Après 3 ans passés en Ukraine, l’ancien directeur du cinéma Les Stars, à Boulogne-sur-Mer, est revenu dans le Pas-de-Calais pour témoigner du conflit.
"La mer est toujours complice des grands conflits". Sur la digue du Portel, c’est avec une certaine amertume que Jacky Lebas regarde l’horizon. Le Boulonnais est arrivé la semaine dernière dans le Pas-de-Calais pour des problèmes de santé. Mais malgré le calme de la cité portuaire, il ne parvient pas à trouver le repos. "La Manche a apporté la Libération à la France, et la Mer noire si calme et paisible est aujourd’hui porteuse de 14 navires qui déversent l’enfer sur l’Ukraine", observe-t-il, mélancolique.
Invité sur le plateau de"L'avant JT" à 18h30 sur France Nord Pas-de-Calais, mercredi 27 avril dernier, Jacky Lebas exprime son émotion devant l'élan de solidarité qui s'est manifesté en France.
"Un pays calme qui vit au rythme de son calendrier orthodoxe"
L’ancien directeur du cinéma Les Stars, à Boulogne-sur-Mer, a élu domicile il y a trois ans à Jytomyr, à l’est de Kiev. Sa vie, comme celle de beaucoup d’autres, a basculé le 24 février dernier. Depuis, il documente la guerre dans tous ses états. De son travail est né un film de 40 minutes, qu’il a présenté hier jeudi 28 avril dans la salle Philippe-Noiret au Portel, où il a ses attaches. "C’aurait pu s’appeler ‘J’accuse’ car j’y dénonce tout ce que fait ce bourreau", explique Jacky Lebas. Pas question pour lui de prononcer le nom de Poutine. "Ce n’est pas un être humain", avance-t-il.
Au Portel toujours, la médiathèque expose les photos de l’ancien élu boulonnais, prises avant le début du conflit. Des portraits d’Ukrainiens, jeunes et moins jeunes, tous arborant un sourire radieux. "Les sourires de la rue… C’est cela que je veux garder de l’Ukraine, c’est le côté chaud, joyeux, coloré d’un pays complètement calme qui vit au rythme de son calendrier orthodoxe", raconte Jacky Lebas.
Retour en Ukraine le 18 mai
Sur d’autres photos, des champs de blé à perte de vue, "c’est pas le grenier de l’Europe pour rien !" insiste-t-il, nostalgique d’une époque pas si lointaine où avec ses amis ukrainiens, il préparait les réserves pour l’hiver. "Là-bas, la terre ne s’occupe pas de la guerre. Entre les carcasses de voitures rouillées et les trottoirs explosés, il y avait les tulipes qui sortaient." A côté, une affiche de spectacle prévu le 26 février sobrement intitulée "Le spectacle qui n’aura pas lieu."
De ces épreuves, Jacky Lebas en sort grandi. Les yeux, dissimulés derrière d’épaisses lunettes de soleil, s’embuent plusieurs fois. Entre ses mains, un livre écrit avant le début de la guerre, "Le Temps", recense entre autres les monuments de Kiev, d’Odessa, "aujourd’hui mutilés". Mais le Boulonnais en est convaincu : après la destruction et la désolation, viendra un jour "le temps du renouveau."
Pendant trois semaines, Jacky Lebas sillonnera la France pour témoigner de son expérience avant de regagner l’Ukraine le 18 mai. Là-bas, il continuera de documenter la guerre à sa façon et toujours caméra au poing.