Le procès de l'ancienne édile de Canteleu, Mélanie Boulanger et de son adjoint au commerce, Hasbi Colak, dans le cadre du vaste trafic de stupéfiants, touche à sa fin. L'ex maire a été relaxée.
Au tribunal de Bobigny, le procès du vaste trafic de stupéfiant à Canteleu s'achève ce jeudi 4 juillet 2024. Le tribunal a rendu son délibéré, un peu après 13 heures.
C’est l’épilogue d’un procès hors norme, aux multiples rebondissements, impliquant deux élus de la République - l'ex maire de la commune, Mélanie Boulanger (PS) et son ancien adjoint au commerce, Hasbi Colak - et 16 autres prévenus du clan Meziani.
Mélanie Boulanger relaxée
Les deux élus étaient soupçonnés d’avoir été complices du trafic de drogue qui sévit à Canteleu. Mélanie Boulanger, 47 ans, a été relaxée des faits qui lui sont reprochés.
Le tribunal a considéré qu'elle avait livré plusieurs informations confidentielles à son ancien adjoint mais aucun acte, dans ce dossier, n'a permis de prouver une quelconque complicité de Mélanie Boulanger.
À la sortie du tribunal, elle s'exprime pour la première fois publiquement, depuis octobre 2021.
J'ai tout perdu dans cette affaire, j'ai perdu 33 mois de ma vie, j'ai perdu mon goût de me donner à la chose publique par un mandat... Mais j'ai retrouvé mon honneur et justice a été rendue. Je suis soulagée au moment où je vous parle.
Mélanie Boulanger, ex maire de Canteleu
Celle qui clamait à corps et à cri son innocence est émue. L'élue socialiste, qui a démissionné en février du mandat qu'elle détenait depuis 2014, annonce qu'elle arrête définitivement la politique et confie avoir vécu un enfer pendant 33 mois avec les médias et les réseaux sociaux. "J'ai été suivi par des paparazzis", assure-t-elle.
Voici son interview :
Son avocat, M e Arnaud de Saint-Rémy, est évidemment satisfait. "Enfin, le cauchemar se termine", assure-t-il. Avant de dénoncer un dossier " beaucoup fantasmé" dans les médias.
Écoutez-le au son du micro de Véronique Arnould :
Une décision saluée par le maire socialiste de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, qui l'a toujours soutenue. "Son honneur avait été jeté aux chiens. Il est aujourd'hui lavé. Justice est rendue, mais Mélanie a vécu l'enfer. Je suis fier d'avoir toujours soutenu et d'être l'ami d'une grande élue, sincère, exemplaire. Quant aux chiens, qu'ils se regardent dans une glace", écrit-il sur X.
Son honneur avait été jeté aux chiens. Il est aujourd'hui lavé. Justice est rendue, mais Mélanie a vécu l'enfer. Je suis fier d'avoir tjrs soutenu et d'être l'ami d'une grande élue, sincère, exemplaire. Quant aux chiens, qu'ils se regardent dans une glace.https://t.co/h0ChqaGDR5
— Nicolas Mayer-Rossignol (@NicolasMayerNMR) July 4, 2024
En revanche, Hasbi Colak, lui, a été condamné à 12 mois de prison avec sursis et l’interdiction d’être élu pendant cinq ans.
"Le tribunal considère que vous aviez parfaitement connaissance du groupe délinquant que vous côtoyiez et le prêt d'un véhicule à deux personnes qui ne sont pas amies, aurait dû vous conduire à réagir", indique le tribunal. "En ne dénonçant pas des faits pénaux, vous manifestez votre volonté de ne pas vous opposer aux trafiquants", ajoute le tribunal.
Des réquisitions "sévères"
Pour rappel, la procureure avait requis à l’encontre de l’ancienne maire un an d’emprisonnement avec sursis, et 18 mois avec sursis pour son ancien adjoint.
S’y ajoutaient 10 000 euros d’euros d’amende et l’interdiction d’être élu pendant cinq ans pour tous les deux.
Des réquisitions qui avaient été jugées "sévères" par leurs deux avocats qui avaient plaidé pour la relaxe totale de leurs clients.
"Mélanie Boulanger a amplifié l’armement de la police municipale, elle a été la première à faire installer des caméras de vidéoprotection", avait appuyé son avocat, Arnaud de Saint-Rémy. Il a aussi pointé un manque de soutien de l’État quand Mélanie Boulanger demandait plus de moyens.
Hasbi Colak était "l’adjoint du quartier qui savait parler les deux langues", celle des trafiquants avec qui il a grandi, et des élus, défend son avocat, M e Jérémy Kalfon. Une position ambiguë aux yeux de la loi.
Quelles condamnations pour les trafiquants ?
Pour les trafiquants de drogue, les peines sont plus lourdes. Aziz Meziani a été reconnu coupable de tous les faits qui lui sont reprochés, il a été condamné à 10 ans de prison avec un mandat d’arrêt décerné, deux millions d’euros d’amende. Interdit de séjour en Seine-Maritime et en Seine-Saint-Denis pendant dix ans. Il a également interdiction de porter une arme pendant cinq ans. Il était absent de son procès, il est recherché au Maroc.
Fouzia, la sœur des Meziani, est condamnée pour détention de stupéfiants mais relaxée pour offre ou cession. Elle a été reconnue coupable pour association de malfaiteurs et refus de répondre à une question incriminante. Elle est condamnée à une peine de trois ans de prison dont un avec sursis, 50 000 euros d’amende avec interdiction de paraître en Seine-Maritime pendant cinq ans.
Le cas de Montacer Meziani sera jugé en novembre prochain, pour des raisons de santé.
Pour les petites mains des Meziani, on retiendra les deux peines les plus lourdes pour les "lieutenants" de la famille.
Camel B. a été reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés. Il est condamné à huit ans de prison avec une amende de 200 000 euros. Il est interdit de séjour en Seine-Maritime pendant cinq ans.
Mohamed M., un autre des lieutenants des Meziani, a été reconnu coupable et également condamné à huit ans de prison avec 300 000 euros d’amende et interdit de paraître en Seine-Maritime pendant cinq ans.