Après l'annonce par la ministre de la Culture, jeudi 18 février, d'une jauge maximum assise de 5000 spectateurs pour l'été 2021, plusieurs responsables de festivals en Occitanie s'interrogent sur la viabilité d'une telle formule, dont les modalités restent à préciser. L'attentisme prédomine.
Combien seront-ils à pouvoir se maintenir cet été ? Le plus grand flou règne dans le milieu des festivals d'Occitanie après les annonces de Roselyne Bachelot ce jeudi 18 février. Face à la persistance de la pandémie de Covid-19, la ministre de la Culture limite le nombre de spectateurs à 5000 maximum. Ils devront obligatoirement être assis "à distance". Pour ce qui est des éventuelles mesures sanitaires et de l'ouverture des buvettes et des stands de restauration, aucune précision. Dans ces conditions, beaucoup de responsables préfèrent attendre avant de se décider.
Carcassonne étudie la question
Du côté du festival de Carcassonne (Aude), annoncé du 6 au 31 juillet, la Ville indique que le maire (LR) Gérard Larrat s'exprimera en début de semaine prochaine, "probablement lundi", après avoir pris connaissance de l'étude de faisabilité qu'il a commandité. Même attentisme du côté des Pyrénées-Orientales et du festival Voix de Femmes à Maury, dont la jauge habituelle est comprise entre 1500 et 1800 spectateurs, mais essentiellement debout. Le maire (DVG) Charles Chivilo se donne encore un mois de réflexion :
C'est une bonne nouvelle mais on va rester prudents jusqu'au mois de mars. Il faut en discuter avec toute l'équipe et les bénévoles, c'est une décision collective. La jauge financière est à prendre en compte.
Jazz à Sète attend des précisions
Sur le bassin de Thau dans l'Hérault, le fondateur et directeur de Jazz à Sète Louis Martinez est inquiet : "Notre capacité maximum est de 1600 places assises payantes au Théâtre de la Mer. Mais quelle distanciation entre les spectateurs nous sera demandée ? On ne sait pas. Si on doit réduire la jauge, n'avoir personne debout et pas de buvette, on va perdre nos partenaires privés qui viennent à chaque soirée par groupes de 50 à 150 participants et qui souhaitent une prestation incluant la restauration".
Situation financière précaire
Une inquiétude d'autant plus grande qu'il nous précise que la Ville de Sète a réduit cette années de 10% ses subventions à chaque festival, souhaitant se concentrer sur les événements du Centenaire Brassens et sur sa candidature au titre de "capitale française de la culture".
La situation financière deviendrait très compliquée si des frais liés aux mesures sanitaires venaient se rajouter, tels que le renforcement du personnel de sécurité pour faire respecter une éventuelle obligation du port du masque, ou encore l'instauration de tests Covid à l'entrée.
Louis Martinez se donne jusqu'à début avril pour prendre sa décision définitive :
Je pense que nous n'aurons pas de précisions supplémentaires de la part du gouvernement avant minimum fin mars. J'en ai discuté avec plusieurs directeurs et agents : pour l'instant pas de signature ferme, on ne peut que mettre des options de programmation, avec des artistes majoritairement français et quelques Européens pour contourner l'écueil de la fermeture des frontières. Ceux de renommée mondiale accepteront-ils nos conditions financières forcément serrées ? Je ne sais pas.
A l'image du "marathon Sud de France" (une déambulation à travers la ville) qui avait été maintenu à l'été 2020, Jazz à Sète pourrait maintenir des événements gratuits pour justifier les subventions des collectivités, commencer par celles de la Région Occitanie.
Plusieurs scénarios pour Montpellier Danse
En revanche, du côté de Montpellier Danse, qui débute traditionnellement au mois de juin, la programmation est quasiment bouclée et les annonces gouvernementales ont suscité l'espérance : "ça veut clairement dire qu'on a lieu : aucun de nos spectacles n'accueille de public debout. On travaille à fond sur la programmation, même si on repousse au maximum les annonces et l'impression des livrets".
Moins de compagnies, plus de représentations
Tout juste peut-on révéler que 50% des spectacles de l'édition 2021 seront des reports de celle de 2020 et des déprogrammations de novembre et décembre. Montpellier Danse travaille toutefois sur des soirées modulables en demi-jauges au Corum (2000 places en capacité maximale ou 1000 si telles étaient les consignes) et à l'Agora (600 ou 300 places selon le scénario retenu).
Dans le cas d'une demi-jauge imposée, il y aura moins de compagnies que les années précédentes, mais celles qui seront présentes donneront davantage de représentations afin de pouvoir proposer au final le même nombre de places qu'en temps normal. Objectif : ne pas léser le public.
Des captations de spectacles sont également à l'étude.
Matignon en arbitre final
Reste que selon Emmanuel Négrier, directeur de recherche au CEPEL- CNRS Université de Montpellier et co-auteur d'une étude chiffrée du coût de la pandémie pour les festivals de musique en France, cette limitation de jauge à 5000 spectateurs maximum n'est pas économiquement viable pour les plus gros événements de la Région, tels que les Déferlantes de Céret et l'Electro Beach d'Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales) ou encore le festival de Nîmes, qui n'ont pas répondu à nos sollicitations.
Seuls des tests à l'entrée permettraient de ne plus contingenter le public.
Ces annonces, faites à l'issue d'une réunion entre la ministre et le Syndicat des Musiques Actuelles (SMA, principal représentant de la profession) pourraient donc n'être qu'un compromis visant à temporiser, avant que Matignon n'arbitre définitivement la question de la tenue des festivals et de ses modalités concrètes. En attendant, tous gardent un oeil sur les courbes de contaminations et d'hospitalisations dues au coronavirus, en espérant voir s'infléchir les restrictions.