La chanteuse Stone dénonce "des méthodes cruelles pour réguler les pigeons" à Reims, quelles sont les alternatives ?

La chanteuse Stone a pris une position engagée le mercredi 07 février. Au nom de l'association Stéphane Lamart pour la défense des droits des animaux, elle a écrit au maire de Reims (Marne). Elle souhaite obtenir l'arrêt de "méthodes barbares et inhumaines" pour réguler la population de pigeons en ville.

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Ce n'est pas parce qu'il y a beaucoup de pigeons qu'il faut les faire souffrir. C'est, en substance, le message qu'a voulu faire passer la chanteuse Annie Gautrat, plus connue sous le pseudonyme Stone après son duo musical avec Éric Charden.

Le mercredi 07 février 2024, elle a pris sa plus belle plume pour écrire à Arnaud Robinet, le maire (Horizons) de Reims (Marne). Elle l'accuse, au nom de l'association Stéphane Lamart pour la défense des droits des animaux, d'"employer de cruelles méthodes pour réguler la population de pigeons", selon un document transmis aux rédactions. 

Ce n'est évidemment pas Arnaud Robinet lui-même qui sort dans les rues pour piéger des pigeons et les gazer au dioxyde de carbone (CO2), mais l'un des agents affectés aux services techniques municipaux. Mais il est jugé responsable de ces "méthodes barbares et inhumaines", et pourrait y mettre un terme.  

France 3 Champagne-Ardenne a joint la Ligue de protection des oiseaux (LPO) régionale pour s'enquérir de méthodes alternatives à ce "gazage". Les amis champardennais des volatiles renvoient à l'association Paris Animaux Zoopolis (Paz), qui prône la cohabitation pacifique avec les animaux dits liminaires tels que les pigeons. 

Jadis héros de la guerre, les pigeons sont depuis associés à la bêtise, à la saleté, et à la gloutonnerie. Une image qu'ils ne méritent pas, quand on s'attarde un instant sur leur histoire millénaire. L'association Paz avait déjà volé à leur secours au mois de janvier 2023, dénonçant déjà les méthodes de la municipalité (relayées par France 3). Un an plus tard, un article de L'Union montrant que c'est toujours le cas, a entraîné la réaction de l'association Stéphane Lamart.  

Réduire les pigeons... en les nourrissant

Contactée, la co-fondatrice de l'association Paz, Amandine Sanvisens, explique que la situation à Reims est vue comme "prioritaire parce que c'est une grande ville". Hélas pour elle, on ne lui a jamais répondu. Une nouvelle lettre a été envoyée à l'ensemble du conseil municipal par la Paz durant le mois de décembre pour vanter des méthodes alternatives au gazage, réputées plus douces et non létales. Sans réponse non plus selon cette dernière, mais la conseillère municipale (EELV) Véronique Ritaly compte faire remonter la question aux autorités compétentes d'ici à la mi-février.

"On a du maïs contraceptif pour réduire les naissances de pigeons sans souffrance animale", énonce Amandine Sanvisens. Les œufs ainsi pondus ne sont pas viables et n'éclosent pas, et il semblerait qu'il n'y ait pas d'impact sur les autres espèces aviaires. Les petits oiseaux sont trop petits pour les consommer, et les gros n'en ont pas le temps, car tout est englouti par les très voraces pigeons en quelques secondes. Toute personne ayant fait tomber à manger au pied du banc où elle mangeait en aura été témoin.

"Quant au pigeonnier contraceptif, c'est une sorte de cabane pour les pigeons. Il est important de l'entretenir en le nettoyant, et en nourrissant les pigeons pour qu'ils viennent y vivre. Ensuite, un prestataire payé par la mairie va venir secouer les œufs, pour les empêcher d'éclore. C'est une méthode très répandue en France."

C'est une méthode très répandue en France.

Amandine Sanvisens, co-fondatrice de Paris Animaux Zoopolis (Paz)

L'association vante ces méthodes "éthiques et efficaces", en lieu et place de les tuer, ce qui est vecteur de souffrance animale. Les pigeons rémois sont asphyxiés lorsque les cages où ils sont piégés sont remplies de dioxyde de carbone. Dans la ville de Colmar (Haut-Rhin), où la Paz est "parvenue à l'arrêt" de la méthode d'abattage, les cages étaient vidées de leur air (méthode présentée à tort comme celle utilisée à Reims par l'asso Stéphane Lamart). Un "gâchis d'argent public, dans la plus grande opacité, car les habitants ne sont souvent pas au courant"

Pas sympa pour les pigeons, mais "légal"

"Il est temps de prendre au sérieux la condition animale", assène Amandine Sanvisens. "Je rappelle que la mairie de Reims a une délégation pour la condition animale. Il faut qu'on arrive à cohabiter avec les animaux en ville : sans qu'ils nous dérangent, mais sans que nous les fassions souffrir."

Justement, à la municipalité, c'est l'adjointe (UDI) en charge des affaires sanitaires et sociales, Marie Depaquy, qui est concernée. Elle répondait déjà à France 3 Champagne-Ardenne au sujet des pigeons en 2023. Elle travaille de conserve avec la conseillère municipale Caroline Barré, qui travaille sur le bien-être animal.

"On est sensibilisé, bien évidemment. Ce sont des dossiers que l'on suit. On ne travaille pas dessus sous la pression, parce que ces associations - non-rémoises - nous sollicitent. Mais parce qu'on a à cœur le bien-être animal." Elle reconnaît qu'"effectivement, on emploie toujours la méthode critiquée par les associations. Mais je tiens à rappeler que c'est une méthode légale." Légal, peut-être, mais est-ce moral ?

On est sollicité par les habitants qui disent qu'ils n'en peuvent plus.

Marie Depaquy, adjointe au maire de Reims en charge des affaires sanitaires et sociales

L'adjointe tient aussi à préciser qu'il ne s'agit pas d'une méthode systématique, "mais employée en dernier recours. On ne fait pas ça avec toutes les colonies de pigeons en ville. C'est quand une colonie est vraiment installée et qu'il y a beaucoup trop de pigeons. Je rappelle qu'on est sollicité par les habitants qui disent qu'ils n'en peuvent plus, que les trottoirs glissent à cause des fientes ou que les voitures en sont recouvertes."

La politique municipale est plutôt de mettre l'accent sur la prévention (interdire le nourrissage par la population). Il est prévu de verbaliser au besoin. "On demande aussi aux propriétaires qui ont parfois des hangars, garages en mauvais état, de faire des travaux pour éviter que les pigeons ne viennent y nicher. On accompagne aussi beaucoup les habitants qui ont besoin de conseils pour éviter qu'ils se posent sur les toits." 

La mairie réfléchit

Mais les choses pourraient bientôt changer. "On réfléchit depuis un an sur la possibilité d'utiliser d'autres méthodes. On a fait ce qu'on appelle du parangonnage, on est allé dans d'autres collectivités pour voir ce qui se fait." Elle cite de plus petites villes, mais aussi les exemples marseillais (Bouches-du-Rhône) et strasbourgeois (Bas-Rhin) en ce qui concerne les pigeonniers contraceptifs.

"On est en train d'étudier une éventuelle installation. Mais avant, on doit aller à la rencontre des entreprises, étudier la faisabilité financière, penser au lieu idéal. Ou aux lieux. On sait qu'un seul pigeonnier peut ne pas être suffisant." Seule une expérimentation permettra de répondre à cette question. Mais on ne sait pas quand. Et celle-ci aura "un réel coût", qui n'est pas encore connu par la municipalité.

"On n'a pas fait d'étude sur le coût", reconnaît Amandine Sanvisens. "C'est extrêmement complexe de faire la comparaison. Les méthodes éthiques constituent un investissement. Les méthodes létales sont un coût à répéter chaque année, puisque les populations se reconstituent. Le ministère de l'Écologie lui-même dit que la méthode létale n'est pas efficace à long terme. On pense que si c'est toujours utilisé, c'est tout simplement par habitude et pour donner l'impression aux habitants que quelque chose est fait." 

L'élue s'intéresse aussi à la technique du maïs contraceptif, utilisée avec succès à Barcelone (Catalogne, en Espagne). Et continue de se renseigner à ce sujet. Pour autant, "je n'annonce pas qu'on arrête la méthode qu'on utilise actuellement. On ne peut pas arrêter du jour au lendemain." Une chose est sûre : les choses avancent. Petit à petit.

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