Le pass vaccinal, instauré ce lundi 24 janvier, vient réduire le champ des possibles pour les personnes non-vaccinées. Comment le vivent-ils ? À quoi ressemble leur quotidien ? De l'étudiant au cadre d'entreprise, en passant par une ancienne auxiliaire puéricultrice, des habitants du Nord Pas-de-Calais témoignent.
L'étau se resserre encore un peu plus pour les non-vaccinés. Depuis ce lundi 24 janvier, le pass vaccinal a remplacé le pass sanitaire dans un grand nombre de cas. Autrement dit, il n'est plus possible de se rendre dans de nombreux établissements avec une simple preuve de test négatif.
Les lieux de loisirs (restaurants, les bars, les cinémas, théâtres...) mais aussi les transports interrégionaux (TGV, avions...) sont donc désormais interdits aux quelque 5 millions de personnes n'ayant reçu aucune dose de vaccin.
La rédaction de France 3 Nord Pas-de-Calais a souhaité leur donner la parole, par le biais d'un appel à témoignage publié sur Facebook. Retraité, étudiant, cadre d'entreprise ou encore ex agent hospitalier ont répondu... Ils nous racontent leur quotidien.
"Ma vie est la même qu'au premier confinement" : Isabelle, 39 ans, gestionnaire d'assurance à Roubaix
Plus de restaurant, de bar, de ciné... Ni même de salle de sport. Isabelle mène la vie d'ermite. "Je n'ai plus de vie sociale depuis six mois", confie cette Roubaisienne de 39 ans. Non-vaccinée et contre l'usage du QR à l'entrée des établissements exigeant un pass, ses choix lui font payer un lourd tribut.
Elle qui déjeunait tous les midis au restaurant, s'en prive. Elle qui pratiquait le fitness à la salle, a annulé son abonnement. Elle qui avait prévu de partir en vacances en août, vient d'annuler. "Je ne peux plus rien faire, assure cette gestionnaire d'assurance. Finalement, ma vie est pareil qu'au premier confinement."
L'achat de tests anti-covid m'est revenu à 275 euros ces deux derniers mois.
Isabelle, non-vaccinée
Elle évoque également le coût de revient des tests qu'elle pratique pour "préserver ses proches". En effet, depuis le 15 octobre 2021, les tests anticovid (PCR à 43€, antigéniques à 25€, autotests à 6€) ne sont plus pris en charge par l'Assurance maladie pour les personnes qui ne présente pas de schéma vaccinal complet (sauf prescription médicale). "Ça m'est revenu à 275 euros ces deux derniers mois", indique-t-elle.
"Citoyenne révoltée" et militante depuis une "quinzaine d'années", elle défend son engagement dans la rue en participant aux manifestations anti-pass et anti-vax. Le week-end dernier, elle s'est rendue à Bruxelles lors d'un défilé important contre les mesures de restriction sanitaire.
"J'utilise le pass de mes ami(e)s" : Anthony, 30 ans, cadre d'entreprise dans le Nord
Anthony a choisi de préserver sa vie sociale quitte à s'arranger avec la réglementation. "Comme beaucoup de gens j'utilise le pass de mes ami(e)s, explique ce Nordiste de 30 ans. Finalement, être vacciné ou pas, ça ne change pas grand chose, si ce n'est le caractère légal de la chose."
Ce cadre d'une entreprise de prêt-à-porter du Nord reste discret sur son statut vaccinal. "Je passe ça sous silence, car c'est devenu un sujet compliqué à aborder, confie-t-il. Aujourd'hui, on a l'impression que tout nous retombe dessus : la responsabilité de la cinquième vague, la transmission du virus etc."
S'il n'est pas vacciné, c'est pour les "craintes des effets du vaccin". Mais ce Nordiste ne fait pas de son choix un engagement politique. Et refuse d'être classé dans la catégorie des "complotistes".
"Je ne peux pas aller voir mon fils jouer au foot" : Adeline, 30 ans, ex agent hospitalier, à Wambrechies
C'est un double sacrifice pour cette ancienne auxiliaire puéricultrice et mère de famille. D'une part, elle ne peut plus exercer son travail en milieu hospitalier. D'autre part, elle prive ses enfants de loisirs.
"Je ne peux plus aller voir mon fils jouer au foot au stade, ni aller voir ma fils en concert, regrette Adeline, 30 ans, habitante de Wambrechies. La dernière fois, m'a fille m'a demandé de me faire vacciner pour aller au musée. Mes enfants sont punis mais n'ont rien demandé."
Professionnellement, je ne sais pas ce que je vais faire.
Adeline, non-vaccinée
Cette ancienne membre du personnel de l'hôpital de Seclin, qui avait repris des études d'aide-soignante en septembre 2020 pour compléter sa formation, se retrouve dans une impasse professionnelle. "Je ne sais pas ce que je vais faire, dit-elle. Mais si cette obligation vaccinale se perpétue à l'hôpital, je vais devoir penser à une reconversion."
"Ça ne change rien du tout à ma vie" : Francis, 63 ans, retraité à Barlin
Parmi les témoignages reçus, il y a de nombreuses personnes pour qui l'instauration du pass vaccinal n'a pas eu grand effet sur leur quotidien. Francis, retraité de 63 ans à Barlin, en fait partie. "Quand on a une vie de smicard comme moi, on ne va pas au cinéma, au restaurant ou au théâtre", tient-il à rappeler.
Les restrictions gouvernementales n'ont ainsi "rien changé du tout" dans l'emploi du temps de cet habitant du Pas-de-Calais. Quoi que ses relations sociales sont peut-être un peu bouleversées. "Quand je vais voir un copain, je préviens avant que je ne suis pas vacciné, assure-t-il. Je demande si ça dérange, car je respecte le choix de tout le monde."
"Qu'on nous laisse tranquilles" : Ismaël, 24 ans, étudiant à Lille
"Ça m'énerve", "je suis en colère", "qu'on nous laisse tranquilles". Ismaël (prénom modifié) est vent debout contre les nouvelles privations de liberté. Cet étudiant lillois en première année de BTS commerce se plaint de "subir la pression dictatoriale du gouvernement".
"Je n'ai plus les mêmes loisirs qu'avant", déplore-t-il. Adepte des salles de musculation, il fait désormais ses exercices à domicile avec "les moyens du bord". Pour ce qui est de la piscine, il a tiré une croix dessus. Même avant la mise en place du pass vaccinal, il ne s'est jamais plié aux tests PCR ou antigénique pour poursuivre ses pratiques sportives.
Je sais dans quels restaurants aller pour ne pas avoir à présenter de pass.
Ismaël, non-vacciné
Toutefois, il met en œuvre quelques combines pour continuer d'aller au restaurant. "Je sais où aller pour ne pas avoir à présenter de pass, assure le jeune homme. J'ai mes adresses."
Comme la majorité des témoignages reçus, Ismaël ne compte pas se faire vacciner sous l'effet des nouvelles restrictions. Dans son cas, il compte sur la prochaine élection présidentielle pour "changer la donne".