Le directeur de l'ARS Benoît Elleboode a annoncé des mesures et un budget exceptionnel pour rénover en profondeur le service des urgences de Périgueux et mettre fin à une situation "critique". Les urgentistes périgourdins voient le bout du tunnel.
Dix-neuf millions pour reconstruire totalement le bâtiment des urgences et le service de régulation du SAMU, deux millions pour s'équiper correctement : la somme peut paraître considérable, elle est pourtant nécessaire pour remettre en état un service et des équipes à bout de souffle.
Plus de 19 millions d'euros
Cette somme a été annoncée ce mardi 10 décembre, par directeur de l'ARS, Benoît Elleboode, lors d'une visite à Périgueux. Concrètement, il s'agit de 19,487 millions d'euros, prélevés sur les crédits du Ségur de la Santé, des fonds européens et des crédits figés qui ne devraient donc pas souffrir d'un éventuel réajustement budgétaire du gouvernement. À charge pour l'hôpital de Périgueux de trouver la somme restante, soit 1,5 million d'euros, sous forme de crédit notamment.
L'annonce qu'a fait le directeur général de l'ARS semble montrer qu'il a compris la gravité de la situation. Ça nous donne une bouffée d'oxygène et des perspectives pour l'avenir.
Benjamin Salez,Responsable du service urgences de l'hôpital de Périgueux
Le "ouf" des urgentistes
Face à ces annonces, les urgentistes se disent "très satisfaits des annonces" et des perspectives qu'elles laissent entrevoir. "Déjà, il y a le nouveau service des urgences qui était un frein à l'attractivité. Pour ce qui est du territoire, il laisse un peu les coudées franches aux directions de proposer des contrats intéressants pour pouvoir regonfler nos effectifs. C'est une lueur d'espoir pour l'avenir", se réjouit Benjamin Salez, chef du Samu à l'hôpital de Périgueux.
Il faut dire qu'il y avait urgence à sauver les urgences. Chaque année, 45 000 patients font appel à ce service de l'hôpital de Périgueux. Un chiffre qui n'est stable que parce que les urgences ont progressivement limité leurs admissions aux cas les plus sévères.
Les locaux inadaptés, les délais de prise en charge interminables, les brancards dans les couloirs, l'épuisement des personnels, le manque de médecins, les situations critiques aux urgences de Bergerac et Sarlat qu'il avait fallu épauler, avaient conduit les urgentistes à se mettre en grève fin octobre dernier, ou plutôt en "arrêt maladie" pour une majorité d'entre eux. L'ARS reconnaissant "une situation de crise aiguë" s'était vue contrainte d'activer alors le plan blanc et d'entamer le dialogue rapidement.
De l'argent pour trouver des médecins
Cette situation de crise qui dure depuis des années n'avait pas non plus motivé les urgentistes remplaçants à se précipiter à Périgueux. D'autant moins que depuis la loi RIST de 2023 qui plafonne les salaires des intérimaires, l'hôpital n'avait plus la possibilité de les inciter financièrement.
Là aussi, l'ARS a tranché pour revenir rapidement à un fonctionnement normal. Trois urgentistes, dont deux qui étaient déjà planifiés pour arriver en janvier 2025, auront droit à un salaire plus élevé grâce à des contrats CDD exceptionnels "de type 2" prévus pour ce genre de situation. Des CDD pouvant durer trois ans et reconductibles. Leur rémunération pourra s'élever jusqu'à 10 000 euros bruts par mois.
On sait que si on en fait venir un ou deux, si le bouche-à-oreilles est bon, ça peut en faire venir dix par la suite.
Benjamin Salez, chef du Samu de l'hôpital de Périgueux
Sous réserve que ces renforts arrivent effectivement et qu'il n'y ait pas de défection dans les rangs des titulaires, les plannings devraient permettre d'assurer les permanences sur les trois centres hospitaliers de Périgueux, Sarlat et Bergerac pour la période des fêtes.
L'amélioration, déjà prévisible sur ces prochaines semaines, les perspectives d'un service rénové et doté d'un personnel suffisant, pourrait motiver d'autres urgentistes à poser leurs candidatures. C'est du moins ce qu'espèrent l'ARS et la direction de l'hôpital qui dans la foulée vont également lancer une campagne de communication à hauteur de 50 000 euros pour trouver ces fameux candidats urgentistes."Le fait de communiquer sur le service dans le département et dans des régions qui sont un peu mieux pourvues que les nôtres, ça pourrait faire venir quelques médecins. Ça vaut le coup de communiquer, on sait que si on arrive à en accrocher un ou deux, on en accrochera une dizaine par la suite," explique Benjamin Salez.
L'objectif serait d'atteindre une dizaine de recrutements d'ici à 2026 afin de stabiliser définitivement le service. "On commence à avoir des gens qui commencent à se manifester depuis qu'on a eu ces annonces-là, on voit déjà un petit progrès", ajoute prudemment l'urgentiste.
Calendrier des travaux
Reste qu'il faudra un certain temps pour parvenir à cette stabilité attractive. Si les médecins recrutés en CDD peuvent arriver rapidement, les travaux, eux, ne devraient commencer qu'à la fin 2026 et s'étaler pendant quatre ans.
Il s'agit d'en finir avec un site qui ne date que de 2010, mais qui avait été "mal pensé", n'était pas fonctionnel et n'était plus du tout au standard des services d'urgence actuels. De ce fait, il aggravait les conditions de travail et d'accueil des patients, déjà difficiles.
Le futur bâtiment des urgences devrait prendre la place de l'ancien Institut de Formation des Infirmières, en bordure de la Départementale 8 qui longe l'hôpital. Un bâtiment inoccupé depuis le transfert, en 2021, de l'ISFI vers le campus de Périgueux.