Les représentants des six principales listes, Aurélie Filippetti, Laurent Jacobelli, Brigitte Klinkert, Florian Philippot, Eliane Romani et Jean Rottner étaient sur le plateau de France 3 pour un débat en direct depuis le conseil régional du Grand Est. Retour sur les moments forts.
C'était un moment attendu dans cette campagne. Un rendez-vous en prime time sur France 3 Grand Est pour six candidats en quête d'un électorat qui a bien du mal à se mobiliser et parfois même, à s'y retrouver. Profiter d'une fenêtre télé pour convaincre et aller chercher ces électeurs qui pourront se révéler décisifs les 21 et 27 juin, ça ne se refuse pas. Surtout au lendemain d'un sondage qui place la liste Rassemblement national de Laurent Jacobelli en tête le soir du second tour en cas de quadrangulaire.
- Sondage et commentaires
"Un sondage qui vous donne gagnant, ça fait toujours plaisir mais ce qui compte, c'est le vote des électeurs. Ça donne un formidable message d'espoir. L'alternance est possible et probable, enfin", s'enthousiasme celui qui défendait les couleurs de Debout la France en 2015 lors du même scrutin. Laurent Jacobelli est passé de l'ombre à la lumière. Mais pas de quoi déstabiliser ses adversaires, qui tous minimisent cette projection. Pour Eliane Romani (EELV, Génération écologie, PCF, PS), une certitude : "les sondeurs sous estiment les écologistes." Brigitte Klinkert (divers centre) mise sur la dernière ligne droite : "La campagne dure encore dix jours. Le débat de ce soir va faire bouger les lignes. Ce sondage ne prend pas en compte l'abstention. Moi, je me bats pour être en tête et je sens la dynamique sur le terrain."
Une dynamique qui donne des ailes à Florian Philippot (Les Patriotes) : "Le second tour, nous y serons, la progression est constante et nous serons au dessus des 10%." Il n'est pas le seul à se lancer dans des pronostics. Brigitte Klinkert affirme que "les sondages ne sont pas une élection et ce n'est pas la question qu'on nous pose sur le terrain. Ma liste est une liste de rassemblement et je serai en tête au soir du premier tour."
"On sait que le contexte est difficile, il est favorable au RN, explique Jean Rottner (Union de la droite et du centre), les projections sur le second tour sont incertaines avec une marge d'erreur très large donc soyons prudents. Moi, je suis serein."
- Fusion ou pas
Ces projections entraînent automatiquement la question des fusions et des alliances au second tour. Fort de ces 8%, Florian Philippot ferme la porte à Laurent Jacobelli : "Moi, je suis souverainiste. Fusionner, c'est hors de question quitte à ne pas être présent." A gauche, Aurélie Filippetti (LFI, Génération.s, Place publique) temporise : "on fera en fonction des résultats du premier tour." "Tous ceux qui se retrouvent sur ce que nous défendons seront les bienvenus, la porte reste ouverte" répond Eliane Romani. Ce n'est pas encore la lune de miel mais à gauche, un mariage de raison, même tardif, semble possible.
Mais c'est surtout de la possible fusion entre les listes de Brigitte Klinkert et de Jean Rottner dont il est question. Et pour le président sortant, pas d'ambiguïté : "Je n'ai pas de contradiction à gérer. La droite et le centre, je les représente. Je suis en tête au premier tour et je n'ai eu aucune ambiguïté sur mes choix politiques et les décisions que je devais prendre. Le sujet, c'est de savoir ce que les listes feront derrière moi car je suis en tête. C'est ce que j'ai fait il y a quelque temps quand j'ai appelé à un front républicain pour voter en faveur d'Emmanuel Macron pour faire barrage à Marine Le Pen. Est-ce que les autres listes seront en capacité de faire la même chose pour faire barrage au Rassemblement national. Voilà la question qu'il faut leur poser mais pas au premier dans les sondages." "Ce n'est pas une question que se posent les électeurs botte en touche Brigitte Klinkert, la liste que je représente est une liste d'union. Je me présente pour gagner."
"Le front républicain, c'est l'appel désespéré des hommes politiques pour garder leur poste en faisant des alliances improbables" rétorque Laurent Jacobelli, "le RN est un parti républicain. Le maire d'Hayange a été réélu à 63%... Monsieur Rottner mènera la même politique que monsieur Macron car il a des macronistes sur sa liste. Il a même chassé de sa liste des gens de droite comme Nadine Morano."
- Quel avenir pour le Grand Est ?
Florian Philippot réaffirme qu'il est "contre cette grande région. Il faut revenir aux anciennes régions et je veux réduire le nombre d'élus. 169 élus, c'est trop. Moins d'élus, moins de dépenses et moins d'argent pris au contribuable. Et il faut mettre en place des référendums d'initiative citoyenne."
Brigitte Klinkert prône un "choc de décentralisation. Moi, je veux redonner la parole au concitoyen. N'ayons pas peur du référendum, y compris sur l'organisation de notre région. Ce qu'on a fait en Alsace avec la CEA, on peut le faire ailleurs, sous cette forme ou une autre. En tout cas, il faut donner des compétences aux autres départements et aux agglomérations et mettre en place des présidents délégués en Alsace, en Lorraine et en Champagne-Ardenne."
"La crise du Covid a été un révélateur de ce que la région a pu apporter auprès des artisans et des entreprises. Ils ont réussi à se fédérer et à trouver des solutions, insiste jean Rottner, il ne faut pas se tromper d'élection. Il est hors de question de revenir sur ce périmètre, il n'y a pas que des dépenses supplémentaires, bien au contraire."
"Nous organiserons un référendum consultatif et nous demanderons une réforme législative, insiste Laurent Jacobelli, je nommerai trois vice-présidents en charge de chaque région." Laurent Jacobelli en profite pour tacler Jean Rottner en citant une de ses déclarations : "Une région allant de la région parisienne au Rhin, c'est inconséquent, incohérent et inefficace, ce n'est pas la surface qui fait la force. C'est du Jean Rottner en 2014, vous voyez l'homme a changé. Après avoir trahi les Alsaciens en leur disant qu'il ne les fusionnerait pas dans le Grand Est, aujourd'hui, il trahira les électeurs de droite, je pense que c'est clair."
"Moi, j'ai voté cette réforme quand j'étais parlementaire et j'en suis fière, déclare Aurélie Filippetti, mais ici, tout a été centralisé dans les mains du président, on n'a pas travaillé avec les élus locaux, ni les associations."
- Délinquance, chômage, immigration : les préoccupations des électeurs
"La sécurité, comme d'habitude, le RN n'a que ce mot là à la bouche pour éviter de parler des sujets qui dépendent de la région, explique Aurélie Filippetti, la sécurité relève des communes et de l'Etat, on ne va pas embaucher des policiers à toutes les strates de l'organisation territoriale. Pour nous, la sécurité, c'est d'abord la médiation dans les lycées ou dans les transports en présence d'agents dans les gares et en recrutant des jeunes."
Financer l'embauche de médiateur, c'est aussi une proposition de Brigitte Klinkert qui rappelle que "la sécurité est une compétence régalienne. Il faut une tolérance zéro et rien n'empêche d'investir dans la sécurité pour les transports et dans les gares avec de la vidéoprotection."
Laurent Jacobelli met en avant son pacte sécurité. "Soit la région reste spectatrice, soit elle prend le problème pour faire rempart à la politique de monsieur Macron. Je propose 150 millions d'euros pour aider les communes rurales à s'équiper en vidéoprotection. La région peut donner des subventions. Je propose aussi un chèque sécurité de 200 euros pour les particuliers. Il faut arrêter la politique migratoire car le Grand Est est la région où il y a le plus de logements pour accueillir des demandeurs d'asile. C'est un triste record. J'assume cette politique de sécurité, c'est mon engagement principal." Florian Philippot lui aussi souhaite aider les particuliers à mettre des alarmes.
"On doit montrer des signes d'autorité républicaine, affirme jean Rottner, "si la sécurité est le sujet numéro 1, ça devient donc mon sujet". Jean Rottner propose des aides aux collectivités pour des investissements en matériel et rappelle au passage que sans fibre, il n'y a pas de vidéoprotection. "Le groupe que Laurent Jacobelli représente ne s'est pas prononcé en faveur du plan fibre."
"Les candidats qui mettent en avant les thèmes de la sécurité ou de l'immigration, qui ne relèvent pas de la région n'ont qu'une élection en tête : la présidentielle. C'est mensonger", conclut Eliane Romani
- Economie et transport
Côté économie, tous les candidats s'accordent à favoriser une économie verte et le consommer local. Aurélie Filippetti prône le "made in Grand Est" et la création d'une banque d'investissement régionale. "Nous sommes aujourd'hui la première région de France qui accueille des entreprises étrangères avec autant de création salariales" avance Jean Rottner, "nous sommes une région qui correspond aux demandes de ses entreprises."
Laurent Jacobelli rappelle de son côté que "la Région Grand Est a versé huit millions d'euros à l'entreprise PSA et ils ont délocalisé en Espagne. Les salariés ont donc payé avec leurs impôts une subvention pour se retrouver au chômage. Il faut arrêter les chèques en blanc."
Brigitte Klinkert déclare que sa priorité, "c'est la sortie de crise. Au gouvernement, en quelques mois, nous a accompagné 1,5 million de jeunes vers l’emploi et permis de signer 500.000 contrats d’apprentissage : un record historique. Cela doit profiter au Grand Est."