La Confédération paysanne dénonce les nouvelles mesures de sécurité bientôt imposées aux éleveurs de porcs en plein air pour lutter contre la peste porcine africaine. Des mesures sans aide financière, inadaptées aux élevages qui ne sont pas industriels et qui mettraient en péril toute la filière.
Au domaine des Agriolles, sur la commune héraultaise de La Boissière, les porcs vivent en plein air toute l'année, l'exploitation vend en direct sur place et organise des formations.
Autant dire qu'ici, les visiteurs sont nombreux. Alors comment créer des doubles clôtures sur tous les parcs, installer des sas à l'entrée des bâtiments, et imposer charlotte, sur-chaussure et blouse à tous les visiteurs ?
Pour Dominique Soullier, l'éleveur de porcs du domaine, ces mesures sont impossibles à mettre en place et rien ne dit qu'elles seront efficaces.
Sans compter le coût de la mise en place de ces mesures de sécurité, sans aide financière prévue pour les agriculteurs.Depuis quand les clôtures arrêtent les virus ou les maladies ?
Malgré l'opposition de la Confédération paysanne, ces mesures sont bien celles préconisées par le ministère de l'Agriculture, pour faire face au risque d'épidémie de la fièvre porcine africaine.Pour mon exploitation, rien que pour faire la clôture, c’est 10 000 euros, et encore si c’est moi qui fait le travail. Antoine Boulet, éleveur plein air à Saint Pargoire dans l'Hérault.
Le syndicat dénonce des mesures qui protègent l'élevage dans des bâtiments, au détriment du plein air. Car les pays touchés par la fièvre porcine subissent de très fortes restrictions à l'exportation.
Rester un pays sans maladie est donc un enjeu de taille pour l'élevage industriel.
Mais dans l'Hérault, sur 20 exploitations seulement 2 sont industrielles.
Emilie Déquiedt, membre de la Confédération paysanne de l'Hérault, regrette cette situation.
On a des eleveurs qui sont à haut niveau de valeur ajoutée pour la société, le bien-être animal est respecté, avec le côté environnemental et le côté social qui sont respectés et on ne prend pas en considération les préoccupations de ces éleveurs-là.
La fièvre porcine, une maladie très contagieuse
Cette maladie très contagieuse ne menace pas l'homme mais est mortelle pour les animaux infectés. Elle se propage par les sangliers et les transports humains, et peut donc être transmise aux élevages porcins.Cette fièvre porcine se répand en Europe. En Belgique, à la frontière française, plus de 800 sangliers ont été détectés comme porteurs en Belgique.
Pour l’instant, aucun cas n'a été recensé en France. Mais face à la menace d'une épidémie de peste porcine, le ministère de l'agriculture a accéléré l'adoption de mesures préventives.
Ces nouvelles obligations concerneront tous les élevages professionnels dès lors qu'un seul cochon sera commercialisé.
Les mesures de protection des élevages plein-air ont été précisées la semaine dernière, notamment en termes de clôtures vis-à-vis des sangliers.
Et c'est ce qui inquiète la Confédération paysanne. Le syndicat a rapidement réagi dans un communiqué, expliquant que "cette instruction ne prévoit pas d'alternative au grillage fixe pour les élevages plein-air. La seule option est de séparer les mâles et les femelles pubères, ou de les stériliser".
Il s'agit de mesures totalement inadaptées à la particularité des élevages porcins de plein air en rotation parcellaire, extensifs ou présents dans des zones difficiles.
"Comment planter des clôtures fixes d'1 mètre 30 sur des terrains montagneux, calcaires et pour des exploitations de plusieurs dizaines d'hectares ? Ce sera proprement infaisable", s'interroge la Confédaration paysanne. Sans compter "le coût d'un tel équipement, de 1 à 2 euros du mètre" que "nombre d'éleveur.euses ne seront pas en mesure de l'assumer".
La Confédération paysanne a proposé aux services de l'Etat de mener "une expérimentation afin de valider des moyens de protection adaptés à ces modes de production". Sans succès pour l'instant.
Toutes les mesures préventives devront être mises en place en 2021.Il en va de la survie et de l'existence de ces éleveur.euses sur notre territoire. Éleveurs et éleveuses qui ont fait le choix de productions extensives adaptées à leur milieu, aux attentes sociétales et en plein accord avec le besoin de transition et de relocalisation de l'agriculture.