Clients, réparateurs et vendeurs expliquent l'engouement pour le vélo à Toulouse depuis le déconfinement

Aide financière de 50 euros de la part de l'Etat pour réparer son vélo, création de nouvelles pistes cyclable à Toulouse... Les professionnels de la bicyclette et leurs clients racontent pourquoi il y a un engouement pour ce deux roues depuis le déconfinement.

Se déplacer à bicyclette. Voilà l'une des résolutions adoptées par une partie des toulousains depuis la crise sanitaire liée au coronavirus. En cette période de déconfinement, le vélo devient un "geste barrière à part entière", souligne la chargée de communication de l'association Vélo et territoires. En collaboration avec le ministère de la Transition écologique et solidaire, l'organisme publie des chiffres de fréquentations révélateurs de cette tendance en constante augmentation. Le premier weekend du déconfinement les vélos étaient deux fois plus nombreux que l'année dernière à la même période.
 

Retrouvez ici les chiffres clés évalués par Vélo et territoires


Au centre ville de Toulouse, rue Alsace Lorraine ou encore dans le quartier de Patte d'Oie, les cyclistes se font voir ce mercredi 20 mai :
 

Autre indicateurs : l'association 2 pieds 2 roues rapporte recevoir des demandes d'adresse pour apprendre à faire du vélo. La seule structure qui le propose, La maison du vélo, est déjà complète jusqu'au début du mois de juin pour les cours individuels, et jusqu'à la fin de l'été pour les cours collectifs.

"On évalue à 10% le nombre de Français qui ne savent pas faire du vélo", indique Mathilde Duran, responsable de la vélo-école toulousaine. "Mais il y a un tabou, les gens n'osent pas le dire", remarque-t-elle. Et il y a aussi ceux qui prennent des cours pour apprendre les bons gestes en ville, ou maîtriser leur trajet pour se rendre sur leur lieu de travail. "60% de la population n'ose pas pédaler en ville" fait savoir Mathilde Duran. Pour tous ceux-là, depuis le déconfinement l'Etat offre une aide financière de 45 euros à dépenser pour des "cours de remise en scelle" dans les vélo-écoles référencées.


Les ventes explosent

A Toulouse, la majorité des commerçants de vélo affirment que les ventes explosent. Et ce, même dans les boutiques haute-de-gamme comme Cité 2 roues. Le gérant Laurent Soula, explique avoir doublé son chiffre d'affaire ces quinze premiers jours de mai. A l'année, il vend environ 700 vélos. Il en a vendu une cinquantaine en une semaine, celle du déconfinement. Bonne nouvelle donc, mais le magasin doit désormais doubler ses capacités de travail. 

Ce serait magique s'il n'y avait que des vélos ordonnés et des piétons dans l'hyper-centre. Pour vivre, pour le bien être, pour entendre les oiseaux et éviter toutes ces voitures et cette pollution, précise Laurent Soula.

Ecoutez-le, ainsi que l'un de ses clients, venu offrir un vélo à sa femme ce jour-là :


Nouvelles pistes cyclables

En début d'après-midi, ce mercredi 20 mai, une femme en tablier nettoie la vitrine d'une boutique toulousaine de l'avenue de Grande Bretagne. A l'intérieur, à droite de l'entrée, un jeune homme est en train de faire tourner les roues d'un vélo suspendu à l'envers. A côté de lui, à la caisse, c'est Camille Chalain, l'un des propriétaires de Mécanicycle. Il remarque un nombre accru de vélocistes devant sa boutique. Il y a non seulement ceux qui viennent faire réparer leur deux roues, mais il y a aussi ceux qu'il voit défiler sur les toutes nouvelles pistes cyclables du quartier. 
 
La mairie a aménagé 10 kilomètres de pistes de circulation pour les vélos à la fin du mois d'avril dans la ville, en commençant par le quartier Saint-Cyprien. Les bicyclettes peuvent désormais rouler tout à fait à droite de la route, là où elle est la plus abîmée et où les camions s'arrêtent le temps de leur livraison. Mais "les pistes ont vocation à être améliorées" assure Jean-Michel Lattes, président de Tisséo et premier adjoint en charge des déplacements. Il fait savoir ses intentions : 

On voulait éviter que les personnes inquiètes basculent du transport en commun à la voiture individuelle. (...) L'enjeu est que ces pistes provisoires se pérennisent. C'est ce qu'on appelle de l'urbanisme tactique : on profite d'un évènement qui bouleverse nos façons de penser.

Et de détailler : "Il y a le monde d’avant et le monde d’après. On a vraiment le sentiment que sur beaucoup de sujets comme les moyens de déplacement doux (marche et vélo), ou encore la manière de consommer (produits locaux), on sent que la société a bougé".  Une deuxième tranche de pistes cyclable est prévue pour la fin du mois de mai, et une troisième cet été. Cela suffira-t-il à faire remonter Toulouse, 8e dans le baromètre des villes cyclables ? "Jean-Luc Mouden se réveille depuis le Covid-19, il n'avait pas fait grand chose depuis 6 ans" pense Guillaume Crouau, président de l'association 2 pieds 2 roues. Il salue ces mesures "qu'on n'imaginait pas il y a encore deux mois". Pour lui, il faut maintenant réfléchir à une "zone qualitative" de rencontre entre piétons et vélos.

Pour Camille Chalain, réparateur, il faudrait aussi faire quelque chose au sujet des vols de vélo, "un gros frein pour les gens". Il fait remarquer que ces travaux ne font qu'avancer de quelques années un projet qui devait de toute façon se concrétiser. 

Une prime de 50€ pour réparer son vélo...


Si la boutique de Camille Chalain était d'abord spécialisée en dépannage à domicile, elle stock désormais une trentaine de vélos qui seront réparés sur place. Voilà un secteur d'avenir. Depuis quelques années l'engouement pour la bicyclette ne cesse de croître, remarque Camille. A force de recevoir une centaine d'appels par jour, le réparateur s'est retrouvé complet jusqu'au mois de juillet. Il a même fini par se retirer momentanément de la liste de Coup de pouce vélo. C'est sur ce site internet que sont répertoriés les spécialistes chez qui l'on peut bénéficier d'une aide financière de 50 euros accordée par l'Etat pour faire réparer sa bicyclette.  Une aubaine pour Mécanicycle, dont le panier moyen s'élève à une cinquantaine d'euros. Un coup de pouce pour les mécaniciens de la bicyclette donc, avec quelques bémols. Concrètement, les clients ne doivent payer que les taxes et le reste à charge. Les réparateurs se font rembourser par l'Etat... au bout de quelques semaines. Pour l'heure, les boutiques qui ont rouvert le 11 mai n'ont toujours rien reçu. Et avec deux mois de confinement, les trésoreries ne sont pas forcément au rendez-vous pour tout avancer. Elles doivent aussi passer une quinzaine de minutes par vélo, pour remplir justificatifs, informations et photos sur internet. Ecoutez le gérant de La bicyclette verte, Eric Fontaine suivi de Camille Chalain :
 

... qui attire grandement


Quand Yoann, agent immobilier, pousse les portes du magasin La Bicyclette verte, le gérant reconnait tout de suite qu'il n'est pas un pratiquant régulier. Le client apporte à Eric, réparateur, une bicyclette qui n'a pas servi depuis au moins cinq ans. Le propriétaire de cet engin vintage espère perdre les kilos qu'il a pris pendant le confinement en se remettant à pédaler. Ce qui l'a motivé à sortir son vieux vélo du placard, c'est l'aide de 50€ pour réparer son deux roues.
 
"Vous ne le récupererez pas avant la semaine prochaine", précise Eric à un toulousain venu lui confier son vélo. Il est surpris. Le gérant de la boutique, plexiglass sur le visage, ajoute : "c'est comme ça dans tous les magasins à Toulouse!" Et oui, il y aussi des clients qui utilisaient déjà leur bicyclette quotidiennement, et qui devront attendre autant que les nouveaux adeptes.

Avec ces deux profils de clientèle, ce magasin de réparation du quartier de la Colombette n'a jamais aussi bien fonctionné. « J’ai minimum une semaine de délais pour les réparations alors qu'avant je pouvais le faire en 2/3 jours", constate Eric. En une matinée, ce professionnel passionné a reçu une dizaine de coup de fil. Au fond, derrière la caisse, c'est un sous-traitant, Kim, qui répare quelques vélos. La fil d'attente se forme peu à peu devant le magasin qui vend aussi des pièces d'occasion.

Le trafic automobile a largement reculé depuis le déconfinement (environ 50% du trafic habituel). Le président de l'association 2 pieds 2 roues espère que cette situation se pérennise : "en maintenant le télétravail une à deux fois par semaine ou en oubliant la voiture pour aller au travail". "Pendant le confinement on a vu le plaisir des gens à marcher, pourquoi ce plaisir disparaitrait?" s'interroge-t-il. Les Toulousains sont-ils prêts à tous ces changements ? Réponse dans les prochains mois.
 
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