Viticulteur de profession, le parlementaire installé à Montpellier a remis un rapport sur le mal-être des agriculteurs français. Le gouvernement vient de présenter une feuille de route qui s’appuie sur ce travail et qui doit renforcer les dispositifs d'aide aux agriculteurs en difficulté.
“La détresse, tous les agriculteurs la subissent à un moment dans leur carrière”. C’est un constat sans appel que dresse le sénateur de l’Hérault, Henri Cabanel. Une détresse causée par différents facteurs : réchauffement climatique, crise économique, isolement social… La liste est longue, selon le parlementaire, qui sait pertinemment de quoi il parle.
Viticulteur de profession avant de siéger dans l'hémicycle du Sénat, Henri Cabanel, propriétaire de plusieurs vignes dans le département, a remis au mois de mars dernier un rapport sur l’augmentation des suicides dans le monde agricole. C’est ce rapport qui a permis au gouvernement de dresser une feuille de route qui comporte plusieurs mesures qui doivent permettre de lutter contre le mal-être des agriculteurs.
Briser l’omerta
Lorsqu’il s’est emparé de ce sujet, Henri Cabanel a dû faire face à une véritable levée de boucliers. Parmi les agriculteurs en grande souffrance, nombreux sont ceux qui refusaient, dans un premier temps, de se confier. “C’est un métier à part. C’est un métier de taiseux. On ne parle pas de ces choses-là, on garde tout pour soi”, déclare le parlementaire. “Quand j’ai annoncé que je voulais agir, on m’a dit “non, le métier va assez mal comme ça”.
Mais l’élu persévère. Lorsqu’en 2019 le film Au nom de la terre sort en salles, "c'est la France entière qui est émue”, selon les mots du sénateur. Réalisé par Edouard Bergeon, ce drame est en fait en partie autobiographique : il s’est inspiré de la vie de son père agriculteur, incarné par Guillaume Canet à l’écran, qui a mis fin à ses jours alors que son exploitation agricole était en train de faire faillite. “Le déclic, c’est quand Guillaume Canet a déclaré qu’on était face à une situation de non assistance à personne en danger.” Cette déclaration, faite en marge de la promotion du film, a suscité un vif émoi parmi les agriculteurs et la classe politique française. “À ce moment-là, je me suis dit que je ne pouvais plus mener une politique de l’autruche”, explique Henri Cabanel.
Dès lors, le travail entrepris par le sénateur héraultais prend une autre dimension. La problématique du suicide chez les agriculteurs prend place dans le débat public, le gouvernement en fait même l’une des priorités lors des états généraux de l’alimentation et les lois EGAlim.
Remettre l’humain au centre de tout
Ce mardi 23 novembre, Henri Cabanel a assisté à la présentation de la feuille de route du gouvernement pour la lutte contre le mal-être des agriculteurs en présence de plusieurs membres de l'exécutif. Une feuille de route qui reprend des éléments du rapport remis par le sénateur héraultais au mois de mars dernier. “Je suis globalement satisfait du résultat de ce travail”, a déclaré Henri Cabanel à France 3 Occitanie à l’issue de cette présentation. “Il y a beaucoup de nos propositions qui apparaissent dans la feuille de route. Le gouvernement se repose sur nos travaux, ça va dans le bon sens”, glisse le parlementaire.
A la chambre d’agriculture 34 pour présenter à la filière les 63 propositions de mon rapport co rédigé avec Françoise Férat prévention et accompagnement détresse des agriculteurs aux côtés de @JeromeDespey @CdricSaur pic.twitter.com/8eRsUf78mZ
— Henri Cabanel (@senateurcabanel) April 2, 2021
Parmi les mesures retenues par l'exécutif pour mener une politique de prévention et d’accompagnement des agriculteurs en difficulté, la création de “sentinelles”, des cellules composées de volontaires issus de l’agriculture, de professionnels d’écoute, d’élus de terrain qui doivent identifier les premiers signes de détresse. “Il faut remettre l’humain au centre de tout. C’est une priorité absolue”, a martelé Henri Cabanel.
Il faut réhumaniser les rapports entre les administrations et les agriculteurs.
Henri Cabanel
“Une concertation sera menée au niveau national (...) afin de déterminer les conditions nécessaires pour assurer la mission de sentinelles”, indique de son côté le gouvernement. “Afin de toucher un maximum d’agriculteurs, plusieurs dispositifs existent aujourd’hui pour accompagner les situations de détresse et être à l’écoute des situations personnelles” précise également l’exécutif.
Henri Cabanel, lui, entend “ surveiller ce que ce sera”, et espère qu’ “on va arrêter rapidement une date pour identifier les effets de ces mesures, voir si ça a été efficace”. Le parlementaire héraultais espère que “d’ici deux ans”, les premiers résultats seront probants.