La hêtraie de la Massane, réserve naturelle forestière préservée de l'exploitation depuis 150 ans, fait partie des sites entrés le 28 juillet dernier au patrimoine mondial de l'UNESCO. Découverte d'un "laboratoire à ciel ouvert".
Une forêt, mais pas n’importe laquelle. Perchée sur les hauteurs d’Argelès-sur-Mer, au cœur du massif des Albères, la Massane se distingue à plus d’un titre. D’un côté, le littoral méditerranéen. De l’autre, la frontière franco-espagnole. Entre : 336 hectares de réserve naturelle et un patrimoine ancestral, préservé grâce à des conditions favorables.
"On pense que le fond de vallée de la Massane a joué un effet tampon : un peu plus doux lors de périodes froides, un peu plus frais et humide lors de périodes plus chaudes", explique Jean-André Magdalou, chargé de mission scientifique. Ce qui permet aux hêtres et aux végétaux environnants de figurer parmi les plus anciens du bassin.
Sans doute une relique glacière, en tout cas un témoin de la végétation qui était ici il y a très longtemps.
"Libre évolution"
Autrefois exploitée pour son charbon, utilisé dans les forges catalanes, la zone ne connaît plus de coupes depuis 1885. C’est désormais une forêt "en libre évolution", que scrutent les scientifiques de la réserve depuis plus de 50 ans. "Ce n’est pas une forêt primaire, nuance Jean-André Magdalou, mais c’est une forêt qui a aujourd’hui recouvré une dynamique naturelle, une dimension sauvage. On peut observer tous les processus de vie ou de mort d’un écosystème forestier.".
Leur travail a permis un inventaire extensif de la faune et de la flore. Au total, on décompte 50.000 arbres, en pleine forme ou en état de décomposition. Ces derniers sont particulièrement propices à accueillir une grande diversité animale : 8.200 espèces, dont 80% d’invertébrés et plusieurs espèces endémiques. "Beaucoup de coléoptères, cite Joseph Garrigue, conservateur, ça a été très étudié. On a par exemple, une grosse mouche qui est liée aux très vieux arbres, qui n’est connue en France qu’à la Massane.".
?Fierté de voir 3 sites ?? rejoindre le réseau des forêts anciennes et primaires de l’@UNESCO: la réserve naturelle nationale du massif du #GrandVentron (68/88), la RNN de la forêt de la #Massane (66) et le Bois du #Chapitre (05). Je serai demain au Grand Ventron pour les saluer https://t.co/FWfVhDz1Gb pic.twitter.com/qeyClvS5fs
— Berangere Abba (@b_abba) July 28, 2021
Un écosystème unique fragilisé avec la canicule de 2003 et la pollution à l’ozone. Or, si "la régénération se développe", "on ne peut pas remplacer un arbre qui a 150 ans du jour au lendemain", expose Jean-André Magdalou. D’où la nécessité de préservation du lieu, qui va pouvoir profiter d’une nouvelle notoriété.
Le 28 juillet, la Massane a rejoint avec plusieurs autres sites la liste des "Forêts primaires et anciennes de Hêtres des Carpates et d’autres régions d’Europe" au patrimoine mondial de l'UNESCO. "Une formidable récompense", pour la réserve naturelle catalane.