Infirmière tuée au CHU de Reims : l'irresponsabilité pénale du suspect, avancée par une expertise, inquiète la famille de Carène Mezino

Carène Mezino est morte après avoir été poignardée en mai 2023 au CHU de Reims (Marne). La famille de l'infirmière vient de prendre connaissance d'une expertise psychiatrique qui considère comme irresponsable pénalement l'homme mis en examen. Ce qui signifierait l'absence de procès. Une contre-expertise doit avoir lieu.

"Allez expliquer à des enfants de huit et onze ans que quelqu'un a tué leur maman et que finalement, il va se retrouver dans la rue, c'est difficile à entendre." Adrien Mezino est abattu alors qu'il évoque à notre micro, ce 20 octobre 2023, les résultats de deux expertises psychiatriques qui considèrent Franck Freyburger, l'homme mis en examen pour l'assassinat de sa femme, irresponsable pénalement.

Carène Mezino est morte après avoir été attaquée au couteau en mai 2023 au CHU de Reims, où elle exerçait le métier d'infirmière. Une collègue secrétaire avait également été blessée.

"C'est une violence dont vous n'avez même pas idée. C'est le monde qui s'abat sur notre tête."

Luc Thibaut, frère de Carène Mezino

à France 3 Champagne-Ardenne

"Aujourd'hui, on a l'impression que toute cette instruction et le dossier ne sont pas pris en compte du tout", confie le frère de la victime, Luc Thibaut, qui a lui aussi accepté de répondre aux questions de notre journaliste Charlotte Morand.

"Il faut absolument qu'il y ait un jugement"

Le tueur présumé avait martelé sa haine des blouses blanches. Il avait acheté son couteau deux semaines avant l'attaque, montrant une certaine préméditation. Mais le résultat de cette double expertise fait craindre à la famille de Carène Mezino que le suspect ne soit pas jugé.

"Il faut absolument qu'il y ait un jugement et un jugement impartial", insiste Luc Thibaut. "On demande qu'il soit jugé à la hauteur des actes qu'il a commis. Ça permettra aussi à notre famille de pouvoir faire son deuil dans des conditions dignes."

L'homme de 59 ans, atteint de troubles psychiatriques, était sous traitement médical qu'il aurait décidé d'arrêter avant l'attaque. Il était déjà connu pour des faits de violences aggravées. En juin 2017, il avait agressé au couteau quatre personnes au sein de l'établissement d'aide par le travail (Esat) où il travaillait au Meix-Tiercelin, dans la Marne.

Cette affaire est toujours entre les mains de la justice : dans quelques jours, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims doit d'ailleurs se prononcer sur sa responsabilité pénale pour cette précédente agression. Lors d'une audience en septembre dernier, le parquet avait requis dans ce dossier l'abolition de son discernement. L'avocate du suspect, Maître Chantal Focachon, avait elle aussi plaidé l'abolition. La décision sera connue le 26 octobre.

Pourquoi était-il libre en mai 2023 lorsqu'il a pénétré dans le vestiaire de l'hôpital avec une lame de vingt centimètres ? "Visiblement, le contrôle à la fois de la justice et des services de psychiatrie qui le suivaient n'a pas été celui qu'on aurait pu attendre d'un homme qui avait agressé des personnes", affirme Didier Seban, l'avocat de la famille, joint par notre rédaction ce 20 octobre.

Une contre-expertise attendue

"Pour mes clients, il y a un sentiment de double peine. La psychiatrie a jugé un jour qu'il était apte à reprendre une vie normale sous réserve d'un traitement. On n'a pas vérifié qu'il prenait ce traitement et il a frappé à nouveau et cette fois mortellement", ajoute l'avocat. Il s'étonne des conclusions des experts, arguant que Franck Freyburger "a pu répondre aux questions des magistrats et des enquêteurs" juste après les faits et "n'a pas paru complètement délirant".

Maître Seban précise que les expertises menées dans la première affaire ne sont pas jointes au dossier sur l'assassinat de la mère de famille de 37 ans. "On se demande sur la base de quoi ces nouveaux experts - qui n'ont pas eu connaissance de l'analyse de leurs prédécesseurs - peuvent conclure aussi fermement à cela. J'ai l'impression que la justice saucissonne, qu'elle ne met pas en parallèle les deux affaires, qu'elle ne rassemble pas les éléments médicaux."

Une contre-expertise a été demandée. La question de la responsabilité pénale du suspect n'est donc pas encore tranchée. Didier Seban indique d'ailleurs : "Il appartient au juge d'analyser les rapports d'expertise. Ce sont pas les experts qui décident, ce sont les magistrats."

Diagnostiqué schizophrène paranoïaque depuis ses vingt ans, le suspect est, depuis l'attaque au CHU de Reims, en détention provisoire dans une unité médico-carcérale de Villejuif (Val-de-Marne).

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