Hérault : "Cette vigne, c'est un souvenir d’enfance, un esprit de famille", les Daumas, entre passion et tradition

A Marsillargues, la famille Daumas s'occupe de plusieurs parcelles de vignes, l'héritage d'une tradition familiale. Autour des parcelles, des dizaines de cabanes illégales ont vu le jour. Alors, pour préserver les terres agricoles qui entourent leurs vignes, la famille se mobilise. Portrait.

Histoire de famille

L’amour de deux frères, Julien et Nicolas Daumas, pour la vigne commence avec une petite parcelle d'à peine un hectare située sur la commune de Marsillargues, dans l’Hérault. Un héritage de leur arrière-grand-père : "Je suis la quatrième génération à m’occuper de ces vignes. Et là, donc nous sommes au milieu d’une vigne quasi-centenaire."

Car cette vigne qui fait aujourd’hui principalement du rosé et du rouge existe depuis les années 1920 du temps où leur arrière-grand-père était ouvrier agricole. Si lui a consacré sa vie à la viticulture en en faisant son métier, ce n’est pas le cas de Julien et Nicolas et de leur père aussi, Jean-Jacques.

Tous trois exercent un métier autre qu’agriculteur. Ils sont consultant en immobilier, technicien des eaux ou encore professeur de SVT. Mais ils passent désormais tout leur temps libre à travailler cette vigne dont ils sont les héritiers.

Ces vignes, j’ai commencé à m’en occuper quand mon père s’est arrêté parce qu’il ne pouvait plus à cause de problèmes de santé, j’étais loin de me douter que ça allait me plaire autant. Et puis maintenant ça y’est c’est le virus.

Jean-Jacques Daumas, propriétaire vignes à Marsillargues

Et depuis que Jean-Jacques est à la retraite, il y passe désormais tout son temps libre : "Je ne dirai pas que j’ai donné un prénom à chaque souche mais presque, je les connais toutes individuellement", nous dit ce professeur de SVT à la retraite.

Ce que nous confirme son fils, Julien : "Mon père s’occupe beaucoup de la vigne et moi je m’occupe beaucoup de la vente et de la commercialisation, de l’administratif et mon frère Nicolas lui est très polyvalent."

Perpétrer les traditions familiales

Si ces trois hommes chouchoutent autant cette vigne aujourd’hui, c’est parce qu’ils y sont très attachés : "Je crois que dans mon téléphone, dans mon ordinateur, j’ai des photos sur les 25 dernières années de vendanges, que l’on fait en famille ou avec des amis et ça c’est quelque chose d’irremplaçable. Ces vignes, ce sont des souvenirs d’enfance, nous avons grandi au contact de ces vignes-là, c’est un esprit de famille."

Ces trois hommes ont décidé d’acheter d’autres parcelles,  non pas pour devenir professionnel mais pour perpétrer la tradition familiale.

On veut continuer à partager des moments et surtout faire perdurer les valeurs qui nous ont été transmises.

Julien Daumas, propriétaire de vignes à Marsillargues

D’un hectare, ils sont passés à cinq, et début février ils ont planté 6500 nouveaux pieds de vignes sur une parcelle située derrière la zone commerciale de Lunel. Parcelle qu'ils cultivent d'ailleurs en bio : "Notre domaine, on essaye de le construire petit à petit autour de la petite parcelle de notre grand-père et je ne pense pas qu’on puisse trouver un aussi grand plaisir en en faisant notre métier par obligation, il faut que ça reste un plaisir, il faut que ça reste une entreprise artisanale, familiale, avec cet état d’esprit local, on vend la quasi-totalité de nos bouteilles dans les villages avoisinants on n’a pas vocation à devenir une grosse entreprise."

Un combat : la lutte contre la cabanisation

Mais les trois hommes font face aujourd’hui à un problème : la cabanisation des terres agricoles qui entourent leurs parcelles. "Depuis quelques décennies, une des principales menaces qui nous entourent c'est le phénomène de cabanisation, c’est-à-dire que les parcelles qui sont souvent des petites parcelles sont dévouées à l’agriculture et sont transformées en habitation presque précaires mais qui au final perdurent et contribuent à dévaloriser ces terres agricoles", nous explique Julien.

En effet, au fil des années, Julien a vu ces terrains se doter de portail et de boîtes aux lettres aussi : "Ne me faites pas croire que les gens n’y vivent pas à l’année !"

En effet, ces petites cabanes en bois sont illégales, en tout cas les occuper à l’année en tant qu’habitation principale n’est pas autorisée : "Tous ces terrains sont situés en zone rouge en plus, aucune installation ne peut y être admise et l’habitation y est totalement interdite," nous dit le maire de la commune, Patrice Speziale.

Ne me faites pas croire que les gens n’y vivent pas à l’année !

Julien Daumas

Pour préserver l'environnement 

Si ces deux frères ont décidé de se mobiliser de la sorte pour ces terres agricoles c'est qu'ils sont très sensibles à l'environnement : "Je pense que derrière ce combat, il y a une vocation environnementale. Ce sont des terres agricoles, c’est une terre qui est très fertile, et de voir des habitations qui sont illicites sans aucune autorisation, ça pose un souci environnemental notamment au niveau de l’occupation du sol, au niveau de la qualité du sol et puis aussi au niveau de l‘environnement, nos fossés sont très régulièrement remplis de déchets."

Car la terre sur ces terrains, situés à quelques mètres du Virdoule, est très fertile : "Ici, la terre est très fertile, c’est très intéressant de travailler avec des sols comme ça. C’est très argilo-graveleux. Donc pour la pousse c’est très rapide, c'est pour ça aussi que c'est important de préserver ces terrains qui sont faits pour l'agriculture."

Le soutien de la mairie et la SAFER

Selon le maire, ces parcelles de terrain ont été vendues à un prix plus élevé que si c’était des terres agricoles : "Evidemment le prix du m² agricole est moins cher que le prix du m² de terrain constructible, les propriétaires préfèrent vendre ces terrains à des prix plus élevés", nous dit le maire de Marsillargues.

Et si lui aussi est autant investi dans cette mission c’est parce que l’agriculture à Marsillargues ça fait partie de l’histoire du village.

Ici l’agriculture ça a toujours existé, sur les 43km² que comptent la commune 30 sont des terres agricoles. Et puis ici, nous avons eu une des plus grandes coopératives d’Europe aussi.

Patrice Speziale, Maire de Marsillargues

Alors pour rendre à Marsillargues ce qui lui appartient, l’agriculture, la mairie s’est engagée avec la SAFER, qui régule le marché des terrains agricoles (société d’aménagement foncier et d’établissement rural). Le 6 février dernier, la mairie a mis en place une politique de vigilance pour la lutte contre la cabanisation : "l’objectif est que la SAFER nous avertisse à chaque fois qu’un terrain va être vendu. Aujourd’hui, nous précise le maire de la commune, nous sommes en train de recenser parcelle par parcelle, pour identifier qui les occupe mais aussi qui les a vendues, mais cela va prendre un certain temps."

Mais pour Arnaud Vié ce phénomène est typique sur tout le département de l'Hérault : "La cabanisation touche beaucoup le littoral, et les communes proches des grandes villes. Nous nous sommes un outil à disposition des communes et des collectivités pour ne pas que les prix explosent et que les agriculteurs puissent acheter au prix du marché."

Aujourd'hui la commune de Marsillargues compte une quarantaine d'agriculteurs mais pourrait en avoir bien plus d'ici quelques années si la ville arrive à lutter contre cette cabanisation illégale. 

Quels sont les visages de l’agriculture d’aujourd’hui ? Pour les découvrir, cliquez sur un point, zoomez sur le territoire qui vous intéresse ou chercher la commune de votre choix avec la petite loupe. Bonnes balades au cœur du monde paysan.

 

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