Samedi 23 avril, des orages de grêle ont traversé une partie de la région. En faisant parfois de gros dégâts sur les cultures. Chez les viticulteurs de l'Aude ou encore chez les maraîchers des Pyrénées-Orientales.
"Ca a tapé fort, sur une zone assez large" : à ce stade, trois jours après les orages, Frédéric Rouanet ne peut que constater les dégâts. Le président du syndicat des vignerons de l'Aude est en contact avec de nombreux producteurs dont les vignes ont été touchées par la grêle samedi 23 avril. Mais comme toujours avec ces épisodes climatiques, le bilan sera difficile à réaliser.
"C'est très compliqué à estimer. Il y a des parcelles très touchées, à 60 ou 70% et d'autres, voisines, qui ont été complètement épargnées", constate Philippe Coste, le président du cru Minervois. "Les grêlons n'étaient pas très gros. Mais il y avait des vents forts qui ont tourné. Et c'est tombé dru". Et effectivement les images partagées ce samedi sur les réseaux sociaux ne témoignent pas de grêlons exceptionnels, mais de précipitions malgré tout assez intenses.
Un état des lieux plus précis est en cours de réalisation par les techniciens de la chambre d'agriculture de l'Aude. De nombreuses zones ont été traversées par cet orage de grêle. Notamment le Minervois (les communes de Peyriac-Minervois, Trausse ou la Livinière, liste non exhaustive), les environs de Carcassonne (Arzens, Sainte-Eulalie, Trèbes, Ventenac, Pennautier, etc.) ainsi que le Val-de-Dagne (Pradelles-en-Val, Moux ou Barbaira). Mais aussi des zones de l'ouest audois, dans une moindre mesure, comme Bram ou Alzonne. Le vignoble autour de Limoux aurait été épargné.
Autre zone touchée, l'étang asséché de Marseillette, qui abrite de nombreux arboriculteurs. Mais d'après Philippe Luc, qui exploite 20 hectares de pommiers à Aigues-Vives, les dégâts sont modérés sur ses arbres : "On trouve quelques impacts ici ou là mais ça ne devrait pas avoir d'incidences sur la récolte. On n'a même pas encore commencé à éclaircir (ndlr : opération qui consiste à tailler les arbres et à supprimer une partie des fruits en formation pour choisir les plus prometteurs.)"
Un épisode de grêle précoce
Mais la précocité de l'épisode a marqué l'arboriculteur : "En 2014, on avait eu un premier épisode de grêle précoce, le 22 mai. Depuis, j'essaie de monter mes filets anti-grêle pour cette période. Mais là, on en avait déployé que deux hectares, sur les vingt de l'exploitation. De la grêle si tôt dans l'année: c'est une première, je n'ai jamais vu ça !"
Même constat dans le département voisin des Pyrénées-Orientales, pas épargné non plus par cet orage de grêle. Même si, d'après Eric Hostalnou, le responsable "fruits et légumes" à la Chambre d'agriculture des Pyrénées-Orientales, les dégâts semblent surtout localisés sur la plaine littorale. Et plus particulièrement la zone de la Salanque, au Nord-Est de Perpignan, entre Toreilles et Claira. De nombreux maraîchers et arboriculteurs sont installés dans cette zone. Et des dégâts ont pu être constatés sur les artichauts et sur les abricotiers, dont les jeunes fruits ont été abimés par les grêlons.
Avec là encore une aggravation des conséquences pour les producteurs, en raison de la précocité de cet épisode de grêle : "La plupart des producteurs d'artichauts ne sont pas assurés. Leurs produits se récoltent au printemps, jamais ils n'auraient imaginé avoir un épisode de grêle à cette saison," explique Eric Hostalnou de la Chambre d'Agriculture des Pyrénées-Orientales. Là non plus, il n'est pas encore possible de donner une estimation des surfaces concernées.
Des conséquences économiques encore difficiles à chiffrer
Mais cet épisode de grêle constitue une épreuve de plus pour des professions durement touchées cette année par les hausses de prix, du carburant, des engrais ou des produits phytosanitaires. Avec des pertes de rendement à prévoir pour les vendanges 2022 : "Les zones où les rameaux ont été complètement hachés vont peut-être repartir, mais en feuillage, pas en fruit," détaille Elodie Vergnettes, responsable du pôle viticulture à la Chambre d'Agriculture de l'Aude. Qui poursuit, prudente : "Les moins touchés n'auront peut-être pas trop d'impact sur leurs vendanges mais la saison est encore longue."
L'épisode ne sera pas donc pas sans conséquence pour les agriculteurs touchés : la grêle est "assurable" par les compagnies d'assurance. Et les agriculteurs ne pourront donc pas compter sur le dispositif national prévu pour les "calamités agricoles", qui n'est mobilisable que pour les risques non assurables. Mais peu d'agriculteurs sont assurés contre ce risque, car cela coûte cher. Et les conditions de remboursement ne sont pas toujours jugées intéressantes par les professionnels au regard des cotisations élevées. Et ce coup dur intervient dans un contexte déjà défavorable : après les deux années de crise sanitaire, les viticulteurs audois et les arboriculteurs catalans avaient connu un épisode de gel tardif en avril 2021.