Mixité dans les collèges : succès ou échec, des points de vue qui s'opposent

A Toulouse (Haute-Garonne), le département souhaite renforcer la mixité dans les collèges. Six ans après le début de cette expérimentation, les avis sont mitigés.

La France est un des pays où l’écart entre les résultats des élèves issus de milieux favorisés et ceux des élèves issus de milieux défavorisés est le plus important. Autrement dit, nous possédons un des systèmes scolaires les plus inégalitaires. 

Les travaux de Pierre Bourdieu et de Jean-Claude Passeron dans les années 60 faisaient déjà le constat d’une corrélation entre l’origine sociale et l’orientation scolaire, et montraient que l’école (bien que laïque, gratuite et obligatoire) joue un rôle de légitimation et de reproduction des inégalités.

Pour réduire ce gap, la mixité serait-elle la solution ? Le département de la Haute-Garonne en charge des collèges, l'affirme. En 2017, il a décidé de fermer deux établissements du Mirail à Toulouse perçus comme "défavorisés", et de réaffecter les élèves dans des établissements mieux "côtés".

En réaffectant ces 1140 collégiens, dans onze établissements, les résultats scolaires des élèves concernés ont augmenté de près de 20 %. 

En 2022, nous avons eu plus de 70% de réussite scolaire au brevet, c'est un vrai succès

Sébastien Vincini

président du Conseil Départemental de la Haute-Garonne (PS)

La Fondation Jean Jaurès, centre de recherche sur les évolutions de la société, appuie ces conclusions concernant le plan “Mixité”. 

25 élèves par classe maximum en 6e 

Pour faciliter la transition, la collectivité a déployé un réseau de navettes gratuites vers ces nouveaux établissements d’accueil. Le nombre d’élèves en sixième à également été limité à 25 par classe, afin d’assurer le bon déroulement des cours. 

"On est beaucoup plus encadré par les professeurs, ils nous aident pour nous dire ce qu'il faut faire, ce qu'il ne faut pas faire. Ils nous permettent de rester dans le parcours scolaire", témoigne Nahel, élève de 5e au collège Saint-Simon de Toulouse. 

"Ils se sont trompés dans leurs calculs"

Mais pour certaines familles, le dispositif rencontrerait des limites. C'est le cas de plusieurs parents d'élèves du collège Guilhermy, qui a ouvert ses portes à la rentrée 2022. "Au départ nous n'avions pas d'apriori sur ce dispositif de mixité, nous étions juste embêtés que le système de carte scolaire soit modifié à Toulouse car cela nous a fait changer d'établissement notre enfant", témoigne une maman du groupe FCPE.

Mais un an après le début du dispositif, son avis, a évolué : 

C'est un échec, ils se sont trompés dans leurs calculs. Il n'y a pas de mixité. Il y a beaucoup plus d'enfants défavorisés que d'enfants favorisés donc ça ne fonctionne pas. Le niveau scolaire est tiré vers le bas c'est dommage.

Elle ajoute : "Nous avons tiré la sonnette d'alarme plusieurs fois sur le manque de moyens. Cette année nous allons avoir un CPE et un directeur adjoint supplémentaire. Mais est-ce que ça va être suffisant pour régler certains problèmes de discipline ?"        

Face à ce sentiment, certaines familles font le choix de mettre leurs enfants dans le privé. En France, à la rentrée 2021, 40 % des élèves scolarisés dans un collège privé sous contrat étaient issus d’un milieu social très favorisé, contre à peine 20 % dans le public.

Un dispositif que souhaite renforcer le gouvernement 

Le 1er mars 2023, le ministre de l'éducation Nationale Pap Ndiaye s'est exprimé devant le sénat sur ce sujet là : "la mixité sociale et scolaire dans les écoles et les établissements est une des conditions de la réussite de chaque élève. La diversité des parcours familiaux, la multiplicité des origines sociales, leurs mélanges et leurs interactions sont une force et non une faiblesse pour l’école", a t-il souligné. 

Il a ajouté : "ce sujet nécessite la mobilisation, l’engagement et la persévérance de tous, en particulier des collectivités locales" 

Avant de conclure : "L’école doit porter – tel est son rôle – une vision émancipatrice de son action auprès des élèves ; elle doit lutter contre les déterminismes de naissance, d’origine ou de genre. Elle doit permettre à chaque enfant d’étendre ses ambitions au-delà de ce à quoi son environnement le restreint, voire le contraint." 

Quelques chiffres autour de la mixité en France  

En France, à la rentrée scolaire de 2021, la proportion d’élèves issus de milieux défavorisés était en moyenne de 37,4 % au collège. On retrouve ces élèves les plus défavorisés à hauteur de 61 % dans un dixième des collèges les plus défavorisés, alors que les établissements les plus favorisés n’en accueillent que 14,6 %.

En parallèle, les 23,9 % d’enfants issus de milieux très favorisés ne sont présents qu’à hauteur de 6,6 % dans les collèges les plus défavorisés, alors qu’ils sont près de 45 % dans quelque 10 % des établissements les plus favorisés.

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