Jeux olympiques de Paris 2024 : fête et champagne, comment le village de Pauline Ferrand-Prévot a vécu la victoire de sa championne médaillée d'or

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Ce dimanche 28 juillet, la cycliste sur VTT Pauline Ferrand-Prévot a remporté l'ultime titre qui manquait à son très riche palmarès : celui de championne olympique. À Pouillon (Marne), son village d'enfance, une centaine de fans particulièrement enthousiastes ont suivi sa performance sur grand écran, et éclaté de joie lorsqu'elle a remporté sa médaille d'or. France 3 Champagne-Ardenne s'y trouvait.

Un cinquième de la population d'une commune a voulu se rassembler dans un parc municipal pour encourager à distance sa championne, la cycliste Pauline Ferrand-Prévot, ce dimanche 28 juillet 2024 : pile au lendemain d'un déluge, et à la veille d'une nouvelle fournaise. Il s'agit de Pouillon (Marne), un village de 500 âmes. 

Alors que pour les Jeux olympiques (JO) de Paris 2024, la VTTiste champardennaise allait s'élancer sur la colline d'Élancourt (Yvelines, la plus haute d'Île-de-France), une centaine de personnes s'est regroupée. Les festivités ont lieu dans le bois du petit cerf, un parc récemment réaménagé et inauguré par la municipalité. Le ciel est bleu, le soleil doré, et les enfants s'égayent sur l'herbe verdoyante.

Lors de ce moment festif, où France 3 Champagne-Ardenne se trouvait, le souvenir de la sportive s'est rappelé via une petite lettre qu'elle avait écrit à la commune. Scotchée sur les tables, elle rappelle y avoir vécu étant enfant, notamment : elle s'y est entraînée au vélo, en parallèle de ses études dans le département... et de sa participation à la fanfare du village, en tant que trompettiste. On en apprend, des choses.

Les soutiens tournent au champagne

Mais bien plus que les écrits, c'est par les personnes présentes dès midi que ce souvenir a été ravivé, s'est transmis. Des souvenirs venant du fond du coeur, même si cela fait près d'une décennie qu'elle a déménagé (ses parents également). André Kaplon, conseiller municipal (et chauffeur d'ambiance), est très fier de la banderole qui orne le fronton de la mairie, tout juste rénovée.

À l'organisation, on retrouve les nombreuses petites mains du conseil municipal pouillonnais, du comité des fêtes du village, et aussi du fanclub de Pauline Ferrand-Prévot. Buvette, tombola, grand écran et sonorisation : rien n'a été oublié. Et les bénéfices seront reversés au comité, au fanclub, et à une association caritative qui reste à déterminer.

A été prévue une bonne centaine de bouteilles de champagne (pas toutes destinées à être bues cet après-midi, bien sûr). Du Charles Heston spécialement étiqueté au profil de la sportive, et dédicacé, s'il vous plaît. Une cuvée spéciale appelée à devenir collector... et on en profite pour rappeler que l'abus d'alcool est dangereux pour la santé.

Entre souvenirs d'école...

Florian Lizeux, le président du comité des fêtes, est visible de loin avec son T-shirt jaune éclatant. Tout sourire, il confie qu'"elle faisait déjà des courses à vélo. Moi, j'étais plutôt football..." 

Il a étudié, comme elle, au collège du Mont d'hor à Saint-Thierry. Et avant ça, à l'école primaire de Hermonville (la commune d'origine d'une rescapée du Titanic et du père français de la science-fiction).

Le jeune homme décrit une fille "gentille et souriante. On n'était pas particulièrement des proches, mais on se retrouvait avec les autres jeunes du village lors de pas mal d'évènements."

Un peu plus proche d'elle, même si depuis, "les liens se sont un peu distendus", on retrouve Anthony Lévêque. Lui aussi est un grand cycliste, même s'il n'est pas allé aussi haut que Pauline Ferrand-Prévot. "On a été dans la même classe du CE1 à la troisième."

Déjà à l'époque, elle avait la gagne.

Anthony Lévêque, ancien camarade de classe et de course à vélo

"Je me souviens que j'allais parfois lui porter ses devoirs, avec ma mère. Je m'entraînais régulièrement avec elle, dans les vignes : déjà à l'époque, elle avait la gagne."

"Quand je la croise en compétition, on voit qu'elle n'a pas du tout oublié d'où elle vient : on se sourit, on parle un petit peu. Même si évidemment, elle est très sollicitée." Son attention aussi est assez sollicitée : il doit veiller à ce que son tout jeune fils, qui gambade ça-et-là, ne prenne pas la poudre d'escampette.

... et souvenirs de club

Près de la table de la tombola, Françoise Gaudelet tient un trésor. La trésorière du Club cycliste Grand Reims (CCGR), l'ancien club de Pauline Ferrand-Prévot, a dans les bras un grand album-photos rempli des clichés de la championne. Il devait lui être offert lorsqu'elle est devenue championne du monde en 2014. L'occasion ne s'est jamais présentée, et depuis, "on le garde précieusement aux archives du club".

"Je l'ai connue vers 6 ou 8 ans. Elle s'entraînait sur le circuit de Courcelles, à Reims. La maman voulait souvent qu'elle fasse un peu plus de tours de piste, mais quand sa fille estimait qu'elle en avait assez, elle descendait de son vélo et s'asseyait au bord de la piste." Faisant montre d'un certain tempérament, pour ne pas dire d'un tempérament certain...

Le CCGR organise chaque année, pour ne citer qu'eux, une compétition de VTT à Hermonville, un cyclo-cross à Tinqueux et au parc de Champagne à Reims, un critérium à Bazancourt... Et la trésorière s'émeut du manque de bénévoles. "On a besoin de beaucoup d'accompagnants lors des courses." Le message est passé. 

Juste à côté, Jean-Marie Gaudelet, président du club (et mari de la trésorière), termine son sandwich avant de se pencher vers nous. C'est là-bas qu'elle a fait ses armes. "Elle se débrouillait très bien à l'époque. Par son attitude et ses compétences, elle a rapidement été sollicitée par les sélections départementales, puis régionales..."

Je me souviens que ses performances égalaient celles de certains garçons en compétition.

Jean-Marie Gaudelet, président du Club cycliste Grand Reims

Et nationales... "Après, elle nous a un peu échappé", s'amuse-t-il. "Déjà à l'époque, elle voulait gagner. Quand elle était en catégorie minimes, qui est mixte, je me souviens que ses performances égalaient celles de certains garçons en compétition." 

La population locale très impliquée

Il y a de plus en plus de monde. Des familles entières sont présentes. Aucun pique-nique n'a été oublié. 

Madame la maire, Ghislaine Leclere, a l'air ravie. "Je suis super contente. On profite de l'occasion : ça se passe chez nous tous les 100 ans, et on a une sportive locale à ces JO. C'est une occasion qui ne se représentera jamais. J'espère qu'elle va nous ramener une médaille d'or..." Et la voilà qui trinque.

De l'autre côté, sur une motte un peu surélevée, Adrien agite avec vigueur et patriotisme son drapeau français. "On est venu supporter Pauline. Il faut un maximum de soutien. On l'a toujours soutenue, encore plus aujourd'hui."

"On l'a connue quand elle était petite, on la voyait sortir de l'école et rouler à vélo dans les rues du village. Être là, c'est important pour nous." Tous ses proches sourient. Ils n'auraient voulu être autre part pour rien au monde.

Tout le monde, et à tout âge, a mis la main à la pâte. C'est le cas de Juliette, âgée de 6 ans, qui tient avec Louise (même âge) son adorable pancarte pour encourager les athlètes de la France.

"Ce sont les futures Pauline", font remarquer les papas respectifs. "Elles iront au même collège qu'elle." Sacré modèle d'inspiration.

Attablée un peu plus loin, une octogénaire est un peu loin de son entrée au collège. " C'est la maman de la présidente des champagnes Charles Heston", nous souffle-t-on. Guillerette, elle a l'air en forme.

"C'est parce qu'elle ne boit que du champagne", s'amuse son voisin d'en face. Tout le monde rit un bon coup. L'ambiance est festive. 

Un message de la sportive

André Kaplan continue à ponctuer les festivités de plusieurs interventions et animations. Notamment une application de maquillage tricolore à qui voulait, et une intense session de clapping (sortes d'applaudissements en l'air de plus en plus rythmés, popularisés par l'Islande lors de l'Euro 2016 de football). Il nous présente aussi un maillot, le gros-lot de la tombola : il a appartenu à la sportive, qui l'a dédicacé. 

Il hèle le public, de plus en plus nombreux à l'approche du début de l'épreuve de VTT cross-country. Et l'incite à se faire entendre. "On veut que Pauline vous entende depuis la butte où elle se trouve." Ce qui représente quand même 190 kilomètres. 

"Elle vous a envoyé un courrier. Mais aussi ce message vidéo..." Ce n'est pas le dessin animé où elle apparaît, mais un selfie vidéo. Il le fait diffuser sur l'écran géant. La cycliste y fait part de ses remerciements, et mentionne ses "souvenirs" et de ses "amis d'enfance" à Pouillon. Qu'elle "espère rendre fière" (écouter ci-dessous). 

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Message vidéo de Pauline Ferrand-Prévot pour la population de Pouillon. ©Pauline Ferrand-Prévot

Mais parfois, le public n'a pas besoin d'être incité. Ça-et-là fusent des "Allez Pauline, allez Pauline, allez", parfois scandés par de jeunes enfants. Une variante remplace parfois le prénom Pauline par le diminutif Paupau. C'est affectif, que voulez-vous. 

Pendant ce temps, les cases de tombola se vendent comme des petits pains. Et bientôt, il n'en restera plus. À la clé, outre le maillot de la cycliste : des sacs de sport, un magnum du fameux champagne cuvée Pauline...

L'un des convives nous aborde. "Vous êtes de la région ? Vous savez, si elle gagne, parole de Champenois, on va bien fêter ça." On le croit sans hésiter.

On s'assemble devant l'écran géant

La performance qui s'annonce promet d'être intense. Et le public ne va pas en rater une miette. Tout le monde rapproche les bancs de l'écran de projection, monté sous une grande tente.

Deux petits malins, Séverine et son conjoint, ont amené leurs chaises dépliantes en toile. "Notre fille a fait partie du même club que Pauline. Donc on voulait la soutenir." Les voilà au plus près du spectacle.

Pendant ce temps, André Kaplan, au micro, livre une anecdote sur... le poids de Pauline Ferrand-Prévot. "Elle faisait 48 kilos ce matin. Et à sa naissance à la clinique des Bleuets de Reims, c'était 3,2 kilos." Quelqu'un dans le public détenait déjà cette information, et semblait très fière.

"Eh bien figurez-vous", reprend le conseiller municipal, "que les infirmiers demandaient ses papiers à la mère de Pauline. Et elle leur a dit : dépêchez-vous, elle est déjà en train de sortir." L'anecdote amuse la galerie.

Et ça commence

L'occasion de rappeler, avec plus d'actualité, que ce sont "les quatrièmes JO de Pauline. Elle est hyper préparée, psychologiquement et physiquement." Son palmarès complet, auquel il ne manque que l'or olympique, met un certain temps à être énoncé, entre ses multiples victoires en championnats du monde, d'Europe, et de France divers et variés.

Après le début suit rapidement... une page de publicité. "C'est l'entracte. Pendant celui-ci, je vous invite à passer à la buvette : il ne reste plus beaucoup de bouteilles de champagne signées par Pauline. Et vu son classement actuel, elles pourraient devenir collector." 

Il est vrai que la cycliste a très rapidement filé comme une flèche, coiffant la concurrence au poteau. Mais va-t-elle pouvoir durer ?

"Si tout le monde gagne", scande André Kaplan, "on fait tous un bisou sur le crâne" du monsieur qui avait sagement pris place dans son fauteuil en toile sans rien demander à personne. Mais il ne semble pas hostile à la proposition, cela dit (vidéo de hola ci-dessous)

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La hola pendant la course de Pauline Ferrand-Prévot. ©Vincent Ballester, France Télévisions

Une hola agite ensuite le public. Et un nouveau slogan qui va essaimer. "Ici, c'est Pouillon : la terre des champions." Non seulement c'est vrai, mais en plus ça rime. Que demander de plus ? 

L'ambiance se maintient

À la trentième minute de la course (qui doit durer 1h30), alors que la cycliste a une bonne minute d'avance sur la concurrence, on assiste à l'arrivée surprise à vélo de... Pauline Ferrand-Prévot.

Ou plutôt de sa probable jumelle, qui ressemble toutefois fortement à André Kaplan avec une perruque d'Elsa dans La Reine des neiges. Elle prend la parole. "Comme j'ai un peu d'avance, je suis passée vous voir... Désolée, j'y retourne déjà, j'ai une médaille d'or à aller chercher. D'ici une heure, je reviens boire le champagne." La foule est hilare. Florian Lizeux, interviewé plus tôt, fait remarquer à sa voisine "qu'on est quand même mieux là que sur le canapé". 

L'ambiance se tend un peu et l'enthousiasme se dissipe un peu à la chute de Loana Lecomte. Jusque-là, elle livrait une très bonne performance en troisième position. On ne la voit pas se relever ensuite, et on finit par apprendre qu'elle ne terminera pas l'épreuve. Tout le monde espère qu'un sort similaire n'attend pas Pauline Ferrand-Prévot au tournant, elle qui a déjà subi plus d'une contrariété lors des olympiades, notamment celles de Rio en 2016. Surtout qu'elle a annoncé arrêter le VTT après ces JO (mais pas le cyclisme sur route).

Voilà qu'à présent, André Kaplan, qui semble prendre la confiance, annonce que la maire va payer une tournée générale de champagne si Pauline l'emporte. L'intéressée ne semble pas au courant sur le moment, mais l'information est confirmée un peu plus tard. "Ghislaine présidente, Ghislaine présidente", scande la foule. Quelqu'un fait remarquer que "les élections à Pouillon sont quand même plus simples que les élections en France". Plus tôt, le conseiller municipal faisait remarquer aux Belges de l'assemblée que "maintenant, pour nous aussi c'est le bordel au gouvernement". Après l'incartade politique, la foule s'agite fréquemment.

La fin approche, les réjouissances aussi

Une heure après le début de l'épreuve, une Marseillaise est timidement entonnée dans un coin par la table d'Adrien, qui agitait plus tôt le drapeau français. Mais elle n'est pas reprise avant quelques minutes : l'animateur doit donner de sa personne, puis lui tend le micro. 

Les minutes s'égrènent. Pauline Ferrand-Prévot a plus que creusé l'écart : elle mène par trois minutes. Sa victoire paraît de plus en plus proche (video ci-dessous).

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Cris de joie à la victoire de Pauline Ferrand-Prévot. ©Vincent Ballester, France Télévisions

Et finalement, tout le monde s'agite et se met à crier. Elle a gagné. Cette médaille d'or lui permet de compléter et finaliser son palmarès déjà impressionnant. Une nouvelle Marseillaise retentit. On rit. On pleure. On s'embrasse. On balance le contenu d'une bouteille de champagne dans le public, et presque sur la caméra d'Astrid Forbos, la journaliste reporter d'images de France 3 Champagne-Ardenne... qui a heureusement de bons réflexes (vidéo ci-dessous).

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Marseillaise de la victoire après la médaille d'or. ©Vincent Ballester, France Télévisions

D'autres bouteilles de champagne suivent (pour être bues cette fois-ci). La mairesse annonce solennellement que "le conseil municipal vous paye un pot pour fêter la médaille d'or".

Le reporter de France 3, Baptiste Mezerette, se voit presque fourrer d'autorité une coupe de champagne dans les mains. Il tente de refuser (voir la liesse dans le reportage vidéo de France 3 Champagne-Ardenne ci-dessous). 

Un monsieur s'approche pour raconter que la cycliste "a toujours été bagarreuse, elle avait un sacré caractère", le désire de vaincre, et rappelle qu'"elle a eu son premier titre dès ses 13 ans". Celle qu'il surnommait Paupauche dans sa tendre enfance demande encore "des nouvelles de mes gamins". L'enfant du pays ne l'a jamais vraiment quitté malgré son déménagement (voir la carte ci-dessous)...

Derrière lui, Anthony Lévêque, qui s'entraînait avec la désormais championne olympique, observe la foule toute à sa joie. "Je n'aurais pas imaginé, quand on était plus jeunes, qu'elle atteindrait ce niveau. Mais cette année, je croyais fort qu'elle aurait sa médaille". On lui laisse le mot de la fin. La fête, elle, ne fait que commencer.

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