VIDEOS. Affaire d'un élu agressé par la CGT : faits contestés, plainte classée, soupçons d'instrumentalisation, ce que l'on sait de cette affaire polémique

Le vendredi 22 novembre, le maire de Toulouse s'indignait sur X de la "violente agression" subie par un conseiller municipal qui venait d'assister à une conférence sur le Sahara Occidental. Mais la plainte de l'élu a très vite été classée sans suite, le Parquet ne relevant "aucune trace" de violence. Samir Hajije s'est enfin exprimé et a diffusé des vidéos de l'altercation.

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C'est un post du maire de Toulouse (Haute-Garonne) qui a fait l'effet d'une bombe. Le vendredi 22 novembre à 23h03, Jean-Luc Moudenc dénonce sur X (anciennement Twitter) une supposée agression violente dont aurait été victime Samir Hajije, conseiller municipal notamment en charge des bibliothèques et des médiathèques de la ville.

Élu "violemment tabassé" selon le maire

Selon les affirmations du maire, le Franco-Marocain aurait été "violemment tabassé" alors qu'il assistait ce soir-là à une conférence à la Bourse du Travail consacrée aux prisonniers politiques sahraouis, hébergée par l'Union départementale CGT. 

L'épisode traduirait donc une importation du conflit en cours au Sahara Occidental entre l'Algérie et le Maroc, sur le sol toulousain. Dans son message, Jean-Luc Moudenc se dit "profondément choqué", et demande que ces "actes de violence mettant en danger la vie d'un élu de la République", "commis dans un contexte dominé par l’extrême gauche" soient sévèrement punis.

La toile s'enflamme

Le lendemain, Jean-Luc Moudenc livre davantage de détails au média en ligne Actu Toulouse. Selon son récit, Samir Hajije aurait reçu "des coups de pied et des coups de poing" de la part du service d'ordre de la CGT. "Blessé au niveau des cervicales, des côtes, des jambes et des bras", le conseiller municipal aurait été évacué vers l'hôpital de Purpan. "Ils ont essayé de l’étrangler" dénonce le maire.

Le post du maire de Toulouse (toujours en ligne le 25 novembre), devient rapidement viral, vu par plus de 50 000 internautes. "L'agression d'un élu" est relayée par les médias nationaux et dénoncée par les élus toulousains de tous bords.

La CGT dément toute violence

Les affirmations publiques du maire sont pourtant rapidement contredites par la CGT organisatrice de la conférence. Le syndicat nie tout acte de violence de la part de ses vigiles.

Nous nous inscrivons en faux avec ce qui est décrit et monté en épingle depuis hier soir. Ce n'est pas absolument pas ce qui s'est passé.

Cédric Caubère, secrétaire général de la CGT Haute-Garonne

Un participant témoigne

Raphaël Steiger était dans le public lors de la conférence. Il se souvient avoir entendu des cris qui provenaient de l'entrée de la Bourse du Travail, provoquant un "léger mouvement de foule", et obligeant les membres du service d'ordre de la CGT à intervenir. Le public a été prévenu que "des perturbateurs marocains avaient essayé de faire irruption dans la salle pour empêcher la bonne tenue de l'événement"

La consigne nous a été donnée de sortir en groupe, afin de ne pas se retrouver seuls face aux perturbateurs marocains.

Raphaël Steiger, participant à la conférence

Aucun coup sur les vidéos visionnées

Immédiatement saisi, le parquet de Toulouse a pu visionner les vidéos de la scène litigieuse, tournées par les proches de Samir Hajije, et récupérées par les policiers. Elles ne font apparaître aucun coup porté. Au contraire, elles confortent la version livrée par la CGT : après avoir pénétré dans la salle de la conférence, l'élu et une dizaine de ses proches auraient eu un comportement perturbateur, épousant les positions du Maroc. Après une sortie éclair afin d'appeler des "renforts" à les rejoindre, ils se sont vus interdire d'y entrer à nouveau par le service d'ordre. Dans la confusion provoquée par leur tentative de forcer le barrage, l'élu de la majorité municipale a chuté.

Le Parquet classe l'affaire

Selon le constat du procureur de la République recueilli par le quotidien La Dépêche, malgré les deux jours d'ITT prescrits, "le certificat médical [de la supposée victime] ne fait pas état de lésion traumatique, autre que la conséquence de la chute visible sur la vidéo et des allégations de douleurs du coude". Le parquet a donc logiquement classé la plainte sans suite.

La décision judiciaire satisfait l'union départementale de la CGT, qui s'estime victime d'une manipulation. Selon son secrétaire général Cédric Caubère, le conseiller municipal est entré "dans le but de provoquer, témoignant d'une attitude injurieuse". Et il a menti. "On n'a pas le droit de semer le trouble dans une réunion publique, encore moins d'alléguer que l'on a été violenté quand ce n'est pas vrai". 

Samir Hajije réagit

L'élu a finalement publié un communiqué lundi 25 novembre, tard dans la soirée, sur les réseaux sociaux. Samir Hajije se déclare "heurté" par la mise en doute de son témoignage, et les accusations de mensonge. Le conseiller municipal regrette le classement sans suite de cette affaire démontrant un "certain manque de considération eu égard à la gravité de ce qui s'est passé."

L'élu déclare sa présence à la Bourse du travail "totalement légale" et affirme qu'il n'a jamais cherché à "provoquer ou perturber les débats" se refusant à "toute forme de violence". "Cette altercation, par soudaineté et sa violence, a été psychologiquement traumatisante" témoigne-t-il.

Que montrent les vidéos ?

Sur le réseau X, Samir Hajije a mis en ligne plusieurs des vidéos tournées par ses proches, et visionnées par la Justice. 

Sur l'une d'entre elles, On voit une bousculade musclée à l'entrée de la Bourse du Travail, semblant opposer l'élu et ses proches à des membres du service d'ordre de la CGT. On y entend distinctement Samir Hajije répéter "vous ne me touchez pas", ainsi que les cris d'une femme paniquée demandant d'"appeler la police". Sur une autre vidéo, on y voit le conseiller au sol se relevant difficilement. Des images prises à l'extérieur du bâtiment par des personnes cherchant, semble-t-il, à rentrer en forçant le passage, et bloquées par des membres de la sécurité de la CGT. Ces vidéos semblent incomplètes et ne permettent pourtant pas d'en savoir plus sur le contexte et le déroulé des évènements.

Une affaire orchestrée ?

Pointée du doigt durant 48 heures en raison du post de Jean-Luc Moudenc, la CGT estime que le maire est "l'autre victime" de la dénonciation non vérifiée de son conseiller. "Le maire a été abusé par la confiance qu'il fait à cet homme" estime Cédric Caubère. Le leader syndical s'interroge néanmoins sur les intentions de sa communication sur X. 

Je ne peux pas croire que cette affaire ait été orchestrée par l'équipe municipale, voire par le consulat du Maroc".

Cédric Caubère, secrétaire général UD CGT 31

Une excuse pour "virer" la CGT de la Bourse du travail dans le viseur ?

"Un tel lieu ne peut devenir le fonds de commerce de l’intolérance et de la sauvagerie" déclarait Jean-Luc Moudenc dans son post, faisant référence à la Bourse du travail. De quoi inquiéter la CGT, qui voit dans la polémique une nouvelle attaque de la ville dirigée contre ces locaux qu'elle occupe depuis 129 ans.

Ca fait des années que la mairie cherche à "virer" les syndicats de la Bourse du travail.

Cédric Caubère, secrétaire général UD CGT 31

La CGT annonce vouloir prendre contact rapidement avec Jean-Luc Moudenc pour l'inviter à la Bourse du Travail afin de témoigner du "débat démocratique" qui y prend place. A l'heure où nous publions cet article, la mairie n'a pas répondu à nos sollicitations.

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