Suite à l'information judiciaire ouverte mi-septembre par le parquet de Mulhouse pour "non-assistance à personne en danger" après le décès d'une sexagénaire mi-juin, la direction de l'hôpital confirme ce lundi 30 septembre que "le processus de régulation a fonctionné comme il (le) devait".
Les urgences de l'hôpital de Mulhouse font beaucoup parler d'elles en ce moment, en raison d'une grève qui dure depuis des mois comme ailleurs en France. De nombreux médecins, épuisés et lassés par les conditions de travail, ont démissionné.
Elles font désormais aussi la une de l'actualité depuis qu'une information judiciaire a été ouverte le 20 septembre par le parquet de Mulhouse pour "non-assistance à personne en danger par personne morale", contre le groupement hospitalier régional Mulhouse-Sud-Alsace, et pour "non-assistance à personne en danger contre X", en l'occurrence le médecin régulateur du 15 qui avait pris en charge l'appel, a révélé l'AFP ce dimanche 29 septembre.
Appel au Samu pour douleurs à la poitrine
Le 3 juin 2019, une femme de 60 ans, qui venait d'être appelée par une agence d'intérim mulhousienne pour se voir confier une mission, avait ressenti des douleurs à la poitrine. La directrice aurait alors contacté le 15 et serait restée en contact téléphonique avec la sexagénaire jusqu'à ce qu'elle reçoive l'appel du Samu."Elle se plaignait de douleurs à la cage thoracique, de douleurs intercostales, au cœur et au bras gauche. Elle disait ne pas réussir à respirer correctement", a raconté à l'AFP la responsable de l'agence qui souhaite rester anonyme.
La direction de l'hôpital soutient ses équipes
Problème, aucun véhicule sanitaire n'aurait été envoyé pour lui porter assistance et dix jours plus tard, à la mi-juin, la femme a été retrouvée morte dans son lit par un voisin. L'autopsie pratiquée sur le corps a confirmé que la victime était décédée des suites d'un arrêt cardiaque.Ce lundi matin 30 septembre, lors d'une conférence de presse, la direction du Groupement hospitalier de la région de Mulhouse Sud-Alsace a confirmé avoir été entendue par la justice, et redonné sa version des faits, déjà transmise par un communiqué ce dimanche 29 septembre. Contactée par l'employeur de la victime, "une assistante de régulation médicale a ensuite rappelé la dame à son domicile, a expliqué Corinne Krencker, directrice du groupement hospitalier. (Elle) lui a posé un certain nombre de questions, et immédiatement transmis l'appel au médecin régulateur qui a été en contact assez longtemps avec la patiente."
Selon Corinne Krencker, "on n'est pas dans un sujet où il n'y aurait eu ni de régulation, ni d'ARM (analyse du risque médical) ni de médecin régulateur." Et la directrice du groupement hospitalier d'ajouter : "Je tiens à le préciser, c'est important, le processus de la régulation médicale a fonctionné comme il devait fonctionner."
Dans le communiqué envoyé dimanche 29 septembre, la direction s'était dit "attristée par le décès de la personne dont il est fait état dans les articles de presse." Elle y avait relaté les faits dans des termes sensiblement équivalents, en expliquant que "le 3 juin dernier, le SAMU 68 a été contacté par l’employeur de cette personne. L’agent de régulation médicale qui a réceptionné cet appel a immédiatement recontacté la patiente puis l’a mise en relation avec le médecin régulateur. Ce dernier a ensuite pris une décision médicale au regard des éléments échangés au cours de l’entretien avec la patiente."
Mais pour Christophe Prudhomme, le porte-parole de l'association des médecins urgentistes de France, les conditions de travail sont en causes : "Quand on est en permanence en train de courir, qu'on s'occupe d'autre chose que d'interroger les patients et de les accueillir, quand on est au téléphone au SAMU et qu'on a des appels en permanence, qu'on passe notre temps au téléphone à négocier une place, à transférer un patient parce qu'on a fermé l'hôpital de proximité et qu'il faut le transférer à 50 kilomètres, vous comprenez bien que cette tension augmente les risques d'erreur".
Le Samu de Mulhouse déjà visé par deux plaintes
Cette affaire rappelle celle de Naomi Musenga, une jeune Strasbourgeoise de 22 ans décédée le 29 décembre 2017. La victime avait été raillée au téléphone par une opératrice du Samu puis était décédée quelques heures plus tard au Nouvel hôpital civil (NHC) de Strasbourg. L'enregistrement de l'appel d'urgence laissait entendre que l'urgentiste n'a pas pris la mère de famille au sérieux.Mais pour le président de Samu-Urgences de France François Braun, qui s'est exprimé sur RTL, il n'y a "aucune comparaison possible avec l’affaire de Strasbourg". Il explique que "l'appel a été pris en compte et a duré de longues minutes". A la fin de la communication, "la femme de 60 ans a accepté la proposition du régulateur" de ne pas envoyer le Smur. Il considère que "les procédures de régulation médicales ont été respectées" et que l'enquête en cours est "normale" compte tenu de la situation.
A Mulhouse, le Samu a été récemment visé par deux autres plaintes pour non-assistance à personne en danger : la première a été déposée par la famille d'un homme décédé en 2017 après un mauvais diagnostic, la deuxième par un autre homme, insuffisamment pris en charge en 2016 et souffrant de séquelles.