Témoignage. Les retards de train, un "enfer du quotidien" pour Laurent, habitant de l'Oise qui travaille en région parisienne

Publié le Mis à jour le Écrit par Romane Idres
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Comme beaucoup d'Isariens, Laurent Margas fait la navette tous les jours entre l'Oise et la région parisienne pour aller travailler. Depuis un an et demi, la multiplication des retards et des suppressions de train lui compliquent la vie.

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Comme chaque matin, Lionel Margas sort de chez lui avant le lever du soleil pour se rendre à la gare de Saint-Just-en-Chaussée. Un petit trajet d'un peu plus de 600 mètres pendant lequel il consulte son téléphone pour s'assurer que son train, le 6 heures 08, partira bien à l'heure. 

Le quotidien d'un navetteur

Ce jour-là, devant la gare, il sourit de soulagement. Son train est à l'heure. Mais il reste sur ses gardes jusqu'au bout : "Ça arrive qu'ils disent que le train est à l'heure, mais quand j'arrive, il est en retard ou supprimé, explique-t-il, désabusé. Bon, là, vu qu'il y a du vent, il y a un risque, un arbre qui tombe ou une caténaire qui s'arrache..."

Les imprévus font désormais partie de son quotidien de "navetteur", c'est comme ça que l'on surnomme ces travailleurs qui font le va-et-vient vers Paris tous les jours. D'après les derniers chiffres de l'Insee, 86 700 personnes faisaient la navette entre l'Oise et l'Île-de-France. Un chiffre qui a probablement augmenté ses dernières années, et plus encore depuis la crise sanitaire qui a poussé certains Parisiens à quitter la capitale. 

Laurent a quitté la région parisienne pour s'installer à Saint-Just-en-Chaussée en 2017. Sur le papier, l'idée était parfaite : le trajet jusqu'à la gare du Nord ne dure que 55 minutes, grâce à la ligne TER Paris-Amiens. Mais au fil des années, il a vu la situation se dégrader, notamment depuis 2021. Les retards et les suppressions de train se multiplient, et sont devenus son obsession. "J'ai téléchargé 108 justificatifs de retard ou suppression de train [sur cette ligne], sur 362 trajets depuis huit mois", déplore-t-il.

Des heures perdues à attendre

Il a même consigné l'ensemble des difficultés rencontrées dans un tableau Excel. Dans les petites cases rouges s'additionnent les minutes perdues : 15, 30, 60... Et parfois même jusqu'à 90 minutes. "Il y a un trajet sur trois qui est problématique", se désole-t-il. D'après ses calculs, il a passé près de soixante heures à attendre en neuf mois.

Heureusement, Laurent part suffisamment tôt pour pouvoir arriver à l'heure pour sa prise de service la plupart du temps. "Je suis arrivé dix fois en retard [au travail, ndlr] cette année, soupire-t-il. C'est surtout le soir où je suis en retard, normalement je rentre à 19 heures, mais ça arrive que j'arrive à 20 heures, parfois 21 heures..." Des aléas qui provoquent stress et fatigue, et qui pèse sur le moral.

Il se réjouit néanmoins d'avoir un employeur compréhensif qui ne le pénalise pas pour ses retards. "Heureusement que je n'ai pas de souci là-dessus, parce que d'autres se font virer."

Les élus s'agacent aussi

La problématique est telle qu'elle pèse sur certaines communes du sud de l'Oise, qui comptent sur l'installation des navetteurs. Notre équipe a rencontré le maire de Saint-Just-en-Chaussée, Frans Desmedt, au Clos de Plainval, un nouveau quartier résidentiel de la ville, habité par beaucoup d'anciens Franciliens.

Il y a un véritable problème parce que ces gens-là sont partis de la banlieue pour notre ville avec la verdure, les bois, la nature, et on leur avait vendu le fait qu'on était à 55 minutes de Paris, explique-t-il. Mais avec les retards de train, ou quelques fois les annulations, ils ne s'y retrouvent pas. Il y a des gens qui sont contents d'être là mais ils considèrent être à 2 ou 3 heures de Paris.

Frans Desmedt, maire (DVD) de Saint-Just-en-Chaussée

Pour lui, la responsabilité revient à la SNCF. "C'est un service public, en ce moment on parle des déplacements en train et en bus, mais pour que les gens évitent la voiture, il faut absolument que les trains fonctionnent et qu'ils soient à l'heure", estime-t-il.

Laurent Margas a écrit au président de la Fédération nationale d’usagers des transports Hauts-de-Fance, au PDG de la SNCF, à Xavier Bertrand, et jusqu'au président de la République.

Xavier Bertrand, engagé depuis des mois dans un bras de fer avec la SNCF, lui a répondu dans un courrier. Lui aussi estime que la responsabilité incombe à la compagnie ferroviaire : "la Région considère que la situation n'est pas assainie et maintient une pression financière sur son exploitant SNCF Voyageurs afin qu'il redresse la situation".

Interrogé par le sénateur Stéphane Demilly, le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou avait assuré que des actions étaient en cours pour améliorer les choses, notamment le recrutement et la formation de conducteurs. Il estimait néanmoins qu'il était nécessaire de "travailler avec le conseil régional" sur le schéma de dessertes et les investissements dans le matériel.

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