Fabriquer de la farine sans gluten avec du marc de pommes, cette purée d’après pressage : c'est le défi relevé par une cidrerie bio du Cotentin. « Le Père Mahieu » commercialise à partir de ce week-end sa farine de pommes.
Fin octobre, c’est l’effervescence dans les cidreries normandes. Mais cette année, chez le Père Mahieu à Bricquebosq (50), la production a une saveur toute particulière : celle de l’innovation.
L’équipe de la cidrerie commercialise à partir de ce samedi 22 octobre sa farine de pommes, un produit 100% local, bio et riche en fibres.
Farine de pommes : un déchet transformé en produit noble
Pour faire du cidre, il faut broyer des pommes puis les presser pour en extraire le jus. A la fin de processus, il reste ce qui était considéré jusqu’à maintenant au pire comme un déchet, au mieux comme « un sous-produit » : le marc de pommes. « Sur 100 kg de pommes, on extrait 60-65 litre de jus, il reste 35-40 kg de marc de pommes » explique Alain Pismont, co-dirigeant de la cidrerie du Père Mahieu.
Ces résidus de pommes sont parfois épandus dans les vergers. Ils peuvent aussi servir à faire de la méthanisation : depuis quelques années, le marc de pommes de la cidrerie du Père Mahieu servait ainsi à produire du gaz chez un agriculteur du coin. « Cela permettait que ce sous- produit ne nous coûte pas de l’argent. Mais il restait mal valorisé. On a cherché des solutions pendant un an et demi. »
Touchée de plein fouet par la crise du Covid, avec une perte drastique de son activité en 2020 et 2021, la cidrerie a cherché à se diversifier. Il faut rendre à César ce qui appartient à César : l’idée de la farine de pommes ne leur appartient pas.
Elle est déjà produite en Normandie depuis l’année dernière par une coopérative à Epaignes (27).
J’ai rencontré une Ardéchoise qui m’a amené du marc de pommes pour faire des gâteaux comme on faisait traditionnellement après la presse en Ardèche. La première idée c’était le marc frais mais c’était très compliqué, puis est venue l’idée de déshydrater.
Marie-Paule Leblanc, présidente de l'association les 3 Pommes épagnoles à Epaignes.
Une bonne idée qu’il a fallu travailler et maîtriser. Un cidriculteur ne s’improvise pas meunier du jour au lendemain. « On ne peut pas transformer tout le marc en farine, explique Alain Pismont, de la cidrerie du Père Mahieu. Nous faisons une sélection, pour avoir une farine de qualité constante. »
Farine de pommes : le goût de la Normandie
Une fois broyé dans la meule, le marc séché se transforme en une poudre de couleur ocre. La farine de pomme est très appréciée aux Etats-Unis pour son goût naturellement sucré, mais aussi parce que c’est une farine sans gluten ! Elle peut donc faire le bonheur des gourmets allergiques ou intolérants aux céréales.
Et on peut faire de bons gâteaux avec cette farine, c’est en tout cas ce que veut montrer la coopérative d’Epaignes avec des palets normands, des petits biscuits fabriqués avec sa fari’pommes et du beurre normand.
Sur le site de la coopérative, on trouve des recettes à base de farine de pommes : muffins, fondant au chocolat, gâteau vanille –rhum… et pourquoi ne pas remplacer la farine de blé par celle de pommes pour faire de bonnes crêpes normandes !
Encore confidentielle mais pleine de potentiel, vous pouvez trouver la fari’pommes à la coopérative, et dans quelques épiceries autour d’Epaignes (27). La cidrerie du Père Mahieu projette quant à elle d’en produire 5 tonnes par an, et de les mettre en vente chez des restaurateurs et des magasins bio du Cotentin.