Des ralentissements sont à prévoir entre Seclin et Arras ce jeudi matin sur l'autoroute A1… Et pour cause, les infirmiers libéraux ont décidé de mener une opération escargot pour faire entendre leurs revendications.
Le collectif asyndical des Infirmiers Libéraux en Colère a lancé un appel national à la mobilisation. Objectif : porter haut et fort leurs revendications. Dans les Hauts-de-France, “on attend une bonne centaine d’infirmiers”, affirme Charlotte Bouchacourt, infirmière et coordinatrice locale du mouvement. “Je ne sais pas si on sera beaucoup car on a une obligation de continuité de soin mais on compte bien se faire entendre !”
On demande la revalorisation des actes médicaux infirmiers, qui n’ont pas été revalorisés depuis 2009.
Charlotte Bouchacourt, du collectif Infirmiers Libéraux en Colère
Le rendez-vous est fixé à 7 heures du matin sur le parking du magasin Stockomani de Seclin. Les manifestants vont ensuite se rendre à Arras par l’autoroute A1, à faible allure. La circulation risque ainsi d’être perturbée. Ensuite, un rassemblement est programmé à 9 heures 30 devant les locaux de la CPAM (Caisse primaire d’assurance maladie) d'Arras. L’Organisation Nationale des Syndicats d’Infirmiers Libéraux, par la voix de son président Franck Ribière, se dit “solidaire et confraternelle” de cette initiative “spontanée et sincère”.
Pour une revalorisation des actes médicaux infirmiers
Les revendications des infirmiers sont multiples : “On demande la revalorisation des actes médicaux infirmiers, qui n’ont pas été revalorisés depuis 2009”, explique Charlotte Bouchacourt. “Quand on voit l’inflation en 2024, tout a augmenté de 25 à 28%... On voudrait que notre barème augmente à hauteur de l’inflation.” D’après les calculs du collectif des Infirmiers Libéraux en Colère, les infirmiers sont payés en moyenne 6 à 9 euros brut par heure. Soit largement moins que le Smic, à 11 euros 65 .
Sans compter les actes gratuits effectués par ces professionnels de santé, comme mettre des bas de contention ou administrer des collyres. “Aux yeux de la sécurité sociale c’est hors nomenclature : on n’est pas rémunérés”, déplore l’infirmière. “Résultat, on le fait gratuitement car les patients, qui croient qu’on est payés, ne comprendraient pas de devoir payer des actes non-remboursés.”
“On voudrait aussi une augmentation de notre indemnité forfaitaire de déplacement à hauteur de 5 euros. Aujourd’hui, elle est de seulement 2 euros 50 pour se déplacer chez les gens”, précise Charlotte Bouchacourt. Les Infirmiers libéraux en colère réclament également la retraite à 62 ans (contre 67 ans actuellement), et la “reconnaissance de la pénibilité” de leur travail. “On coche toutes les cases”, explique l’infirmière. “On fait des horaires à rallonge, pour certains parfois plus de 100 heures par semaine, on porte des charges lourdes, on ne peut pas prendre des vacances quand on veut…”
Des conséquences directes sur les patients
Pour les infirmiers qui se mobilisent, ces revendications sont aussi dans l’intérêt des patients. D’après le collectif, 58% des cabinets ferment dans les 5 ans après leur ouverture. A la pénurie de médecins pourrait donc s’ajouter une pénurie d’infirmiers dans les années à venir. Charlotte Bouchacourt dresse un triste constat : “Les élèves infirmiers abandonnent, ça n’intéresse personne de travailler en médecine de ville, de passer la journée sur la route et se lever à 5h30 du matin. Les jeunes sont dégoûtés d’être infirmiers et infirmières. Si notre travail était mieux valorisé, ça irait mieux.”
Les jeunes sont dégoûtés d’être infirmiers et infirmières. Si notre travail était mieux valorisé, ça irait mieux.
Charlotte Bouchacourt, du collectif Infirmiers Libéraux en Colère
Une tendance qui risque d’avoir des conséquences directes sur les patients : “Demain si votre grand-mère est malade et qu’il n’y a plus d’infirmiers à domicile, elle ne pourra pas rester chez elle. Si son souhait est de finir ses jours chez elle, ce ne sera pas possible.”
Besoin de reconnaissance
Si l’opération escargot de demain est lancée directement par les infirmiers, c’est qu’ils se sentent “délaissés, non seulement par le ministère de la santé, mais aussi par les syndicats”, explique Charlotte Bouchacourt. “On aimerait être reçus et entendus par la ministre de la santé. Que l’État nous montre qu’on est importants aux yeux de tous, on veut être entendus et valorisés pour notre travail”.
Du côté de l’Onsil, Franck Ribière abonde dans le sens de toutes les revendications évoquées. “On soutient ce mouvement qui vient de la base”, affirme-t-il. Pour le syndicaliste, il est important d’apporter “de la visibilité” au métier d’infirmier libéral. “Dans toutes les négociations qu’il peut y avoir, on n’existe pas. Le gouvernement ne s’occupe que de l'hôpital… Alors que la médecine de ville existe et est essentielle.”