Avec les seuls commerces alimentaires, des règles strictes et assez peu de clients, le marché du dimanche de Vandoeuvre-lès-Nancy a bien eu lieu le 22 mars 2020. Ambiance confinement, distances obligatoires et optimisme contraint.
Le marché dominical de Vandoeuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle) a bien eu lieu ce dimanche 22 mars 2020. Seuls les commerces alimentaires étaient autorisés. Une petite vingtaine de stands très distants ont donc occupé un espace anormalement désert ou presque. Plusieurs mètres entre chaque étal, des vendeurs masqués et gantés, des clients au compte-goutte bien éloignés les uns des autres ont donné un air lunaire ou surréél à ce rendez-vous hebdomadaire habituellement bondé, coloré et très vivant.
Chiffres d'affaire en berne
En fin de marché, lorsque je demande à Faten, vendeuse de poulets rôtis et de petits plats préparés, " Comment ça s'est passé aujourd'hui ?" , elle me répond avec un grand sourire un peu contraint :C'est la catastrophe, d'habitude nous sommes 6 ou 7 avec un grand camion. Aujourd'hui nous sommes deux avec la petite camionette et j'ai l'impression que toute seule j'aurais pu le faire. Non, c'est dur mais je garde le sourire parce que je suis utile à ceux qui viennent !
De stand en stand, les mêmes constats, moins 50 ou 60% côté recettes mais la fierté de continuer à servir les gens et à échanger quelques mots. Comme un air de résistance.
Les consignes respectées
Rencontré sans rendez-vous sur le marché, Stéphane Hablot, maire de Vandoeuvre réélu au premier tour dimanche dernier, a tenu à me préciser d'entrée que ce marché se tenait avec l'accord de la préfecture de Meurthe-et-Moselle.Les consignes de distances et d'hygiéne strictes ont été données et respectées. Les vendeurs sont masqués et gantés et les clients ne doivent pas toucher la marchandise.
- Stéphane hablot, maire de Vandoeuvre
Venu vérifier tout cela en tant qu'élu, le maire n'oublie pas de saluer chaque commerçant et beaucoup de clients à distance. Pour échanger quelques mots,et rappeler les règles en souriant. Il fait aussi ses courses personnelles et se fait un devoir de rapporter quelques achats à sa mère âgée de 80 ans et confinée à domicile.
"C'est déjà bien qu'il ait eu lieu !"
Rencontré au moment où il rangeait son stand, Pierre Mahr, "Les râpés de Pierrot" et président du syndicat des marchés de France du Centre Est se montrait assez rassuré :
C'est déjà bien que ce marché ait été maintenu car ce n'est pas le cas partout. Nous comprenons qu'il y ait débat. Je suis très content de ce test d'aujourd'hui. Pas faciles à faire passer et à faire respecter, les consignes sanitaires ont été strictement appliquées. Même si toutes ses consignes et l'ambiance médiatique ont fait peur aux gens qui sont venus beaucoup moins nombreux, nous on a tenu bon et on résiste en rendant un service au public. Au même titre que les grandes surfaces et parfois même dans de meilleures conditions sanitaires !
Le président du syndicat se montre plutôt satisfait de la solidarité entre commerçants,"on se serre les coudes !", car il estime que leur rôle ne tient pas seulement au chiffre d'affaire, et insiste même sur la notion de service de proximité rendu au public.
Le client croit à un contrôle
Anecdote assez révélatrice côté client : j'aborde un homme masqué et ganté venu faire ses courses. En me tenant à distance réglementaire, je me présente en filmant avec mon téléphone. À ma première question, ce client sort hâtivement de sa poche son justificatif de déplacement, me prenant sans doute pour un policier. Ce monsieur a tout simplement cru à un contrôle et a envisagé un instant l'amende qui peut l'accompagner.
Je l'ai rassuré en déclinant une nouvelle fois mon identité et mon rôle de journaliste. Il venait assurer le ravitaillement hebdomadaire pour ses trois enfants, sa femme et lui. Mais ses gestes assez brusques, son masque et ses gants ont révélé une peur certaine. "Les clients habituels ne viennent pas car ils ont peur !" m'ont confié plusieurs commerçants.
Le sourire d'Audrey
Même avec un bilan de fin de matinée estimé à 50% de pertes, Audrey, vendeuse de la crémerie "chez Greg", concluait ce tour de marché par un sourire et un appel :On est là, quoiqu'il arrive on restera là pour vous servir et on espère être présents la semaine prochaine !
- Audrey, crémerie "Chez Greg"
Si les consignes gouvernementales n'évoluent pas, le marché de Vandoeuvre devrait avoir lieu dimanche prochain.