Les "gueules-cassées", des légumes vendus 1 euro le kilo : une coopérative brade "ses légumes moches" bio à un prix record

Depuis février dernier, une opération anti-gaspi est proposée régulièrement par un groupe d'agriculteurs bio pour écouler leurs légumes hors calibres. Des produits frais et bio jugés de “second choix” qui sont faits rois et qui rencontrent un succès fou, à 1 euro le kilo. Ça se passe à Gouzeaucourt, dans le Nord.

Trop gros, trop petits, tordus ou cabossés… Autant de légumes qui sortent des normes et se retrouvent bannis des magasins mais trouvent finalement preneurs grâce à une initiative de trois producteurs de la coopérative CUMA Bio Territoires. Tandis que 10 à 40% de la production totale est jugée hors calibre par les standards, ils organisent tous les premiers et troisièmes samedis du mois des opérations anti-gaspi à Gouzeaucourt, dans le Nord. 

Il y a pratiquement 40 kilos et je paye 37,50 alors qu’en magasin je paierai pas loin de 100 euros.

Yannick, client

Le principe ? Vous venez sur le lieu défini avec vos cabas (d’autres sont fournis si besoin), vous piochez librement les légumes bio en vrac qui vous font de l'œil dans ces énormes bacs en bois, puis vient le moment de la pesée. Et le calcul est rapide puisque tous sont à 1 euro le kilo. “Il y a pratiquement 40 kilos et je paye 37,50 alors qu’en magasin je paierai pas loin de 100 euros”, se réjouit Yannick, venue avec sa fille. “Il y a de tout pour presque rien, ça vaut le coup”, s’exclame-t-il. 

Des légumes comme dans le jardin

Oignons, poireaux, carottes de couleur, betteraves, navets, céleri, aubergines, chou-rave, poireaux…. Le choix est large, de saison et toujours bio. “Ce ne sont pas toujours les mêmes légumes, donc on prend et on fait ses petits plats selon ce qu’on peut trouver ici”, indique Catherine, venue grâce à des amis et qui a depuis conseillé la démarche à sa fille. “Je n’achète pas de légumes bio en magasin car c’est trop cher, je préfère prendre des gros stocks ici, j’épluche et je congèle”, explique-t-elle. 

Il faut certes “savoir laver, éplucher et parfois couper un peu plus que d’habitude”, admet Olivier Halluin, agriculteur bio et président de la coopérative Bio Territoires.

"C’est un peu comme si les légumes étaient sortis du jardin !"

Olivier Halluin, agriculteur bio et président de la coopérative Bio Territoires

Dans tous les cas, pas de quoi décourager les plusieurs centaines de clients présents à chaque vente qui n’ont que faire de l’aspect de ces légumes, puisque le goût est le même.

Eux n’y voient d’ailleurs que des avantages : la possibilité de goûter des aliments inconnus, la présence de légumes anciens, le rapport qualité-prix et la convivialité de la vente, avec parfois des échanges de recettes et d’astuces de cuisine. 

2 à 4 tonnes de légumes vendues

 Au total, 2 à 4 tonnes de légumes anti-gaspi sont vendues à chaque fois, pour un panier moyen d'environ 10 à 15 kilos. S’ils n’avaient pas eu cette seconde vie, les légumes auraient été soit transformés pour de la restauration collective, des industriels ou de l’alimentation animale, soit auraient été envoyés vers des filières de méthanisation. Avec un gain pour les agriculteurs de 10 à 30 centimes par kilo. Une formule gagnante pour tout le monde, donc, mise en place grâce à un fonctionnement simple : ni transport, ni emballage, ni main d'œuvre de préparation. 

Tout a démarré à l’automne dernier, le 4 février 2023, face au constat d’invendus et de normes de qualité dans la vente. “Collectivement on a réfléchi à des solutions et on a trouvé intéressant de faire bénéficier la population locale de nos légumes”, contextualise Olivier Halluin. La clientèle, qui s’est formée avec le bouche à oreille et Facebook, se compose en majorité des habitants des villages alentour, avec une entraide valorisée par la collectivité : il est en effet tout à fait possible d’acheter pour des proches. 

Solution anti-inflation

“On ne s’attendait pas à un tel succès”, reconnaît Pascal Engster, agriculteur bio et membre de la coopérative : “On l’a fait au bon moment, pendant l’inflation, et c’est tombé à pic pour les gens. Ça fait plaisir de se rendre compte que les gens ont envie de manger des bons légumes, qu’ils sont ok pour manger ceux un peu différents mais comestibles et qu’ils soient sensibles à notre cause”, avance-t-il. Nombreux des clients interrogés se réjouissent de la possibilité, par leur présence, de “favoriser le circuit court.”

Alors que la CUMA Bio Territoires représente à elle seule 20% des surfaces bio dans les Hauts-de-France, où la moyenne du bio est de 2.9%, soit la dernière région de France en termes de surface, la collectivité espère que cette méthode d’agriculture continuera de convaincre. Pascal Engster espère également qu’un jour, ces légumes à la “gueule-cassée” puissent se retrouver dans les magasins avec la possibilité pour le consommateur d’acheter plusieurs gammes. 

En attendant, la prochaine vente aura lieu exceptionnellement un dimanche, le 22 octobre de 10h à 18h, à l’occasion de l’événement Planète courge, qui réunira des ateliers la vente anti-gaspi et un marché de producteurs locaux. 

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