En août 2019, une jeune femme atteinte d'une forme d'autisme sévère est décédée à l'hôpital de Laon, sans que ses parents soient informés de la dégradation de son état. Trois ans plus tard, ces derniers attaquent l'hôpital devant le tribunal administratif.
Trois ans après, les questions autour du décès de Laëtitia Gochon subsistent pour sa famille. Le 13 août 2019, cette jeune femme de 38 ans , atteinte d’une forme d’autisme sévère, est admise à l’hôpital de Laon après un malaise. Elle décédera quelques jours plus tard, sans que ses parents ne soient prévenus de la dégradation de son état.
Pour sa sœur, Sabrina Couvelard, il y a eu "beaucoup de mensonges par téléphone". "On était très inquiets, à part de la fièvre, on se dit ça monte, ça descend, ça ne peut que se passer", raconte-t-elle, avant d’ajouter, "ils ne nous ont pas tout dit. Tout a été révélé vraiment tardivement."
"C’est un acharnement thérapeutique sur un handicapé, donc nous l’avons débranché"
Le médecin s'adressant à la famille de Laëtitia
En effet, les explications du côté médical n’interviennent que le lendemain. "Le médecin dit face à nous : c’est un acharnement thérapeutique sur un handicapé, donc nous l’avons débranché. Ils n’ont pas essayé de la réanimer. Ils ont décidé d’eux-mêmes de la débrancher", explique la sœur de Laëtitia.
Une mention qui apparaît dans un document de liaison interne à l’hôpital, qui "choque" Christophe Donnette, l’avocat de la famille. Il est écrit : "Patiente récusée par le réanimateur, vu ses antécédents psychiatriques et infirmités cérébrales de la patiente". "Et ça c’est quelque chose que je ne peux pas admettre. Chacun a le droit à des soins quel que soit son état psychologique. Et là, on a ce que j’appelle une pratique de l’eugénisme par l’hôpital de Laon qui n’est absolument pas admissible" déplore-t-il.
"Il y a des trous dans le dossier médical"
Christophe Donnette, avocat de la famille de Laëtitia
Une décision contestable qui va dans le sens de l’expert judiciaire. Selon l’avocat de la famille de Laëtitia, ce dernier a jugé dans un rapport "l’admission sur des antécédents psychiatriques sans plus d’argumentation est contestable". L’avocat appuie ce constat : "On sait qu’au moment où on envisage de la transférer en soin intensif, il y a déjà eu une mesure de constante qui est inquiétante. Mais pour autant elle a encore, l’expert va le confirmer, au moins 50 % de chance de guérir". Il affirme par ailleurs que l’hôpital "n’a aucun élément psychiatrique. C’est ce que va également dire l’expert."
Des points flous persistent dans le dossier médical, "il y a des trous dans le dossier médical. Il y a une journée ou deux, on n'a aucune constante de mesure, on n’a rien. C’est un peu inquiétant", résume Christophe Donnette.
Des zones d’ombre qui empêchent Gilbert Gochon de faire son deuil. "Je dis qu’ils nous ont volé quelque chose, quelque part. Ils nous ont empêché de quelque chose. S’ils avaient été plus communicatifs. S’ils avaient dit les choses comme elles auraient dû être dites. Ce fameux jour, nous aurions pu aller la voir et lui dire adieu", confie-t-il.
Trois ans après, les parents espèrent trouver des réponses à leurs questions au tribunal administratif d'Amiens, où l'affaire a été portée.
Sollicités, ni le centre hospitalier de Laon, ni son avocat n'ont souhaité répondre à nos questions.