Le littoral manchois change chaque année à cause de la montée des eaux. Alors, pour suivre plus étroitement son évolution et plus particulièrement l'érosion du trait de côte, le Département a installé une centaine de dispositifs photos de suivi participatif sur les plages.
D'ici quelques décennies, les photos de la plage de la Poulette à Agon-Coutainville (Manche) risquent de montrer de plus en plus la mer que les grains de sable, à cause de la montée des eaux causée par le dérèglement climatique.
Mesurer le recul du trait de côte
Pour mesurer ce recul du trait de côte, les scientifiques et spécialistes des risques naturels veulent s'appuyer sur un dispositif de bornes photos participatives, du nom de Coastsnap.
Inventé en Australie, ce petit socle permet aux citoyens de poser leur téléphone sur un support fixe, afin de prendre une photo de la plage à n'importe quel moment et de l'envoyer à des experts via un QR code.
Regardez le reportage de Laila Agorram et Cyril Duponchel :
En compilant les données produites de manière très régulière par les Normands et touristes, depuis un même endroit, les scientifiques disposeraient alors d'une importante banque d'images pour analyser l'évolution du paysage, au fil des mois et des années.
Une petite révolution quand on sait que jusqu'alors, seulement deux photos par an étaient réalisées pour suivre la hauteur et la largeur des plages ainsi que les changements pré et post-tempêtes.
Des Manchois contraints de s'adapter, voire reculer
Le dispositif Coastsnap a été mis en place sur 17 sites dans la Manche et devrait faciliter l'observation des 670 km de rivage manchois entre Genêts au sud et Utah beach à l’est du Cotentin, si les citoyens se l'approprient. Mais pas seulement. Le but est aussi de sensibiliser la population.
"On a vraiment besoin que les citoyens se rendent compte des mutations de nos paysages, de l'évolution sans cesse de notre littoral et notamment de sa fragilité au recul du trait de côte. Qui va impliquer pour nous Manchois, de s'adapter. Voire parfois de reculer", alerte Clément Nalin, ingénieur risques naturels littoraux et inondations au Département de la Manche.
20 000 logements menacés
En octobre 2023, après la tempête Patricia, le trait de côte sur la commune de Barneville-Carteret (Manche) avait reculé de six mètres.
Même problématique à Sainte-Marguerite-sur-Mer où la montée des eaux participe à l'érosion du littoral : la bordure des falaises peut perdre jusqu'à un mètre de terrain par an.
Dans la Manche, 20 000 logements seraient menacés par la montée des eaux à l’horizon 2100. À cette date, la hausse du niveau des mers est évaluée à un mètre supplémentaire par rapport à aujourd'hui, selon une étude publiée par la revue "Nature communications".
La problématique est de plus en plus préoccupante, tant à l'échelle internationale que locale. Environ 190 millions de personnes dans le monde pourraient être déplacées à cause de ce phénomène, dont un demi-million pour les habitants du littoral de la Manche et de la mer du Nord.