La Coordination rurale (CR) appelle à manifester à partir de ce dimanche 5 janvier. Des dizaines de tracteurs devraient prendre la direction de Paris. Quel dispositif ? Quels objectifs ? Amélie Rebière, vice-présidente nationale du syndicat et éleveuse en Corrèze, nous répond.
Amélie Rebière, présidente de la Coordination rurale (CR) en Corrèze et également l'une des vice-présidentes du syndicat national, a été reçue sur le plateau d'ICI 19/20 Limousin, ce samedi 4 janvier.
Quelle organisation ?
Aucune mobilisation ne se fera en région, confirme l'agricultrice. Concernant le déplacement d'agriculteurs sur Paris : "Les tracteurs du Limousin n'iront pas à Paris. On s'est justement organisé pour que les tracteurs fassent le moins de route possible, parce que cela représente un coût. Ce sont surtout des tracteurs qui viendront d'Ile-de-France, de départements limitrophes. Mais les Limousins viendront en renfort, en train, en bus ou en voiture."
"Il ne s'agit pas de bloquer les Parisiens, ni les Franciliens"
La CR est le seul syndicat à avoir lancé cet appel à la mobilisation. Depuis la première mobilisation d'ampleur en janvier 2024, la Coordination rurale estime que les revendications n'ont pas été entendues. L'heure est donc aux actions. "Il ne s'agit pas de bloquer les Parisiens, ni les Franciliens. Ce que nous voulons, nous, c'est monter à Paris pour exprimer notre désarroi et notre colère. Cela fait un an qu'on nous balade, ça fait un an qu'on nous promet des choses qu'on ne voit pas au fond de nos fermes", explique Amélie Rebière.
Au bout d'un moment, il faut aller demander des comptes aux gouvernements qui se succèdent. On a changé de Premier ministre, mais on a toujours la même ministre de l'Agriculture qui est au fait des problèmes agricoles. On veut des garanties.
Amélie RebièreVice-présidente de la Coordination rurale, présidente de la CR19
Crise sur crise dans le monde agricole
De plus, l'année 2024 a été particulière rude pour le monde agricole qui a enchaîné les crises, ce qui n'a fait qu'aggraver, selon la syndicaliste, la situation des agriculteurs : "S'ajoute à cela, la crise sanitaire au niveau de l'élevage, avec FCO (Fièvre catarrhale bovine) et la MHE (maladie hémorragique épizootique), s'ajoute une mauvaise récolte. Il ne faut pas oublier que les éleveurs sont en polycultures : ils font leurs céréales, leurs maïs, pour nourrir leurs bétails, et c'est environ 30% de récolte de moins cette année. Donc la crise est aggravée et nous n'avons toujours pas de réponse du gouvernement", martèle Amélie Rebière.
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Cette nouvelle mobilisation s'inscrit dans un contexte d'élection dans les chambres agriculture, dont la campagne démarre le 7 janvier. Elle pourrait être un moyen d'appuyer la candidature du syndicat, même si la présidente préfère nuancer : "Il ne faut pas exagérer : ça fait un moment qu'on est en crise agricole. Il faut croire que les autres syndicats trouvent que tout va bien. Nous, on voit que la crise d'approfondie, forcément, on se remobilise, se justifie la syndicaliste. Lors de la campagne, il y aura une réserve au niveau du gouvernement et des administrations, ce qui fait qu'on n'aura pas d'interlocuteurs en face pendant toute la campagne."
La chambre d'agriculture nous permettra d'avoir un pouvoir local, de pouvoir vraiment aider les agriculteurs et d'arrêter ce sectarisme qui nous tue tous à petit feu.
Amélie Rebièreprésidente de la CR19
La Coordination Rurale est connue pour ces actions jugées parfois "trop musclées" et certains craignent des débordements. Le syndicat avait notamment dégradé le bâtiment de l'OFB de la Creuse en novembre dernier. Mais, Amélie Rebière rappelle : "La violence, elle est dans nos fermes, il ne faut pas oublier le nombre de suicides par an dans le monde agricole, il ne faut pas oublier qu'il y a plus de 30% des exploitations agricoles qui sont en grave difficulté financière."
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