Témoignage. "On a l'impression de ne plus exister", quand la pauvreté progresse en silence et la solidarité s'étiole

Publié le Écrit par Catherine Léhé et Laurent Beaumel
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Le Secours catholique présentait ce samedi 16 novembre 2024 à Montpellier (Hérault), son rapport annuel sur l'état de la pauvreté en France en 2024 qui ne cesse de progresser. Mais ce qui inquiète surtout les bénévoles c'est l'éloignement de la solidarité.

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À la Maison Campredon à Montpellier (Hérault), c'est la fête, une kermesse pour oublier la misère. Roxanne survit avec ses chats et son chien avec 400 euros par mois de pension alimentaire.

Chaque journée commence par une course à la nourriture. Elle fréquente assidûment comme bénévole et bénéficiaire cette maison du Secours catholique qui accueille sans condition les personnes dans la détresse. La pauvreté a bouleversé sa vie.

"Quand on se retrouve de l'autre côté, on a honte. On a l'impression de n'être plus rien, de ne plus exister. On entend les autres aussi : "Oh elle ne travaille pas, elle est fainéante. On l'entend continuellement à la télévision. Même quand on est dans la précarité, on est quelqu'un. J'ai eu du mal à rebondir là-dessus, pendant un moment après une séparation de couple, on a l'impression de ne plus exister et on a honte d'être stigmatisée."

Avant, Roxane aidait les autres en participant par exemple à la collecte des Restos du cœur. Franchir la porte d'une association pour demander de l'aide a été très difficile.  

Vous êtes trois jours sans manger, vous êtes obligée de franchir ce pas, se souvient-elle. Vous êtes obligée de dire : est-ce que je pourrais avoir quelques boites de conserves, est-ce que je pourrais avoir au moins à manger pour midi. C'est comme ça que ça démarre.

Roxane, bénévole et bénéficiaire du secours catholique

Devenir bénévole pour rompre la solitude

Roxane est mère de trois grands enfants, partis loin faire leurs études. Avant de chercher la nourriture, elle a cherché à rompre sa solitude. En faisant du bénévolat, elle s'est à nouveau sentie utile. "Mon regard sur les autres a aussi beaucoup changé car la pauvreté dérange. "J'ai appris à regarder et découvrir des gens très bien des ingénieurs, des gens tombés parfois dans l'alcool suite à un accident de la vie". 

Comme de très nombreuses personnes en difficulté, la dématérialisation l'a également éloigné des services publics et des aides auxquelles elle pourrait prétendre, faute d'adresse. C'est ce que démontre le dernier rapport annuel du Secours catholique qui l'évoque sur son compte X :

 

Un ménage sur quatre vit sans aucune ressource

Comme Roxanne, ils sont nombreux à renoncer à leur droit. Dans le même temps, la pauvreté et l'exclusion représentent moins de 4% des dépenses de protection sociale par an.

Plus d'un ménage pauvre sur quatre vit sans aucune ressource. Un record. Le président du Secours Catholique de l'Hérault, Jean Marie Brugeron s'inquiète, lui, surtout d'une solidarité qui s'étiole. "Ce qui m'inquiète le plus au-delà des chiffres, c'est l'ambiance générale qu'ils traduisent. Aujourd'hui, la pauvreté est dénoncée et les pauvres sont humiliés, dans les discours de différents médias et les discours privés, pointe-t-il On est incapable à nouveau de faire preuve de solidarité pour aider les plus faibles. Il faut lutter aussi contre cette ambiance générale qui fait qu'on ne reconnaît plus quelqu'un qui est humain et comme nous."

La pauvreté dans l'Hérault progresse en silence.

 

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