Festivals d'été : certains jettent l'éponge, Papillons de nuit fait sa mue pour exister en 2021

Alors que la crise sanitaire et les règles imposées par le gouvernement ont contraint plusieurs grands festivals à jeter l'éponge en 2021, d'autres s'accrochent comme Papillons de nuit, dans la Manche. Même si l'exercice a tout du casse-tête.

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Il devait fêter son vingtième anniversaire l'an dernier. Mais la pandémie en a décidé autrement. Comme tous la plupart des festivals, Papillons de nuit, qui se tient à Saint-Laurent-de-Cuves dans la Manche, a dû se résoudre à une année blanche en 2020. Un an plus tard, la covid-19 fait toujours des ravages et le confinement vient d'être réinstauré.

Mais en février dernier, la ministre de la culture a annoncé que ces événements culturels pourraient avoir lieu. A condition de n'accueillir que 5000 spectateurs assis. Trop contraignant pour les mastodontes du secteur comme le Hellfest, les Eurockéennes ou Beauregard qui ont jeté l'éponge. En Normandie, des acteurs plus modestes ont décidé de relever le gant comme Rock in Evreux, Chauffer dans la noirceur, Jazz sous les pommiers ou Papillons de nuit.

Le festival de Saint-Laurent-de-Cuves avait prévu de faire des premières annonces en avril. Avant d'être rattrapé par la situation sanitaire. Ce n'est que partie remise. L'édition 2021 est toujours d'actualité. Mais la mettre sur pied relève d'un numéro d'équilibriste, comme nous le confie Louisa Weisbeck, chargée de la communication du festival.

Maintenir une édition 2021 était-ce une question de survie financière pour Papillons de nuit ?

"Absolument pas", explique  Louisa Weisbeck, chargée de la communication du festival, "si on fait quelque chose, on perdra de l'argent. C'est ce que je tiens à rappeler aux gens qui pensent qu'on souhaite quand même faire quelque chose pour pour avoir des rentrées financières. Un format comme ça n'est pas rentable pour nous. Là, au mieux du mieux, on équilibre. Ce n'est pas un festival qui va nous permettre de de dégager du bénéfice, comme sur l'édition 2019, où on a battu notre record de fréquentation. C'est d'ailleurs ce qui nous a permis d'essuyer les plâtres de l'annulation en 2020."

Il va falloir ne pas se brûler les ailes"

 Louisa Weisbeck, chargée de la communication du festival

"Après, on sait qu'on va être aidé par le gouvernement. C'est ce qui nous permet d'organiser cet événement. S'il n'y avait pas d'aide, de soutien, de solidarité, on ne pourrait pas le faire. Mais il faut qu'on fasse extrêmement attention aux dépenses sur tous les postes. Certes, je doute qu'on équilibre mais pour autant, il ne faut pas non plus qu'on perde trop d'argent. Pour l'avenir du festival et pour les 20 ans en 2022."

Alors pourquoi maintenir l'édition 2021 ?

"On est dans un état d'esprit où on veut faire quelque chose" poursuit  Louisa Weisbeck, "je ne dirais pas coûte que coûte non plus parce qu'il faut quand même faire les choses en bonne intelligence. On travaille sur ce format 5000 places assises depuis un mois et demi. Ça faisait quelques temps qu'on réfléchissait à un format de 5000 personnes, depuis novembre. Mais c'était 5000 debout. Alors l'annonce du gouvernement a été ... je ne dirais pas un coup de massue, parce que ça ne sortait pas non plus de nulle part mais pour nous ça a été très dur."

"La question du maintien ne s'est pas posée très longtemps. On s'est dit qu'on avait vraiment envie de faire quelque chose. On ne veut pas avoir une deuxième année blanche, on ne veut pas ne pas exister pendant deux années consécutives. On sait qu'on ne va pas accueillir un public comme on le fait d'habitude : les personnes qui viennent de Nantes, de Paris, de Rouen ne viendront pas. On sera plutôt sur un tissu local."

l'expression "se retrouver" est un peu aux antipodes de ce qu'on vit actuellement"

Et puis, on a besoin de se retrouver. Ce festival, on le fait pour nous, on le fait pour le territoire, on le fait pour les bénévoles. Ça fait deux ans qu'on travaille et qu'on ne voit pas ce travail se concrétiser. C'est très très frustrant, pour tous nos partenaires, pour toutes les personnes qui travaillent avec nous, qui comptent sur nous. Je pense aux techniciens, aux fournisseurs qui n'ont pas pu travailler l'été dernier. Pour tous ces gens là, on a aussi envie de faire quelque chose. On le fait pour se retrouver même si l'expression "se retrouver" est un peu aux antipodes de ce qu'on vit actuellement.

On avait envie de le faire encore plus que d'habitude"

"Pour autant, je comprends les festivals qui ont annulé, tous les gros qui ont annulé. On imagine mal le Hellfest ou les Eurockéennes assis. Nous on a la capacité de s'adapter. Il y a pas mal de personnes qui vont nous aider à organiser ça. On avait envie de le faire quand même, encore plus que d'habitude peut-être d'ailleurs."

Comment se monte la programmation d'un festival en 2021 ?

L.W : C'est plus compliqué que ce qu'on pensait. C'est notre quatrième report. Quand on était encore sur une formule classique, on recontactait les mêmes artistes, à part les internationaux. Là, il y a des esthétiques qui sont supprimées : on ne peut pas programmer de l'électro ou de la musique urbaine. On va se concentrer sur des groupes et des artistes qui peuvent se prêter à cette configuration assise. Du coup, ça fait un tri dans notre programmation de base.

Il n'y a plus vraiment d'actualité musicale ni de nouveaux artistes"

Et puis on a envisagé d'autres artistes, regardé les artistes qui "tournent". Mais c'est compliqué en ce moment : il n'y a plus vraiment d'actualité, il n'y a pas vraiment de nouveaux artistes. Globalement, les artistes qui vont tourner cet été seront à peu près tous les mêmes dans les festivals. En temps normal, c'est le cas pour les têtes affiches mais nous on essaye toujours de faire une programmation découverte.  

Je peux comprendre qu'ils n'aient pas forcément envie de jouer devant un parterre de gens assis et masqués"

Financièrement, c'est également compliqué. Notre budget programmation a été nettement réduit. Les sommes qu'on pouvait proposer avant, qui pouvaient être rentablisées par l'achat de billets, on ne peut pas les proposer cette année. Elles sont fortement revues à la baisse et certains artistes n'acceptent pas. Et des fois, ils n'acceptent pas les conditions de scène tout court. Je peux comprendre qu'ils n'aient pas forcément envie de jouer devant un parterre de gens assis et masqués. Il y a ces artistes qui ne sont pas prêts à faire ces efforts en 2021 et préfèrent revenir en 2022. 

Il y a des artistes qui ne tournent pas parce qu'ils n'ont pas assez de dates"

Et puis il y a ceux qui veulent tout de même jouer mais se pose alors une autre question. Avec la vague d'annulations de festivals, c'est compliqué pour les artistes. Généralement, ils montent des tournées de festivals. Ils en font une vingtaine dans l'été. Là, ça vaut le coup de monter une équipe et un spectacle spécifique. Mais s'ils n'ont qu'une date maintenue en juillet et une autre en août, ils ne vont pas monter une tournée. Il y a des artistes qu'on ne peut pas avoir à cause de ça : ils ne tournent pas parce qu'ils n'ont pas assez de date. Ce sont, pour nous, de nouvelles problématiques.

On espère annoncer des choses au public en mai"

Mais on va réussir à monter une programmation. On y arrive chaque année, il n'y a pas de raison. Il nous faudra moins d'artistes. D'habitude, on en a 36 sur 3 jours. Là, on en aura moins dans tous les cas. On espère avoir des confirmations courant avril début mai pour annoncer des choses au public en mai. 

Avec les nouvelles règles sanitaires, le festival va-t-il changer de forme ?

"Le site de Saint-Laurent-de-Cuves c'est un grand champs en cuvette", explique  Louisa Weisbeck, chargée de la communication du festival, "pour voir les concerts, c'est super. Même les gens qui sont tout au fond voient tout grâce au dénivelé naturel. Mais il ne se prête pas à un format 5000 assis. On ne voit pas où installer un gradin. On a dû avoir une réflexion sur ce sujet : avant d'aller plus loin, où est ce qu'on va ? C'est une des premières choses à laquelle on a réfléchi suite à l'annonce du assis."

"Il nous faut une surface plate. C'est pour ça qu'on a visité plusieurs sites, notamment l'hippodrome de Villedieu-les-Poêles. Il nous faut ce genre de lieu. Les festivals qui ont pu se maintenir sont ceux qui ont des sites adaptés. Sur ce sujet, l'horizon s'éclaircit mais on n'a pas envie de faire d'annonce pour le moment."

Ça n'aura pas lieu à Saint-Laurent-de-Cuves, ça ne s'appellera pas Papillons de nuit"

"On s'est dit aussi que quitte à faire un format différent, on voulait tout changer. On ne va pas communiquer sur un festival mais sur des soirées de concert. Ça n'aura pas lieu à Saint-Laurent, ça ne s'appellera pas Papillons de nuit. On considère que ce n'est pas un Papillons de nuit. Papillons de nuit, c'est 75 000 personnes, un camping qui accueille 10 000 festivaliers, une grande roue, une tour Eiffel, on avait prévu de mettre une tyrolienne, c'est toute une expérience. On ne veut pas se dire que c'est un Papillons de nuit au rabais donc c'est un autre événement. C'est temporaire. On espère bien qu'en 2022, on reviendra comme d'habitude. On ne veut pas de confusion. Ce que les gens verront cette année, ce sera chouette également mais ça ne sera pas Papillons de nuit. "

Le festival est très ancré dans son territoire, il repose sur ses bénévoles. Que va-t-il se passer avec la délocalisation ? 

LW : Les bénévoles, c'est vraiment ce qui fait la force du festival et sa différence. L'état d'esprit qu'il y a à Saint-Laurent et la force collective des Papillons de nuit, ce sont des choses que j'ai rarement vues ailleurs. C'est très très fort.

On n'a aucun intérêt et aucune vocation à délocaliser le festival"

Peut-être que certains ne voudront pas être bénévole parce que ce n'est pas à Saint-Laurent. On ne sait pas encore. Mais les habitants ont bien compris que c'était compliqué de le faire à Saint-Laurent-de-Cuves cette année. Ils auront hâte qu'on revienne et ont bien compris que c'est temporaire. On reviendra l'année prochaine et on va bien les rassurer sur le sujet. On n'a aucun intérêt et aucune vocation à délocaliser le festival. Là, c'est qu'on n'a pas le choix. Le faire à Saint-Laurent, financièrement on n'aurait pas pu. 

On aimerait bien faire le festival sur plus que trois jours"

Cette année, on aura besoin de beaucoup moins de bénévoles. D'habitude, on en a 1400. On aimerait bien faire le festival sur plus que trois jours. Un quatrième voire un cinquième jour. C'est en cours, ce n'est pas acté. Même si on le fait sur cinq jours, il faudra au moins diviser par trois le nombre de bénévoles. Il y aura beaucoup moins de personnes à accueillir. 

Toujours pas de vingtième anniversaire cette année ?

L.W : On devait le fêter l'an dernier puis cette année. C'est hors de question qu'on le fête avec 5000 personnes. Du coup, les 20 ans seront reportés encore une fois. On a envie de voir les choses en grand et faire des 20 ans comme on l'avait imaginé avec son lot d'animations, sa programmation exceptionnelle. On les a toujours en tête. C'est un objectif qu'on se fixe et c'est pour ça qu'il faudra faire attention. cette année.

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