet se concrétiser. Il s'inscrit dans un système de réseau ferroviaire qui est intéressant."

Le vice-président de la Région s'inquiète cependant de la complexité d'un tel projet. "Après cette réévaluation, il faut que les Suisses, les Allemands et l'Union européenne nous assurent qu'ils veuillent continuer. Nous n'avons toujours pas de certitude quant à la participation de l'UE. On peut espérer une participation à hauteur de 30%, mais sur ce genre de projets, nous en avons plutôt eu 15 ou 20."

Rallonger la ligne de tramway comme alternative

Du côté des "anti" raccordement ferroviaire, dont le prix reviendrait à 70 millions d'euros par kilomètre de chemin de fer, on propose une autre solution. "Si on veut utiliser de l'argent public plus intelligemment, on pourrait simplement rallonger la ligne 3 du tramway de Bâle qui termine à la gare de Saint-Louis jusqu'à l'aéroport", avance Patrick Striby. Un projet que valide Bruno Wollenschneider et Loïc Minery.

Cette ligne de tramway pourrait desservir la future zone d'activités du Technoport à cheval entre les communes de Saint-Louis et de Hésingue, située justement entre la gare de Saint-Louis et l'EuroAiport (voire carte ci-dessus). "On pourrait même envisager deux arrêts dans cette grande zone de 80 hectares qui est pour l'instant une friche", propose Jean Rapp, directeur de la stratégie et de la prospective à Saint-Louis Agglomération. "Ça pourrait attirer des potentiels investisseurs", ajoute Patrick Striby.

Dans tous les cas, le projet de raccordement ferroviaire ne devrait pas voir le jour avant une décennie. Si la mise en service de la nouvelle liaison ferroviaire avait d'abord été annoncée pour 2030, certains élus tablent désormais sur 2034 voire 2035.

Ce samedi 19 août à Bâle devait être organisé un débat public autour, entre autres, de ce sujet. Il a finalement été annulé à la dernière minutes. Ses organisateurs dénoncent "un bâillonnement" des experts.

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