Forêts : un groupement de citoyens copropriétaires pour la gestion durable d'un massif en Haute-Marne

Véritable démarche citoyenne, la création d’un groupement forestier dans le sud-ouest de la Haute-Marne participe à la protection de l’environnement, au cœur du Parc national de forêts. Un investissement responsable en faveur de la biodiversité.

De simples citoyens sont-ils prêts à investir dans un groupement forestier pour aider à une gestion durable d’un massif ? Une sorte de financement participatif pour acheter des parcelles menacées d’être coupées et/ou replantées ailleurs. 

Propriétaire de 136 hectares de forêt entre Aubepierre-sur-Aube et Rouvres-sur-Aube. Au cœur du Parc national de forêts, Jean-Baptiste Ingold veut croire à ce concept.

Il parie sur cette démarche pour sauvegarder le site, un espace naturel non planté qui s’est renouvelé naturellement depuis des siècles. 

Particulièrement sensible aux questions écologiques, notamment avec un travail autour de la végétalisation des espaces urbains, Jean-Baptiste Ingold adhère à la démarche du Parc national de forêts.

Dans la famille depuis la Révolution

"Pour moi, au-delà des 3 500 hectares en libre évolution, il s’agit de préserver toute une biodiversité, de lui permettre de se répandre, tout en tenant compte des changements climatiques et de leurs incidences. C’est une action qui doit se poursuivre sur trois générations d’arbres. C’est-à-dire près de 1 500 ans."

Aujourd’hui, la famille de Jean-Baptiste Ingold dénombre un seul héritier pour cette grande étendue boisée que l'on appelle le massif des Bois Impériaux. Un héritage dans sa famille depuis 200 ans, transmis par le conseiller d’Etat Nicolas Frochot. Député du Tiers Etat en 1789, puis de la Côte d’or, cet aïeul acquiert ces terres durant l’ère napoléonienne.

Le plus gros groupement forestier de France

Avec ce projet de groupement forestier citoyen, Jean-Baptiste Ingold veut assurer l’avenir du massif. Si des coupes resteront possibles, elles devront être justifiées d'un point de vue environnemental.

C’est une action qui doit se poursuivre sur trois générations d’arbres. C’est-à-dire près de 1500 ans 

Jean-Baptiste Ingold, propriétaire du massif des Bois Impériaux

"Rien n'est vraiment imposé aux propriétaires de forêt aujourd'hui. Au départ, je pensais me greffer à un autre groupement forestier, comme celui de Cerf Vert. Mais ma forêt est trop importante. Il faut donc créer un mouvement local. Il s’agira alors du plus grand gros groupement forestier citoyen de France, avec un massif d’un seul tenant."

Un projet soutenu par l’association Nature Haute-Marne. "Pour nous, il s’agit de sauver des forêts pour éviter qu’elles soient converties en plantations de Douglas, comme dans le Morvan", indique Jean-Marie Rollet, co-président de Nature Haute-Marne.

Une action à long terme pour contrer les dérives. "Même si globalement en Haute-Marne, nous n’avons plus de forêt menacée par de grands défrichements, comme avant, pour faire la culture, le danger vient de la gestion par l'Etat avec une accélération des rotations forestières. C’est-à-dire que l’on coupe les arbres de plus en plus jeunes."

Plusieurs réunions d’information ont déjà eu lieu pour séduire de futurs associés et philanthropes des bois impériaux. Une structure juridique est en cours de création. D’ici peu, il sera possible pour chaque Haut-Marnais de souscrire au capital, en acquérant une ou des parts sociales, sous forme de sommes d’argent ou d’un apport en nature (ex : une parcelle de forêt).

Pour nous, il s’agit de sauver des forêts pour éviter qu’elles soient converties en plantations de Douglas, comme dans le Morvan.

Jean-Marie Rollet, co-président de Nature Haute-Marne

L’objectif est de parvenir à une gestion respectueuse du massif des Bois Impériaux, accompagnée par le Parc et La futaie irrégulière école implantée à Auberive qui initie les propriétaires de forêts à une sylviculture durable. "D’ici 10 à 15 ans, je veux passer la main à un groupe de personnes qui reprendrait la propriété et la gestion du massif Bois Impériaux. Une gestion durable et raisonnée par des personnes investies ou compétentes en matière de biodiversité afin d’accompagner au plus juste ce qui va se faire autour du Parc."

Pour faire face aux enjeux liés au changement climatique et à la préservation des espèces.

Un investissement pour l'avenir

À terme, près d'une centaine d'arbres des Bois Impériaux seront désignés comme habitats remarquables de la biodiversité. Ils seront sortis de l’exploitation et donc jamais coupés.

"L’ONF a déjà commencé le recensement des arbres, ainsi que l’expert forestier dijonnais Jean-Baptiste Susse. Il y a beaucoup de hêtres, de chênes, précise Jean-Baptiste Ingold. Le but est d’avoir un inventaire précis des espèces, de la faune et de la flore du massif. De faire un suivi sur plusieurs dizaines d'années pour mieux comprendre l'impact des changements climatiques sur le milieu."

Ce nouveau groupement forestier citoyen s’accompagnera aussi de la création d’une association dédiée à la préservation de la biodiversité. "Chacun, coassocié ou non, pourra parrainer un ou plusieurs de vieux arbres des Bois Impériaux et ainsi participer à leur sauvegarde. Un héritage à transmettre aux générations futures", conclue Jean-Baptiste Ingold.