Témoignages. "C'est dur de voir ses bêtes comme ça" : maladie hémorragique, fièvre catarrhale, cette double épizootie qui menace les éleveurs

Publié le Écrit par Noëlle Hamez
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Depuis la fin de l'été, les éleveurs d'ovins et de bovins d'Occitanie enregistrent un nombre élevé de contaminations aux virus de la maladie hémorragique épizootique (MHE) et de la fièvre catarrhale ovine (FCO). Une situation qui pourrait nuire à l'économie du secteur sur le long terme.

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"Trois de mes vaches sont tombées malades. Une en particulier était très creusée, elle était vraiment mal. Elle tendait l'encolure de douleur... C'est dur de voir ses bêtes comme ça." Théo Covelli est éleveur bovin à Pégairolles-de-l'Escalette dans l'Hérault. Il y a quelques jours, une partie de ses vaches s'est soudainement mise à baver, à perdre du poids, pour finalement refuser de se lever par manque de force.

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Les vaches du troupeau de Théo Covelli présentent plusieurs symptômes significatifs. ©France Télévisions

Ces symptômes, les éleveurs les connaissent. Car depuis la mi-août, deux maladies connaissent un pic de contamination dans les troupeaux de bovin, d'ovins et de caprins d'Occitanie : la MHE (maladie hémorragique épizootique) et de la FCO (fièvre catarrhale ovine), aussi appelée épidémie de "langue bleue". Véritables fléaux des éleveurs.

Le moucheron tueur

La FCO est arrivée en France depuis les Pays-Bas en août 2006. Mais depuis août 2023, une mutation du virus a été détectée dans l'Aveyron et s'étend rapidement dans l'Hérault, où une trentaine de cas sont déjà enregistrés selon le Groupement de défense sanitaire pour l'Occitanie (FRGDS Occitanie).

La MHE quant à elle, est une maladie beaucoup plus récente qui touche principalement l'Occitanie, en raison de son arrivée par les Pyrénées, depuis la Méditerranée. En septembre, 1000 cas de contamination au MHE étaient à déplorer dans la région.

Mais en quoi ces maladies sont-elles liées ? En réalité, les deux virus sont assez proches car leur contamination s'effectue par le biais d'un moucheron qui ne mesure pas plus de 3 millimètres : le Culicoide. "Ce sont les femelles qui sont les plus impliquées dans la transmission de ces virus, puisqu'elles piquent l'animal pour boire un peu de sang", explique Claire Garros, chercheuse en entomologie au Cirad (centre de recherches en agronomie).

Un automne trop doux

Pour mieux comprendre la transmission des virus MHE et FCO, Claire Garros passe ces petits insectes au microscope. "On réalise des captures à partir desquelles on cherche le nombre de femelles Culicoides, afin de déterminer si cette espèce est abondante à un endroit, et donc savoir si un risque de transmission de pathogènes existe."

Plus les Culicoides seront présents, plus le nombre de piqûres sera important... Ce qui accroît le risque de transmission des virus.

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15 000 Culicoides peuvent être retrouvés par endroit selon la chercheuse Claire Garros. ©France Télévisions

D'autant plus que, en cette fin d'octobre, le climat encore doux favorise le maintien des populations de Culicoides, habituellement décimées par le froid dès l'automne. "On ressent directement les conséquences du changement climatique", affirme l'éleveur Théo Covelli. "Il fait plus chaud, les moucherons restent plus tard. Là il pourrait déjà geler et les risques diminueraient..."

"Ces moucherons font partie de la faune classique de nos régions d'Europe du nord et de l'ouest."

La faute du réchauffement climatique ? Claire Garros préfère nuancer. "Ces moucherons font partie de la faune classique de nos régions d'Europe du nord et de l'ouest. Ce n'est pas une espèce invasive comme le moustique tigre. À l'inverse, on a plutôt des introductions de virus qui remontent via l'Espagne et qui se transmettent à nos faunes de Culicoides."

La fatalité du facteur chance

Il n'empêche, les éleveurs doivent mettre en place des techniques de prévention afin de se prémunir des épidémies. "Il ne faut pas avoir ses vaches trop proches de celles du voisin, désinsectiser et mettre du répulsif... Et puis il y a la chance. Souvent en cas de maladie, ce n'est pas qu'on a mal fait notre travail c'est que ça nous est tombé dessus. Dans ce cas on prévient les voisins aussi pour qu'ils soient au courant."

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Christophe Lacz revient sur le traitement de ces maladies. ©France Télévisions

Christophe Lacz, président de la FRGDS Occitanie, indique également qu'un vaccin existe pour se prémunir du FCO. "Malheureusement, il n'en existe pas encore pour le virus du MHE. Et avec le temps les éleveurs ont tendance à perdre ce réflexe de vaccination."

Des séquelles pour le budget

Si le MHE et le FCO ne représentent pas un risque sanitaire pour l'être humain, un problème d'ordre économique risque tout de même de se poser.

En termes de rendements, la valeur marchande des animaux, amaigris par la maladie, chute inévitablement. "À cela on ajoute un risque plus grand d'avortements ou de malformations des veaux à la naissance, les coûts liés aux soins..." Pour exporter leurs animaux vers les partenaires économiques étrangers, les éleveurs doivent réaliser un dépistage qui entraîne un coût supplémentaire lors de l'export.

"On ne peut pas encore mesurer toutes les répercussions, c'est ça qui est le plus angoissant."

Christophe Lacz affirme d'ailleurs que "certains animaux sortent positifs de ces analyses sans avoir contracté de symptômes au préalable." Pour Théo Covelli, c'est la goutte de trop : "on ne peut pas encore mesurer toutes les répercussions, c'est ça qui est le plus angoissant."

Le FRGDS devrait mener des études prochainement pour connaître l’impact exact de ces virus sur les économies des éleveurs. En attendant, l'association demande un soutien financier et moral aux autorités publiques, notamment au Conseil régional d'Occitanie.

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