Après la mort d'un cycliste à Paris, des rassemblements ont eu lieu dans de nombreuses villes, dont Reims, pour appeler à des infrastructures plus sécurisées. Sur le territoire du Grand Reims, les près de 350 kilomètres d'aménagements annoncés en 2022 mettent du temps à se concrétiser. "C'est un énorme chantier", souligne la collectivité.
Le 19 octobre dernier, des rassemblements ont eu lieu dans de nombreuses villes françaises, après la mort d'un cycliste, percuté par le conducteur d'un SUV à Paris. L'homme a été mis en examen pour meurtre et placé en détention provisoire. La victime, Paul Varry, 27 ans, était engagé de longue date pour la promotion du vélo et des mobilités douces.
À Reims, autour de 150 personnes ont répondu à l'appel lancé par l'association Vél'Oxygène. "Oui, les cyclistes sont mis en danger par les automobilistes. Oui, des cyclistes ont peur sur la route. Il faut que ça change", avait alors indiqué Damien Malezet, l'un des membres du conseil d'administration de l'association.
Le ministère des Transports a annoncé lundi 21 octobre le lancement d'une mission contre la violence sur les routes. Elle devra notamment formuler des propositions au sujet de l'éducation routière, de l'amélioration continue des aménagements, et de la détection, de la constatation et de la réponse judiciaire aux comportements violents sur la route.
Des aménagements "au cas par cas"
Au sein du Grand Reims, on assure avoir en tête depuis longtemps la sécurité de tous les usagers de la route. Pour ce qui concerne les vélos, les aménagements se font "au cas par cas", nous explique-t-on. Pas de schéma type qui privilégie à tout prix la piste cyclable physiquement séparée du reste de la circulation, par rapport à une bande cyclable qui matérialise l'espace réservé simplement avec de la peinture.
"On s'adapte en fonction de l'environnement urbain, des autres usages qu'il faut aussi prendre en compte", détaille Carine Alavant, directrice adjointe à la direction des mobilités et des transports du Grand Reims. "On essaye le plus possible de répondre aux prescriptions de l'institution qui s'appelle le Cerema.". Cet organisme public publie des recommandations sur la meilleure manière de réaliser les aménagements.
"On est plutôt dans l'apaisement et le partage. C'est vraiment le différentiel de vitesse et de poids qui est souvent le plus dangereux", ajoute notre interlocutrice. "Là où on a des gros différentiels de vitesse ou beaucoup de flux de véhicules, effectivement la séparation s'impose." C'est par exemple le choix qui a été fait en bordure de l'avenue de Champagne, où les véhicules filent à 70 kilomètres par heure. Des séparateurs en béton ont donc été fixés au sol.
Ailleurs, c'est le manque d'espace disponible face aux nombreux usages à concilier qui dicte souvent les choix. Le réaménagement de la voie des sacres, actuellement en pleins travaux, va par exemple se concrétiser par un espace partagé entre les cycles et les bus sur l'essentiel du tracé.
345 kilomètres prévus, mais il faudra être patient
En 2021, la municipalité avait dévoilé un projet de réseau cyclable de 50 kilomètres, avec un investissement annoncé d'un million d'euros chaque année. L'année suivante, les élus du Grand Reims avaient voté en faveur de la création de 345 kilomètres d'itinéraires sur le territoire de la communauté urbaine. Un réseau qui met du temps à sortir de terre, et dont la réalisation est critiquée par certains.
"On se donne des objectifs de dix à quinze ans, mais on sait que ce sera long. C'est un énorme chantier, avec 45 millions d'euros de budget", explique Carine Alavant, à propos du réseau du Grand Reims. Seuls quelques tronçons ont été déjà réalisés. Ailleurs, des études sont en cours. C'est le cas par exemple pour le secteur du Creps à Bezannes, la liaison entre Thillois et Gueux, le long du canal à Courcy.
Des projets que certains jugent sûrement trop longs à sortir de terre. Quand d'autres pointent des infrastructures incomplètes. Par exemple, entre Reims et Witry, la piste cyclable flambant neuve s'achève brutalement par des blocs de pierre. "Cela peut paraître complètement déconnecté, mais puisqu'il y avait des travaux programmés [avec la création du rond-point du Linguet], on a préféré intégrer tout de suite l'aménagement", justifie Carine Alavant, du Grand Reims. Sans cette anticipation, le secteur aurait pu être bien plus difficile à aménager ultérieurement, nous explique-t-on.
Pour le réseau urbain, les projets avancent aussi au rythme des autres travaux d'aménagements, comme le chantier de la voie des sacres,ou celui de la transformation des berges après la démolition du pont de Gaulle. "Notre calendrier de réalisation dépend finalement du calendrier de réalisation des travaux de voirie." Toutes les lignes Reims à vélo pourraient être achevées à horizon 2030.
La collectivité échange régulièrement avec l'association Vél'Oxygène, qui porte la voix des cyclistes. "Ça permet d'acculturer les uns et les autres sur les attentes et les contraintes. Ça permet aussi de trouver ensemble aussi des compromis", assure la directrice adjointe à la direction des mobilités et des transports. Des échanges réguliers ont aussi lieu avec d'autres collectivités pour s'inspirer des bonnes idées. "On s'est par exemple inspiré de Grenoble et Lyon pour le réseau armature."
En 2021, selon l'enquête mobilité réalisée par le Grand Reims, 3 % des déplacements se faisaient à vélo dans l'agglomération. L'objectif affiché est d'atteindre les 7 % en 2030. À titre de comparaison, la part modale du vélo dans les déplacements était déjà de 11 % au sein de l'Eurométropole de Strasbourg en 2019.