Les faits avaient été rapportés par Le Monde, et confirmés ce vendredi à l’AFP par le ministère de la Justice. Le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a saisi le bureau de déontologie après des propos douteux tenus par un magistrat lors du très médiatisé procès de viol par surprise, dans l’Hérault.
"Combien de femmes auraient envie de faire l’amour avec vous en vous voyant ? Moi, j’ai ma petite idée : proche de zéro." L’avocat général Robert Bartoletti a enchaîné les frasques pendant le procès de Jack S., le "faux playboy niçois", qui s’est tenu fin octobre à la cour criminelle de l’Hérault à Montpellier.
"Avez-vous joui ? Ont-elles joui ?" Demandait-il encore à Jack S. lors de son interrogatoire, rappelant en outre à la cour que ce dernier avait trompé sa femme "dès son premier mariage" il y a plus de 50 ans.
La présomption d’innocence mise à mal
Pendant l'interrogatoire, l'avocat général avait également demandé à l'accusé: "Vous, vous pourriez faire l'amour avec n'importe quelle femme ? C'est important le critère physique, non ?" Des formulations "grossières" pour Le Monde, qui détonnent alors pour un avocat général, censé s’exprimer au nom de la société.
L’affaire avait en tout cas secoué les mœurs. Selon Le Monde, le président de la cour, Paul Baudoin, avait également fait un lapsus, qualifiant les plaignantes de "victimes", et les nombreuses femmes invitées à témoigner à la barre "plaignantes" alors même qu’elles n’avaient pas porté plainte.
Un président de cour et un avocat général ne devraient pas dire ça. Pascale Robert-Diard est au procès de Jack S., jugé pour viol par surprise devant la cour criminelle de l'Hérault, et ça ne se déroule pas très bien... https://t.co/vYhhNhXUt2
— Nicolas Chapuis (@nicolaschapuis) October 29, 2021
Placé auprès du garde des Sceaux, le bureau du statut et de la déontologie du ministère de la Justice est chargé de "recommander toute mesure visant à faire respecter les obligations déontologiques" des fonctionnaires et agents de la Justice, comme le rappelle l'AFP. Les magistrats étant, par leur serment, tenus de respecter réserve, impartialité et dignité.
Un procès historique
L’affaire du faux playboy niçois à Montpellier est une première dans l’histoire de la justice, la charge de "viol par surprise" n’ayant jusque-là jamais fait l’objet d’un procès.
Sous le pseudonyme d’Anthony Laroche, architecte d’intérieur et playboy monégasque, Jack S. manipulait des femmes rencontrées sur Internet, avant de les inviter chez lui, lumières éteintes, de leur bander les yeux et d’avoir des rapports sexuels avec elles.
Les victimes, qui avaient interdiction de le toucher, s’apercevaient de la supercherie au réveil. "Je suis avec un inconnu à qui je n’ai jamais parlé, et surtout à qui je n’ai jamais donné mon consentement", avait raconté l’une d’entre elles, entendue à la barre.
Jack S. a finalement été condamné à huit ans d’emprisonnement le 29 octobre dernier.