Les personnes réfugiées au camp Saint-John Perse, à Reims (Marne), ont froid. Un appel à collecter du bois de chauffage a donc été lancé le lundi 15 mars. Même si on parle beaucoup des demandeurs et demandeuses d'asile d'Ukraine, le collectif Sovkipeu rappelle qu'il ne faut pas oublier les autres.
Il fait froid. Et pour des personnes qui vivent dehors, la situation n'est pas tenable. Pourtant, elles n'ont pas le choix : elles sont réfugiées.
Pour se chauffer, il n'y a pas 36 solutions. Il faut compter sur la générosité de bénévoles, de gens bien intentionnés. Mais le bois de chauffage, les palettes essentiellement, ça commence à manquer.
D'où un appel lancé par le collectif Sovkipeu, sur les réseaux sociaux, le lundi 15 mars 2022. Au profit de la vingtaine de personnes dormant actuellement dans des tentes plantées dans le parc Saint-John Perse de Reims (Marne), ouvert en 2016 et déplacé au fil des expulsions entre 2017 et 2021... avant d'y revenir (voir sur la carte ci-dessous).
Philippe, l'un des bénévoles du collectif, a présenté la situation aux questions de France 3 Champagne-Ardenne. "Le Secours populaire nous aide déjà pour l'urgence alimentaire. Le problème essentiel, pour l'instant, c'est le chauffage, de trouver du bois. Le froid perdure, et les gens sont sous les tentes, avec simplement des matelas, des couvertures, et l'humidité. C'est pour ça qu'il faut du feu, c'est la première urgence."
"Si les gens peuvent nous amener des palettes, ou des planches..." Il est aussi possible, dans le même registre, d'amener des vêtements chauds. Les produits de première nécessité, qu'ils soient d'hygiène ou alimentaires, sont évidemment aussi les bienvenus.
Un récent don important de palettes est, dans tous les sens du terme, "parti en fumée". En général, le collectif arrive à se débrouiller pour se fournir, mais c'est plus compliqué dernièrement. "Généralement, on va les chercher où on peut, chez les entreprises qui en donnent : mais elles ne le font pas toujours. Ce n'est pas toujours évident pour un très petit collectif comme nous de trouver une camionnette et d'aller sur place charger des palettes."
Une situation difficilement tenable
Le camp Saint-John Perse accueille "des personnes demandeuses d'asile, qui sont dans la plus grande fragilité, la plus grande précarité. Alors qu'elles devraient être mises à l'abri : c'est ce qu'on réclame depuis des années. Il y a des femmes - certaines enceintes - et des enfants, des personnes âgées aussi." Le nombre total varie selon la période, et il y a aussi parfois eu des SDF français. "On les laisse dehors le temps que des places se libèrent. Car la préfecture ou la mairie ne veulent pas créer de nouvelles places pour ces personnes."
Il y en a une vingtaine (un chiffre qui fluctue). Cette population vient du monde entier : d'Afrique, d'Europe centrale ou de l'est... "mais pas d'Ukrainiens", fait remarquer le bénévole. "Ces derniers ont un traitement qui n'est pas le même. On est un peu écoeuré par les discours politiques actuels, qui jouent à la France terre d'accueil, à la générosité... parce que c'est l'Ukraine. Alors qu'ils ont depuis des années fait des choses pas très propres sur le plan de l'accueil des demandeurs d'asile. À Calais, à Reims, partout : déchirer des tentes, empêcher des associations de travailler." Des actes ("qui ont été faits et qui le sont encore actuellement") aux antipodes de leurs discours, donc.
Un "deux poids-deux mesures manifeste". Mais le bénévole se veut "clair : qu'on accueille et secoure les Ukrainiens en détresse, évidemment que c'est normal et très bien. On serait les premiers à leur venir en aide, certains de nos amis dans les Ardennes sont d'ailleurs de train de le faire. Mais ce qu'on constate, c'est qu'il y a peut-être un tout petit peu d'hypocrisie... J'ai du mal à entendre Valérie Pécresse de générosité et d'accueil aujourd'hui parce que c'est l'Ukraine, alors qu'hier, elle balançait des choses assez horribles sur les demandeurs d'asile. Et je ne parle pas de l'autre dont je me refuse à prononcer le nom..."
Appel aux bonnes volontés
Le message que veut faire passer le collectif, c'est que les personnes dont il a la charge "continuent d'être âgées, mais aussi des femmes et des enfants. Fragiles. Qui ont passé tout l'hiver sous des tentes. C'est de l'inhumanité. Il n'y a pas d'autres noms. Et c'est même, je pense, hors-la-loi quand on regarde les conventions sur l'accueil et sur le droit d'asile. La France aurait les moyens de ne pas laisser dehors ces gens, qui sont en danger. "
"Il faudrait ouvrir des centres d'accueil au lieu d'entasser les gens dans des hôtels qui coûtent très cher... Pour les prendre en charge de manière responsable et humaine. La politique actuelle est tout à fait irresponsable et dangereuse. On laisse faire depuis trop longtemps le monde associatif. Qui fait ce qu'il peut, mais qui ne peut pas tout faire..." Un problème resté trop longtemps invisibilisé.