Témoignages. Vote RN : qui sont les électeurs du parti d'extrême droite et quelles sont leurs motivations

Publié le Écrit par Inès Pons-Teixeira
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Le Rassemblement national a atteint des scores historiques lors des élections législatives anticipées du 30 juin 2024. En Lorraine, le Rassemblement national arrive ainsi en tête dans 16 des 21 circonscriptions. Mais qui sont les électeurs de ce parti d'extrême droite et pourquoi ont-ils décidé de glisser un bulletin RN dans l’urne ? Analyses et témoignages.

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Selon une enquête Ipsos-Talan pour France Télévisions et Radio France, réalisée à la veille du premier tour des élections législatives du dimanche 30 juin, les électeurs du RN sont majoritairement des hommes, ouvriers ou employés, âgés de 50 à 59 ans, mais pas que. Si les jeunes votent surtout pour le Nouveau Front Populaire, ils votent aussi en nombre pour le RN (33% des 18-24 ans et 32% des 25-34 ans). À mesure que l’électorat vieillit, le vote se déporte vers l’extrême droite (36% des 35-49 ans votent RN et 40% des 50-59 ans), hormis chez les plus de 70 ans, qui placent le camp présidentiel en première position. En Meurthe-et-Moselle, ces électeurs du RN ont accepté de nous faire part des raisons qui les amènent à voter pour le parti d'extrême droite.

Corinne, 58 ans, de Mitterrand... au RN

Corinne, 58 ans, est une ancienne vendeuse de prêt-à-porter. Elle habite dans la banlieue de Nancy, en Meurthe-et-Moselle. En incapacité de travailler, elle perçoit une pension d'invalidité de 1000 euros et 600 euros mensuels de chômage. "J’ai déjà voté à gauche, pour Mitterrand. Mais la gauche ne se concentre que sur le social et fait trop pour les étrangers. Elle n’a pas su s’emparer non plus des questions de sécurité", lâche la quinquagénaire. Corinne est bien décidée à voter RN le 7 juillet 2024. Ses préoccupations désormais : l’immigration, l’insécurité et le pouvoir d’achat. "J’habitais dans un logement social mais j’ai dû déménager à cause du trafic de drogue dans le quartier. Avant, c’était différent. À 18 ans, je rentrais de boîte de nuit à pied à 3 heures du matin, sans avoir peur", assure la Nancéienne.

Pour moi, le RN n’est pas l’extrême droite, c’est un parti pour les valeurs françaises

Corinne, électrice du RN

Elle ne craint pas l’arrivée du Rassemblement national au pouvoir. "Je ne supporte plus les consignes de vote et les alliances pour faire barrage au RN. On dirait que les électeurs du RN sont des pestiférés, alors qu’on est en démocratie", insiste l’ancienne vendeuse. "Pour moi, le RN n’est pas l’extrême droite, c’est un parti pour les valeurs françaises", ajoute-t-elle. Pourtant, le conseil d’État est formel, le RN est bien un parti d’extrême droite. Saisie par le parti de Jordan Bardella et Marine Le Pen, la plus haute juridiction administrative de France confirme que le RN peut bien être classé à l’extrême droite par le ministère de l’Intérieur lors des élections. Mais cela ne semble toujours pas convaincre Corinne : "ils défendent la France, ils sont patriotes, ils aiment leur drapeau".

Éric, 59 ans, "on ne vit plus, on survit"

Éric, 59 ans, est employé dans le secteur automobile. Il travaille depuis ses 17 ans et vit en Meurthe-et-Moselle, dans une commune de 7000 habitants, à une trentaine de kilomètres de Nancy. Comme Corinne, ses principales inquiétudes sont "le pouvoir d’achat, l’insécurité et l’immigration". Divorcé et père de trois enfants, il gagne 1800 euros par mois. Ses dépenses incompressibles représentent presque 1000 euros chaque mois, 1200 euros avec l’alimentation. "L'électricité, l’essence, le loyer, l’alimentation, tout est trop cher aujourd’hui. Je n’allume même pas mes radiateurs, autrement mes factures explosent. On ne vit plus, on survit", déplore le quinquagénaire.

Les étrangers ne sont pas tous pourris mais il faut donner la priorité aux Français

Éric, électeur du RN

Électeur du Front national de la première heure, il votera Rassemblement national le 7 juillet 2024. "On a essayé la droite, la gauche, mais ils nous déçoivent et nous mentent. Macron a fait plonger la France. Je ne sais pas si le RN au pouvoir fera mieux mais il faut essayer. Je préfère Marine Le Pen à son père, Jean-Marie Le Pen, qui avait un programme moins social", explique Éric. Comme les autres électeurs du RN avec qui nous avons échangé, il s’inquiète "d'une trop forte immigration" et dénonce "l’augmentation de l’insécurité" dans le pays : "les étrangers ne sont pas tous pourris mais il faut donner la priorité aux Français. Les étrangers ont plein d’aides et aujourd'hui, on ne peut plus rentrer dans les cités, ce sont des lieux de non droit".

Francis, 61 ans, salarié de la fonction publique

Francis, 61 ans, habite Toul, en Meurthe-et-Moselle. Il est salarié de la fonction publique, dans le domaine de la sécurité. Il est électeur du FN, devenu le RN, depuis 40 ans. "Je me reconnais mieux dans le RN d'aujourd'hui, le parti a très bien évolué. Avant, le fond des idées était déjà bien mais il y a eu des dérapages inadmissibles", résume le sexagénaire. Pour lui aussi, "l’insécurité, le pouvoir d’achat et l’immigration de masse" sont les principaux enjeux actuels. "J’ai des amis nord-africains, portugais, italiens. Je viens d’une cité où l’on jouait tous au foot ou au basket ensemble, il n’y avait pas de problème. Ce sont surtout les nouvelles générations issues de l’immigration qui posent problème, il y a trop de laxisme", estime-t-il.

Aider ponctuellement les personnes dans le besoin, oui, l'assistanat non

Francis, électeur du RN

Soucieux du pouvoir d'achat, il se reconnaît dans le programme du RN, plutôt qu’à gauche. "La France cumule une dette abyssale qui pèse forcément sur les dépenses de l'ensemble de la population. Les bas salaires sont coincés au Smic et le CAC 40 se goinfre. Mais pour moi, la gauche n’est pas la solution. Aider ponctuellement les personnes dans le besoin, oui, l'assistanat non. C’est ce que je reproche à la gauche. Il faut remettre au travail les personnes qui sont au RSA depuis des années, le social ne doit pas devenir une pompe aspirante", conclut-il.

D’après l'enquête d’Ipsos-Talan pour France Télévisions et Radio France, les électeurs du RN sont pour beaucoup issus du milieu ouvrier. En effet, 57% d’entre eux ont voté pour le parti d’extrême droite (contre 21% pour le NFP et 7% pour Ensemble). Ils sont également nombreux chez les employés (44% votent RN). Enfin, 31% des retraités et des professions intermédiaires ont voté pour le RN, contre 21% des cadres. Selon ce même sondage, ce vote est aussi une manière pour les électeurs de montrer leur colère et leur déception envers le pouvoir en place. Dans cette logique, les Français "très insatisfaits à l'égard d'Emmanuel Macron" ont voté à 53% pour le RN. Enfin, 61% de ceux qui se disent "pas du tout satisfaits" de leur niveau de vie ont voté pour le parti d'extrême droite.

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