Deux ans après le drame de Millas, les familles des victimes redoutent la réouverture de la ligne SNCF

Ce samedi 14 décembre marque les deux ans de la collision entre un car scolaire et un TER sur le passage à niveau de Millas, qui a coûté la vie à six enfants. La ligne ferroviaire entre Perpignan et Villefranche-de-Conflent devrait rouvrir en mars 2020, ce que craignent les familles des victimes.

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La terrible collision survenue au passage à niveau de Millas, entre le bus scolaire des collégiens de Saint-Féliu d'Avall et un train régional en direction de Villefranche-de-Conflent est survenue il y a deux ans jour pour jour, le 14 décembre 2017. Ce terrible accident, qui a coûté la vie à six enfants et blessé 17 de leurs camarades, a traumatisé toute une population. 
 


Une chape de plomb sur le village

Le département des Pyrénées-Orientales rendra un hommage solennel, ce samedi à 16 heures, l'heure du drame, au pied de la nouvelle stèle érigée sur la route du collège, à Millas. Les familles, les proches des victimes et les anonymes sont invités à se rassembler en soutien aux enfants survivants et aux familles endeuillées. Il y a un an, une marche blanche avait été organisée en hommage aux victimes.

Si l'accident reste très présent dans les mémoires, les habitants des villages concernés n'en parlent pas. Selon le maire de Saint-Féliu-d'Avall, la douleur reste présente, mais la volonté de passer à autre chose aussi.

Dans le village, il y a une chape de plomb autour de l’accident. On n’en parle pas, parce que c’est un mauvais souvenir, et qu’on ne veut pas appliquer la double peine aux enfants. C’est pour ça que le 14 décembre, on marque la stèle et on se rassemble, mais dès le 15, il y a un spectacle pour les enfants à la salle des fêtes, avec un grand arbre de Noël, des goûters… pour montrer que ce n’est pas parce qu’il y a eu l’accident qu’on va tout arrêter.
- Roger Garrido, maire de Saint-Féliu-d'Avall

La vie à repris son cours pour les collégiens de Millas, qui vont et viennent sans croiser un seul train depuis deux ans. Mais les choses sont sur le point de changer. La ligne ferroviaire reliant Perpignan à Villefranche-de-Conflent, sous scellés judiciaires depuis le 14 décembre 2017 pour les besoins de l'enquête et des expertises, a été restituée fin octobre à la SNCF. Des travaux de modernisation de la ligne, passant par le-dit passage à niveau n°25, devraient débuter en janvier, pour une reprise du trafic vers la seconde quinzaine du mois de mars 2020.
 

Les parents d'élèves exigent le décalage des horaires de train

Depuis deux ans, de nombreux usagers réclament en effet le retour à la circulation de cette ligne. L'association des parents d’élève du collège Christian Bourquin redoute, de son côté, cette échéance. Bien qu'elle ne soit pas opposée à la reprise du trafic, son représentant Guillaume Girard refuse catégoriquement que les bus scolaires puissent croiser un seul train au départ ou au retour du collège.

Il réclame un aménagement des horaires de train.

Si aujourd’hui on prend les fiches horaires, il y a un train qui passe par le passage à niveau de Millas à 16h11 et un train qui passe à 17h02, alors que les enfants sortent à 16 heures et à 17 heures du collège. Le temps que les enfants prennent leur bus ou leur vélo, ils sont sûrs de rencontrer le train. C’est tout à fait hors de question. Les enfants ont peur aujourd’hui de cette reprise de train. S’ils croisent un train, ça va vraiment les traumatiser, comme il y a deux ans, ça va les poursuivre.
- Guillaume Girard, de l'association des parents d’élève du collège

 

Une pétition à été lancée dans ce sens et a recueilli 400 signatures. Guillaume Girard l'a présentée à la présidente de Région, Carole Delga, et à Jean-Luc Gibelin, vice-président aux Transports, qui a assuré le lien avec la SNCF. Un rendez-vous a été fixé en fin de semaine prochaine. 

On attend beaucoup de cette réunion. J’espère que la SNCF va nous présenter des horaires aménagés afin que les enfants puissent aller et venir au collège de manière sereine, et que les parents et la communauté éducative du collège soient rassurés de laisser partir les enfants.
- Guillaume Girard

Cette initiative est également soutenue par Roger Garrido, qui la trouve absolument nécessaire. "Vous rendez-vous compte qu'encore aujourd’hui, alors qu’il n’y a pas de train qui circule, il y a des enfants dont les parents les amènent en voiture, et qui ne prennent pas le bus?", raconte le maire de Saint-Féliu-d'Avall, qui prévient que si les travaux ne sont pas faits et les horaires des trains pas décalés, les élus "passeront à l'action".

Une proposition de loi pour sécuriser les passages à niveau

En effet, l'enquête du BEA-TT, qui a déterminé les circonstances techniques du drame, préconise un élargissement des carrefours de part et d'autre du passage à niveau n°25 pour des raisons de sécurité. 

Le rapport prouve que le bus peu facilement monter sur le trottoir dans son virage, ce qui oblige le chauffeur à regarder dans ses rétroviseurs pour contrôler sa trajectoire et ne pas mordre sur le haricot, et il suffit d'un moment pour se retrouver sur le passage à niveau, que la barrière s’abaisse et voilà.
- Roger Garrido

 

L'association "À la mémoire de nos anges", qui regroupe trente familles de victimes, fait également bouger les choses au niveau national. Elle a notamment obtenu l'assurance de la députée des Pyrénées-Orientales, Laurence Gayte (LREM), qu'un rapport soit dressé au niveau accidentogène tous les six mois sur les passages à niveau en France.

C’est impossible d’oublier, on ne vit même plus, on survit, après un drame comme celui-là. Mais l’important, c’est de prendre de la hauteur, et de voir ce qu’il n’a pas fonctionné, d’aller au bout des choses. Mon rôle, c’est de témoigner de ce qui nous est arrivé pour que ça ne se reproduisent plus sur aucun passage à niveau.
Fabien Bourgeonnier, président de "À la mémoire de nos anges"

Fabien Bourgeonnier a également établi contact avec le sénateur Jean Sol (LR) afin de faire en sorte qu'une proposition de loi de sécurisation des passsages à niveau soit faite. Ce texte préconise, selon le président de l'association, de "mettre des radars sur les passages à niveau et d'installer un système GPS dans les cars pour indiquer la présence ou non d’un train".

Au-delà de la prévention d'autres accidents, le procès de l'affaire, dont la date n'a pas encore été fixée, reste très attendu par les habitants, qui espèrent que peut-être, enfin, des réponses définitives leurs soient données.
 

 
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