Lundi 6 février 2023, un violent séisme a frappé la Turquie et la Syrie. 11.200 morts selon le dernier bilan. Vincent Bounes, patron du SAMU 31 et formé en médecine de catastrophe, constate qu'il n'y a pas assez de médecins prêts à affronter les catastrophes qui peuvent se produire. Entretien.
Un violent séisme d'une magnitude de 7,8 sur l'échelle de Richter a frappé le sud de la Turquie et la Syrie voisine très tôt le lundi matin 6 février. Le bilan très provisoire est particulièrement lourd : 11.200 morts recensés et des milliers de blessés. Nous avons joint par téléphone Vincent Bounes, patron du SAMU 31 et expert en médecine de catastrophe.
Pourquoi vous être lancé dans la médecine de catastrophe ?
En septembre 2001, l'explosion de l'usine AZF à Toulouse m'a marqué. Alors, j'ai décidé de me lancer dans la médecine de catastrophe. La ville de Toulouse a connu des événements tragiques comme les attentats perpétrés par Mohamed Merah en mars 2012. Ensuite, en 2017, j'ai été envoyé à Barcelone pour les attentats. J'y suis resté cinq jours, et en rentrant, j'ai pleuré pendant une semaine.
Lors des attentats, il y a beaucoup d'émotion qui nous submerge, car il peut y avoir énormément de morts ou de blessés. On a besoin de réserve physique puisque la situation épuise.
Vincent Bounes, directeur du Samu 31
Enfin, cet été, on a accueilli le plus grand centre de vaccination d'Europe contre le Covid-19. On a fait jusqu'à 12.000 vaccinations par jour.
En France, y a-t-il assez de personnes formées à la médecine de catastrophe ?
En France, huit universités délivrent des diplômes de médecine de catastrophe : Toulouse, Paris, Bordeaux, Lyon et Marseille, entre autres. Dans le monde, il existe une vingtaine de centres dédiés à la médecine de catastrophe.
Le constat est qu'il n'y a pas assez de médecins formés à la médecine de catastrophe. En Occitanie, c'est une trentaine de médecins qui le sont. Alors, des étudiants dans d'autres branches de la médecine participent à des initiations. Les citoyens ignorent parfois comment réagir face à un incendie, une inondation ou un attentat.
Réagir face à une catastrophe, c'est bien, mais il faut aussi anticiper sur la façon de réagir.
Vincent Bounes
Et puis, nous ne pouvons rien faire contre les changements climatiques. Il faut savoir que l'on vit dans une époque où guerre et terrorisme sont omniprésents.
Alors, en 2019, avec l'université de Toulouse, le CHU, le Sdis, la préfecture et l'ARS, on a créé un centre de réponse à la catastrophe. C'est un projet transversal et partenarial, fondé sur la recherche, la publication, la formation, la simulation dans les domaines de la réponse à la catastrophe.
Est-ce-que la médecine de catastrophe se rapproche de la médecine de guerre ?
Médecine de catastrophe et médecine de guerre, c'est pareil. On retrouve les mêmes composantes comme les attentats ou les syndromes psychotraumatiques. Il y a des risques de blessures de guerre importants lors de ces événements.
Alors, on s'entraine avec l'armée en participant à des sessions avec des militaires.
Actuellement à Abou Dabi dans le cadre d'une conférence internationale sur la médecine de catastrophe, Vincent Bounes a une pensée pour les victimes des tremblements de terre.