Les avocats d'Abdelkader Merah qui ont plaidé ce mardi après-midi ont démonté le dossier d'accusation, pièce par pièce, et réclamé l'acquittement.
L'équipe des avocats d'Abdelkader Merah a demandé mardi l'acquittement de son client devant la Cour d'assises spéciale de Paris qui juge les complices présumés de Mohamed Merah.
Ces plaidoiries interviennent au lendemain d'un réquisitoire très sévère de la part de l'avocate générale Naïma Rudloff, qui a demandé la réclusion criminelle à perpétuité pour Abdelkader Merah avec une peine de sureté de 22 ans et 20 ans de prison pour l'autre accusé Fettah Malki.
C'est Maître Archibald Celeyron qui s'est exprimé le premier. Dans une plaidoirie de plus de deux heures, il a démonté un à un les arguments de l'accusation, passant notamment beaucoup de temps à démontrer que toute l'accusation repose sur le vol du scooter le 6 mars 2012 : "Abdelkader Merah risque la perpétuité pour un scooter qu'il n'a jamais touché !".
Il a longuement détricoté les fils de l'accusation et a conclu par ces termes, s'adressant à la Cour :
Ce que vous allez faire, c'est que vous faites tous les jours, rendre justice et appliquer le droit dans le respect de nos règles. Et parce que vous allez appliquer le droit, vous allez acquitter Abdelkader Merah
La parole était ensuite à Maître Antoine Vey. Après une longue plaidoirie sur l’histoire de l’évolution des lois antiterrorristes en France et ailleurs, le jeune associé d'Eric Dupond-Moretti s'est appliqué à démonter l'accusation d'association de malfaiteurs terroriste criminelle. "Il faudrait condamner Abdelkader Merah par la preuve du vide, a-t-il notamment formulé. L'association de malfaiteurs, elle existe quand il s'agit d'avoir une action judiciaire avant le passage à l'acte. Surtout, rien dans le dossier et dans nos débats ne montre que mon client appartenait à aucun groupe affilié à Al Qaïda, qu'il appliquait les conseils de cette organisation ni à lui, ni à son frère et qu'il ne lui a pas apporté de soutien logistique".
"Si Abdelkader Merah appartient à un groupe, demande-t-il, pourquoi les autres, ceux d'Artigat, Abdelghani qui a vu l'arme de son frère, ne sont-ils pas dans le box ? Le dossier, nos débats, ont montré que Mohamed Merah avait une autonomie totale : il voyage seul, se rend seul au Pakistan, est le seul connu des services de renseignements..."
Et même les fichiers d'Al Qaïda retrouvés sur des supports numériques chez Abdelkader Merah ne fondent pas en droit, selon l'avocat, des éléments de l'association de malfaiteurs. "Ces fichiers, dit l'avocat, Mohamed Merah ne les a sans doute pas lu et n'en a même sans doute jamais entendu parler".
L'avocat est également revenu sur la qualification de "mentor" de son frère porté contre Abdelkader Merah : "Personne n'a jamais été condamné en France pour avoir été un référent religieux". Et il remet en cause ce statut de réferent religieux de son client.
Avant de conclure avec ces propos qui déclenchent la colère des familles des victimes :
Ne faites pas un symbole du terrorisme, faites un symbole de la justice (...) C'est l'honneur des juges d'acquitter un innocent
C'est enfin Maître Eric Dupont-Moretti qui plaide en dernier. Et n'économise pas ni les avocats des parties civiles, ni l'avocate générale. Mais, passant derrière ses collaborateurs qui ont décortiqué le dossier, il ne rentre pas dans les détails mais assène des coups aux autres parties.
"L’axiome c’est ce qui ne se démontre pas, explique Maître Dupond-Moretti. Ou plutôt ce dont on ne peut pas démontrer le contraire. On lui dénie toute humanité. Ici, il est son frère, cribblé de balles".
Avant d'affirmer devant la Cour :
Si Abdelkader Merah est ici, c’est parce que son frère est mort. Si Mohamed Merah était dans le box il y serait seul.
"Il n'y a rien dans le dossier, affirme Dupond-Moretti, rien dans la préparation des crimes, rien avant, rien après".
Avec son style très personnel, l'avocat a manié l'ironie : "Abdelkader Merah est le terroriste le plus con de la planète : il parle spontanément du vol du scooter aux policiers, il met la facture du blouson à son nom, il conserve les fichiers d'Al Qaïda sur son ipod. Il voit son frère au foot au, puis au resto le 15".
Si les règles qui sont les notres n’ont plus cour alors le terrorisme a gagné. Si vous condamnez Abdelkader Merah, vous aurez jugé mais vous n'aurez pas rendu justice. La justice sera morte ou gravement blessée et nous serons couchés.
Le matin, c'est la défense de Fettah Malki qui a plaidé. Pour Maître Etelin, si l'accusé a bien fourni arme, munition et gilet pare-balles à Mohamed Merah, il ignorait tout de ses funestes projets et est "étranger au terrorisme". Il a demandé une "peine juste" pour son client.
