Le maire d'Ustou en Ariège, Alain Servat, a interdit ce jeudi la randonnée sur une portion du massif communal invoquant un danger pour l'homme. 4 ours se sont approchés à plusieurs reprises d'un troupeau de brebis. La préfète d'Ariège a déclenché le protocole "ours à problème".
4 ours ont approché à plusieurs reprises un troupeau de brebis sur une estive située à Ustou en Ariège, dans la nuit de mercredi à jeudi. Le groupement pastoral a décidé de porter plainte contre l'Etat pour mise en danger de la vie d'autrui. La randonnée a été interdite sur une partie de la commune.
Il était environ 21 heures, explique un éleveur du Groupement Pastoral du col d’Escots. A cette heure là, il ne fait pas encore nuit, fait-il remarquer. La bergère qui s’occupe du troupeau était en train de regrouper les bêtes quand une ourse a surgi avec ses deux oursons. Elle devait être à quelques dizaines de mètres, précise-t-il. La bergère s’est réfugiée derrière un rocher. Elle alerte ensuite la brigade d’effaroucheurs car sur cette estive la préfète a autorisé des tirs d’effarouchement.La brigade est composée de deux personnes de l’OFB (Office Français de la Biodiversité). Elles campent près de la cabane de la bergère, à proximité du troupeau. Par deux fois dans la nuit, selon l’éleveur, les agents de l’OFB ont procédé à des tirs d’effarouchement. Apparemment, selon lui, sans résultat puisque les ours ont continué à s’approcher du troupeau. Grâce à une caméra à vision nocturne, ils auraient compté 4 ours.
Le groupement pastoral du col d’Escots a décidé de porter plainte contre l’Etat pour mise en danger de la vie d’autrui. "On veut marquer les esprits et franchir des étapes dans la mise en lumière de la responsabilité de l’Etat", explique l’éléveur.
Nous n’acceptons pas que, par manquement de l’Etat, on puisse risquer la vie d’une salariée
Alain Servat, le maire d’Ustou a pris un arrêté municipal pour interdire la randonnée dans le secteur du cirque de Cagateille. "Je ne veux pas prendre la responsabilité de laisser monter les gens sur un secteur où il y a 4 ours," explique-t-il.
Le maire de la commune d’Ustou n’est pas étonné de ce qui s’est passé la nuit dernière.
On le dit depuis des années et depuis le début de la saison encore. On est déjà à 80 bêtes mortes sur ce secteur et je ne serai pas étonné si on me dit demain que des randonneurs ont été attaqués. Une femelle ourse elle défendra ses petits.
"On est désespérés, la situation, on la dénonce depuis des années mais il y a des gens qui n'entendent pas. Un jour on arrivera à une catastrophe. Je peux vous dire que la bergère, la pauvre, elle a trouvé la nuit longue". La bergère est âgée de 38 ans, elle compte environ 10 ans d’expérience dans ce métier, dans les Alpes plus particulièrement. L’éleveur nous indique qu’elle ne souhaite pas s’exprimer.
La nuit prochaine, elle sera encore sur l’estive accompagnée par un berger d’appui mais les agents de l’OFB sont repartis. "On a tiré la sonnette d’alarme et on attend que l’Etat mette vraiment les moyens", explique l’éleveur. "Notre priorité au départ c’est la protection des bêtes mais on doit aussi prendre la mesure du danger pour notre salariée", dit-il.
"La bergère est choquée et elle se pose des questions. Elle a bien vu l’ourse, elle se rend compte qu’elle n’est pas en face d’animaux craintifs".
L'ASPAP, Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Ariège-Pyrénées, opposée à la réintroduction des ours dans les Pyrénées, a réagi sur les réseaux sociaux évoquant "une nuit de terreur".
Le protocole "ours à problème" déclenché
La préfète de l'Ariège, Chantal Mauchet, a dans la foulée du maire d'Ustou déclenché le protocole "ours à problème", ouvrant au renforcement des moyens face aux prédateurs. La préfecture a confirmé dans un communiqué que des agents de l'OFB avaient procédé dans la nuit du 15 au 16 juillet à "une opération d'effarouchement renforcé" sur l'estive concernée. Cette opération n'a pas permis "de mettre en fuite" un groupe de quatre plantigrades, "une ourse accompagnée de deux oursons et un ours mâle subadulte" qui séjournent dans le secteur, a précisé la préfecture. Dès la nuit de jeudi, des agents de l'OFB "seront mobilisés en urgence pour poursuivre les opérations d'effarouchement renforcé", puis à partir de vendredi et jusqu'à dimanche "des bergers d'appui de la Pastorale pyrénéenne, une association au service des professionnels du pastoralisme sur le massif pyrénéen, mèneront des nouvelles surveillances de nuit".L'association Pays de l'ours-Adet qui milite pour la sauvegarde de l'ours brun dans les Pyrénées a réagi ce vendredi. Elle estime que l'Etat devrait "se concentrer sur les conséquences plutôt que sur les causes du problème". Selon Pays de l'ours-Adet, "les prédations ne procèdent pas d'un comportement problématique des ours qu'il faudrait corriger, mais de l'extrême vulnérabilité de certains troupeaux laissés sans réelle protection".En Ariège, la tension est vive sur la question de l'ours. De nombreux éleveurs sont opposés au plan de réintroduction mis en place depuis plusieurs années pour assurer la sauvegarde de l'espèce. Un ours a été retrouvé mort tué par balles au début du mois de juin. Une enquête est toujours en cours.