Alors que l'accord du Mercosur suscite une vive opposition chez les agriculteurs français, inquiets des risques de concurrence déloyale, certains secteurs pourraient en tirer profit. C'est le cas de certains vignerons dont les produits sont très présents sur marché d'Amérique du Sud.
"Vous voulez m'attirer les foudres des agriculteurs ?", ironise Jacques Tranier, directeur de la coopérative viticole du sud-ouest, Vinovalie. Difficile à admettre pour ce vigneron, mais pourtant, l'accord du Mercosur pourrait grandement favoriser ses échanges internationaux. "Si les taxes sont supprimées, on pourrait multiplier nos exportations par 1,5", indique-t-il.
Une perspective à contre-courant du sentiment de colère grandissant des agriculteurs, partout en France, qui redoutent une concurrence déloyale. Ils craignent que cet accord menace les productions locales, soumises à des normes de qualité et des exigences environnementales bien plus strictes que celles en vigueur en Amérique latine. Pourtant, certains secteurs, comme celui du vin, pourraient tirer profit de cet accord.
Facteur de croissance
Le vin français a le vent en poupe au Brésil, où la coopérative Vinovalie, qui regroupe plus de 400 vignerons, s'impose comme un leader sur le territoire, avec sa marque de rosé Piscine. Avec 450 000 bouteilles vendues soit l'équivalent d'1,5 million d'euros de vente, l’entreprise domine le marché des vins français. Mais ce succès ne se fait pas sans un prix élevé : "Aujourd'hui, un consommateur brésilien paie 5 à 6 fois le prix qu'il paierait en France pour la même bouteille, explique Jacques Tranier. Par exemple, le rosé Piscine, qui coûterait 4 à 5 euros en France, est vendu entre 15 et 20 euros au Brésil."
Une différence importante qui s'explique par des taxes à l'importation qui, jusqu’à présent, ont protégé les vins locaux, notamment ceux produits en Argentine et au Brésil. L'accord Mercosur, qui vise à réduire ou éliminer ces taxes à l'importation, ouvrirait donc de nouvelles perspectives pour les exportateurs français.
Ouverture à la concurrence
Pour Jacques Tranier, difficile de passer à côté des bénéfices d'un tel accord pour sa coopérative. "On ne peut pas, d'un côté s'inquiéter de l'instauration de nouvelles taxes aux Etats-Unis et de l'autre, ne pas se réjouir de l'ouverture du marché en Amérique du Sud, c'est la règle du jeu, confie-t-il. En Europe, les vins du monde peuvent déjà rentrer sans taxe."
Dans le monde du vin, plus il y a de libre-échange mieux c'est, le Mercosur c'est mettre tout le monde à égalité.
Jacques Tranierdirecteur de la coopérative Vinovalie
Pour le vigneron, conscient tout de même des risques de dérive dans le secteur de l'élevage, le libre-échange pourrait être un moteur de croissance pour le monde viticole. Cependant, Jacques Tranier préfère attendre les précisions quant aux contours de l'accord pour se réjouir. "Le vin échappe souvent aux règles du libre-échange et on est souvent les dindons de la farce."
Pour autant, les viticulteurs, très impliqués dans le mouvement agricole, continuent de pointer les limites de cet accord, qui favorise, selon eux, le développement de la concurrence déloyale, au détriment de la production française. Sur les lieux de mobilisations, les professionnels réclament des mesures visant à protéger les produits du territoire, avec l'importation importante de vins espagnols en ligne de mire.