En Normandie, l'année 2024 aura été le signe d'une crise sans précédent dans le secteur industriel en raison de plans sociaux coûteux pour l'économie locale. La réindustrialisation des ports du Havre et de Cherbourg, sans compter le nouveau parc éolien de Fécamp, pourrait changer la donne.
Dans la rue et devant les usines, l'année s'achève comme elle a commencé. Les plans sociaux ont fait leur retour dans l'industrie automobile. "On a fermé deux sites et là, nous allons fermer le troisième donc la pilule a du mal à passer", regrette Guillaume Lamour, représentant CGT à l'usine Legrand en Seine-Maritime, qui mettra la clé sous la porte en 2028.
Mobilisation pour l'emploi et l'industrie : devant l'usine #Legrand qui doit fermer, paroles de salariéshttps://t.co/U38XPxScyK
— France 3 Normandie (@f3normandie) December 12, 2024
Automobile, pétrochimie, pharmacie...
La filière automobile souffre en Europe et toute la région le ressent. Les restructurations et annonces de fermeture d'usine se multiplient, laissant des centaines de salariés sur le carreau, soit 167 chez Marelli, 55 chez Autoliv et jusqu'à 413 à l'usine Bosch de Mondeville.
Cela me rend triste. C'est une entreprise qui m'a fait vivre et qui m'a permis d'élever mes enfants. L'usine a une place importante dans ma vie.
Salariée Magneti-Marelli
Dans la pétrochimie aussi, la crise se révèle. La raffinerie ExxonMobil a annoncé en avril l'arrêt de ses activités chimiques à Port-Jérôme-sur-Seine. Trois mois après la signature du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), 666 salariés se sont portés candidats au départ volontaire. C'est davantage que le nombre de postes supprimés.
Même les professionnels du Doliprane, à Lisieux, voient leur fièvre monter en octobre lorsque Sanofi décide de céder la moitié de sa filiale à un fonds d'investissement américain. La pilule passe très mal, surtout à l'ère de la réindustrialisation. "Le Doliprane continuera d'être produit en France parce qu'il en va de la souveraineté du pays", avait déclaré Antoine Armand, ministre de l'Économie de l'époque, en déplacement pour calmer les tensions.
Commerçants et salariés dans l'angoisse
En Seine-Maritime, comme dans L’Eure, les fermetures de sites s’enchaînent et les petites villes trinquent, comme aux Andelys. Les deux poumons industriels de cette commune de 8 000 habitants ont disparu du paysage. La verrerie Holophane a fermé ses portes en janvier, suivi de l'usine Europhane en octobre. Ils emportent dans leur sillage 300 emplois et toute l'économie locale frémit.
Je vais avoir 57 ans bientôt et retomber au Smic, ça fait mal. Malheureusement, il va falloir y passer.
Hervé DelacourAncien salarié Europhane
Les commerçants craignent de perdre des clients et les anciens salariés doivent trouver un nouveau travail. Pas si simple après une vie passée à l'usine... Hervé Delacour, ancien salarié à Europhane, envisage l'intérim pour payer les factures et les études de ses enfants. L'unité de fabrication d'éclairages fermera mais le pôle "recherche et développement" et ses 45 salariés sera maintenu.
Des espoirs tournés vers la mer
Pour autant, au petit jeu des ouvertures et des fermetures d'usines, le solde reste positif en Normandie d'après le baromètre industriel de l'État, sorti en novembre.
Toujours en novembre, le Ministre de l'Économie a annoncé l'ouverture de trois nouvelles usines − spécialisées dans le lithium, l'hydrogène et le méthanol −, dans le port du Havre. Un plan de réindustrialisation avec plus de 700 emplois à la clé.
Les vents portent également l'espoir à Fécamp où 71 éoliennes fonctionnent depuis le mois de mars. Deux nouveaux parcs pourraient y voir le jour d'ici à 2035, avec une montée en puissance qui pourrait atteindre les 4 gigawatts ; soit les deux tiers de la consommation d'électricité en Normandie.
Nous avons créé 1000 emplois en Normandie. Nous sommes aussi le premier parc à installer des pales recyclables. C'est un progrès pour la filière.
Mathieu StoltzDirecteur de la construction du Parc éolien en mer du Calvados
Mais le plus beau miracle vient du Cotentin, à Cherbourg. En sept ans, la cité portuaire a créé le plus grand nombre d'emplois par habitant en France, et ce devant Toulouse ou Lyon, grâce à ses trois piliers : la défense navale, l'industrie maritime et nucléaire, tous tournés vers la mer.