Le syndicat étudiant de la CSTE a installé des tentes vides sur le campus Illberg à Mulhouse en signe de protestation contre la hausse des prix du parc immobilier. Ils rejoignent ainsi un mouvement d'envergure nationale visant à dénoncer le mal-logement chez les étudiants.
Des rangées de tentes Quechua de toutes les couleurs émaillent depuis ce mardi le gazon du campus Illberg, à Mulhouse. Elles ne sont pas forcément occupées puisqu'il s'agit d'une opération de sensibilisation organisée par un syndicat étudiant local, la CSTE (Communauté solidaire des Terres de l'Est). "C'est une action symbolique pour rendre visible cette réalité : aujourd'hui il y a des étudiants qui sont à la rue car il n'y a pas de logements pour leurs moyens, explique Manon Denizot, présidente de la CSTE. On a reçu une vingtaine de mails de personnes complètement paniquées."
La situation à Mulhouse, comme dans beaucoup de villes étudiantes en France, s'est aggravée au cours des derniers mois en raison de l'inflation. "On a compté qu'il y avait un logement Crous pour 34 étudiants, ce qui n'est pas assez du tout car les résidences privées sont de plus en plus chères".
Contactée, la directrice générale du Crous de Strasbourg, qui comprend aussi le Crous de Mulhouse, a confirmé que la situation était particulièrement tendue. "Jusqu'ici on considérait que le parc à Mulhouse était correctement dimensionné : nous avons à peu près 600 logements, et comme il y a une part importante d'étudiants qui logent chez leurs parents et que le coût de l'immobilier dans le privé était moins élevé qu'à Strasbourg, cela suffisait, explique-t-elle. Mais cette année, nos équipes sur le terrain nous remontent une forte pression également."
Une situation encore plus préoccupante à Strasbourg
La mobilisation atypique du CSTE fait écho au mode d'action d'autres organisations étudiantes à travers la France. Certains d'entre eux ont même choisi de le faire devant l'Assemblée nationale, comme l'Union étudiante ce mardi 26 septembre.
A Bordeaux ou à Rennes, les tentes reviennent systématiquement devant l'Université ou sur les lieux de pouvoir. L'objectif, là encore, est de frapper les esprits en jouant la viralité sur les réseaux sociaux. "Les tentes vont rester là toute la journée et éventuellement plus longtemps, indique Manon Denizot. Nous serons plusieurs à circuler autour, à brandir des pancartes ou à expliquer aux gens pourquoi on fait ça. On est en train de préparer une vidéo qu'on publiera sur nos réseaux dans la semaine pour expliquer tout ça et donner des chiffres précis."
À Strasbourg, l'Alternative étudiante Strasbourg (AES) prévoit également de se mobiliser dans cette perspective. "Nous saluons l'action des camarades des autres villes, et nous avons prévu de nous réunir ce soir pour se mettre d'accord sur notre mode d'action", précise Rayyan Slimani, porte-parole du syndicat. Qu'il s'agisse de tentes à planter devant l'Université ou d'une manifestation plus classique, la situation du logement étudiant appelle à la mobilisation selon lui. "Au-delà du mal-logement, qui est réel, il y a un problème de places disponibles à Strasbourg, la ville est réputée pour ça. Les prix sont très élevés dans le privé et il n'y a pas assez de logements Crous par rapport au nombre d'étudiants. On en voit de plus en plus qui se retrouvent SDF, encore plus que les autres années."
Des projets de nouveaux logements...à horizon 2027 ou 2030
Selon le Crous, il y a environ 4 900 logements universitaires à Strasbourg, pour environ 80 000 étudiants, dont 22 000 boursiers. "On se situe vers les 7 ou 8%, alors que l'objectif national est d'arriver aux 10% de logements universitaires proposés par rapport au nombre d'étudiants total d'une ville. Il nous reste encore du travail", concède Sophie Roussel, directrice générale.
Pour faire progresser ce taux, le Crous mise sur deux grands chantiers : une résidence située place d'Islande dotée de 500 nouveaux logements, une autre au niveau de l'Hôpital civil avec une centaine d'appartements supplémentaires. Mais les deux sites n'ouvriront au plus tôt qu'en 2027 et 2030. "Il y a quelques rénovations qui vont amener 8 ou 10 logements en plus ici ou là d'ici 2027, mais ça ne changera pas vraiment la donne", reconnaît Sophie Roussel.
Et même avec ces quelque 700 logements supplémentaires, la ville de Strasbourg ne sera pas sortie d'affaire au vu de l'explosion de la population étudiante constatée ces dernières années. "Cela ne suffira pas, il faudrait un véritable investissement de la part du gouvernement dans le Crous ainsi que dans la gestion du parc privé, car il y a des dérives chez les propriétaires privés avec de plus en plus de logements loués en Airbnb...", estime Rayyan Slimani.
Selon l'Agence d'urbanisme de Strasbourg Rhin supérieur (Adeus), le nombre d'étudiants est passé de 60 000 à 70 000 dans le Bas-Rhin entre 2011 et 2021.